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LE CAMP D’AGDE

Lieux de mémoire incontournable de l’histoire de la ville au XXe siècle, le monument du camp d’Agde se tient aujourd’hui à l’intersection de la route des 7 Fonts et de la rue Jean Moulin, près du collège René Cassin. Inauguré en 1989, il marque symboliquement l’entrée du camp et rend hommage à toutes les nationalités qui y vécurent.

L’armée décida la création du camp en 1939, pour faire face à l’arrivée massive des réfugiés de la Retirada. Les premiers Espagnols arrivèrent à Agde le 28 février. Au mois de mai ils étaient 25 000 dans des baraques de bois, sur un terrain de 30 hectares. En septembre 1939, seuls quelques Espagnols restaient au camp avant l’arrivée de Tchécoslovaques. Suite aux accords de Munich, une partie de cette armée en exil s’installa à Agde afin de préparer les combats futurs aux côtés des Alliés. A la fin du mois de mai 1940, le camp d’Agde était désigné comme lieu d’accueil des jeunes appelés belges (CRAB). Dès la fin juin, ils étaient rejoints par un détachement de soldats nord africains. En septembre 1940, la Première Légion des travailleurs indochinois (Tonkin, Annam et Cochinchine) s’installa au camp n°1. Depuis la déclaration de guerre, des étrangers issus de nombreuses nationalités, intégrés dans les groupements de travailleurs étaient également assignés à résidence au camp.

Page la plus sombre du camp : l’internement de familles juives à la fin de l’année 1940 et début 1941. Ces dernières quittèrent ensuite Agde pour d’autres camps. Mais en août 1942, c’est au camp d’Agde que furent rassemblés les Juifs raflés dans le département. Ils étaient nombreux depuis 1940 à avoir trouvé refuge en ville. Parmi les courageux Agathois leur étant venus en aide, huit ont reçu la médaille des justes. Le camp avait quasiment cessé de fonctionner à l’arrivée des Allemands, en novembre 1942. Après le départ de l’occupant, il ne resta plus sur son emplacement que les allées de pouzzolane bien vite recouvertes par des lotissements, mais le souvenir des populations qui y vécurent devait perdurer.

Depuis 2009, les Archives d’Agde poursuivent leur travail de collecte de documents et de témoignages sur l’histoire du camp et de la Seconde Guerre mondiale, en collaboration avec les collectionneurs Georges Cléophas et Jo Vilamosa, et l’Association pour la mémoire du camp d’Agde (AMCA). L’exposition « Les Républicains espagnols au camp d’Agde », présentée dans les établissements scolaires, contribue à la connaissance du camp par les jeunes générations.

Agde 1939-1942. Un camp aux portes de la ville

En février 1939, Agde compte 9 000 habitants quand l’armée décide de construire à ses portes un camp destiné à l’accueil de 25 000 républicains espagnols. Ces derniers sont remplacés à la déclaration de guerre par les soldats de l’armée tchécoslovaque, rejoints un an plus tard par des travailleurs indochinois. En mai-juin 1940, la ville accueille un grand nombre de réfugiés français mais aussi Belges, Polonais, Tchécoslovaques parmi lesquels des Juifs, dont nombre seront internés au camp.

Après la bataille de France la ville pleure ses soldats morts au front tandis que l’inquiétude grandit pour ceux qui sont désormais prisonniers en Allemagne. A l’hôtel de ville, le régime du maréchal Pétain imprime sa marque, le maire est maintenu, le conseil municipal modifié, tandis que les conditions de vie des Agathois se durcissent. Au moment de la rafle d’août 1942, le camp d’Agde est le lieu de regroupement des Israélites de l’Hérault. Pendant ses jours douloureux, Sabine Zlatin est présente et obtient la libération d’une centaine d’enfants juifs.

Ouvrage numérique « Agde 1939-1942. Un camp aux portes de la ville »

https://www.ville-agde.fr/page-flip/614a63f391714

https://www.ville-agde.fr/la-mairie/archives-municipales/camp-agde

Josep Bartolí. Les couleurs de l’exil

UN CRÉATEUR EN EXIL

À travers une sélection de plus de 150 œuvres, l’exposition « Josep Bartolí. Les couleurs de l’exil » met en perspective des réalisations majeures de l’artiste, toujours inspirées par l’exil, son engagement et ses combats.

Dans une première partie, sont présentés les dessins la guerre et les camps, réalisés au crayon, sans une once de couleur. Ces croquis sont d’une puissance singulière : illustrations politiques riches de détails et de sens, critique du pouvoir, de l’État, de la religion… Pour Bartolí, dessiner est une nécessité, c’est son « œuvre de résistance ». Ces dessins sont également l’apparition d’un genre tout à fait nouveau : le reportage graphique.

La seconde partie de l’exposition fait dialoguer dessin et peinture, qui fait son apparition dans l’œuvre de Bartolí à partir de 1952. Traitant divers thèmes (la société, l’individu, la culture de masses…) il exploitera tout au long de son parcours les ressources de la couleur, qui prendra parfois totalement le pas sur le trait. Toutefois, chacune de ses œuvres témoigne du dialogue constant que Bartolí entretient volontairement entre abstraction et figuration.

Né à Barcelone, Josep Bartolí est dessinateur et caricaturiste. Il est un partisan convaincu de la République, qu’il défendra armes et crayons à la main. En 1936, il fonde le syndicat des dessinateurs de presse de Catalogne et devient, pendant la guerre d’Espagne, commissaire politique. Après la chute de Barcelone, Bartolí s’exile en France le 14 février 1939, lors de la Retirada. Il est interné dans plusieurs camps différents, dont Saint-Cyprien et Agde.

Après un long périple et l’évasion d’un train qui le conduisait au camp de Dachau, il parvient en 1943 au Mexique, qui offre l’asile à de nombreux réfugiés espagnols. En 1944, avec l’aide de Narcís Molins i Fàbregas, paraît son ouvrage Campos de concentración 1939-194…, témoignage iconographique sans précédent. Participant également à l’ébullition de la révolution mexicaine, Bartolí côtoie Diego Rivera et Frida Kahlo, qui le révèle à la couleur.

Josep Bartolí s’installe ensuite à New York. Il y rencontre Rothko, Jackson Pollock, Kline et De Kooning, dessine dans la revue Holiday Magazine et dans le supplément reporter du Saturday Evening Post. Bien que sa notoriété d’artiste se consolide de plus en plus aux États-Unis, il reste un créateur en exil, multipliant les voyages. En dressant un portrait acide de la société, la question politique et sociale est au cœur de son œuvre jusqu’à la fin de sa vie.

« L’idée est plus importante que la peinture ou le dessin. J’ai besoin d’expliquer quelque chose et comme je n’ai pas d’autre langage, je dois l’exprimer avec ce que j’ai, le dessin et la peinture, mais en sacrifiant les canons artistiques, en oubliant le classicisme plastique, les lois qui régissent la peinture. Expliquer quelques problèmes qu’en général les peintres oublient beaucoup. » Josep Bartolí
La donation

C’est grâce à l’engagement de Georges Bartoli, commissaire d’exposition et neveu de Josep, et du dessinateur Aurel, réalisateur du film Josep (soutenu par la Région Occitanie et le Mémorial du Camp de Rivesaltes) que Bernice Bromberg, veuve de l’artiste, prend connaissance du lieu de mémoire.

À l’occasion de la sortie du film en salles, en septembre 2020, Bernice Bromberg annonce la donation au Mémorial. Il s’agit de l’acte fondateur de l’exposition qui est enrichie par les prêts des Archives municipales de Barcelone, de la Généralité de Catalogne, du Centre culturel de Terrassa et de Manel Canyameres et Joëlle Lemmens, collectionneurs privés.

https://www.memorialcamprivesaltes.eu/expositions/josep-bartoli-les-couleurs-de-lexil

Activités passées et à venir des associations de Caminar

Depuis de trop nombreux mois, les activités des associations en général et les associations mémorielles en particulier, sont très handicapées par la crise sanitaire.
De nombreuses associations n’ont pu se réunir, des réunions telles que des Conseil d’administrations ou Assemblées générales n’ont pu se tenir.

Jusqu’à maintenant nous n’avons pu réunir le CA de Caminar, la dernière réunion date du 6 février 2021 lors de l’AG.

Le bureau de Caminar s’est réuni deux fois en visio conférence, et comme vous sûrement, il nous tarde de tous nous retrouver.

Néanmoins, dans cette crise sanitaire que nous traversons, quelques associations ont pu organiser des festivités, des commémorations ou autres, comme vous pourrez le lire ci-dessous.

Prenez bien soin de vous,

Le bureau de Caminar

– Les 20 et 21 juin de chaque année sont des dates symboliques à Francescas, Condom et Castelnau sur Auvignon.
C’est le samedi 19 juin que MER 47 et MERR 32 se sont retrouvées à Francescas devant la stèle érigée en souvenir des cinq républicains espagnols du maquis de Castelnau sur Auvignon tombés en ce lieu sous les balles allemandes.
Le 21 juin, c’est au cimetière de Condom où ils reposent que Jean Claude DABE, vice-président de MERR 32, a évoqué le souvenir de ces combattants républicains et de ceux tombés le 21 juin 1944 lors de l’attaque du
village de Castelnau sur Auvignon. Quatorze résistants dont dix guérilleros espagnols étaient tombés en effet ce jour-là sous les balles nazies.

Belle initiative de ces deux associations de Caminar.

– Le 14 juillet dernier, à Biert en Ariège, des hommages ont été rendus à Josep Almudever, disparu il y a peu.
Ces hommages sont à l’initiative du Maire nouvellement élu à Biert, Gilbert Lazaroo, membre de MRAST. Joseph faisait partie du groupe à travers notre association MRAST, MHVA à Aulus et surtout avec Terre de Fraternité et notre Ami Guy Saurat..

Une citation au monument au mort avec le drapeau des Brigades, un hommage aux Déportés, et un concert avec El Comunero en l’honneur de notre Ami…

– Le 18 juillet, nos amis de MER 64 et de TML ont participé à la cérémonie commémorative en hommage aux victimes civiles et de la Résistance du 17 juillet 1944 à Buziet.

– Les 19 et 20 août, nos amis des Charentes – APFEEF – ont organisé – dans le cadre de la commémoration du départ du train des 927 Républicains espagnols pour Mauthausen – une soirée spectacle avec la diffusion du film « La lengua de Las Mariposas ». Le 20 août, une cérémonie a eu lieu devant la gare d’Angoulême – devant la stèle en hommage aux 927 – en présence de nombreuses personnalités. Caminar était présent à cette cérémonie.

– Les 11 et 12 septembre prochain, TML organise en partenariat avec le Comité Sousa Mendes des manifestations et une cérémonie au camp de Gurs.

Seront présents, pour le Gouvernement du Portugal Augusto SANTOS SILVA Ministre d’État et des Affaires étrangères du Portugal et pour le Gouvernement d’Espagne, Fernando MARTÍNEZ LÓPEZ, Secrétaire d’État à la Mémoire démocratique et son Directeur de Cabinet. Alfonso BERLANGA REYES, ainsi que des élus des autonomies transfrontalières.

– L’Ateneo du Limousin n’est pas en reste et envisage plusieurs initiatives pour la rentrée du mois de septembre.

– Georges Sentis – notre ami intervenant au colloque de Toulouse – nous fait part d’une cérémonie qui aura lieu à Port-Vendres le dimanche 26 septembre 2021 à 11 h.

La déportation en Algérie de 1 200 républicains espagnols n’est pas tombée dans l’oubli !

Une cérémonie aura lieu pour le 80° anniversaire de la « déportation » en Algérie de 500 « indésirables » français (syndicalistes) et de 1500 « indésirables » étrangers ( anciens combattants des Brigades Internationales et Républicains espagnols).

– Contre l’oubli aux Montreurs d’Images

Caminar, l’Institut d’Histoire Sociale de la CGT, les Editions d’Albret et MER 47 seront accueillis le 30 septembre prochain dans une initiative commune par les Montreurs d’Images à Agen.

Seront présentés à cette occasion les Actes des Journées Caminar organisées à Toulouse au mois d’octobre 2019. Cet ouvrage bilingue de plus de six cents pages restitue les différentes communications présentées par des conférenciers venus d’horizons divers, chercheurs, universitaires, représentants d’associations mémorielles, témoins.

Sera également à l’honneur « Péril de la Liberté », un livre écrit par David LLAMAS, un ami investi depuis toujours à MER 47. L’histoire des siens, de la proclamation de la République aux souffrances de la retirada et de l’exil, constitue la trame de cet ouvrage.

La journée se terminera à 20 heures 30 par la projection du film d’animation « Josep » réalisé par le dessinateur de presse Aurel. Un film sur la « retirada » vécue par l’artiste catalan Josep Bartoli. La projection de ce film, nommé meilleur film d’animation aux César 2021, sera suivie d’un débat.

– La cérémonie à Gaillon, repoussée depuis deux fois pour cause de Covid, et initialement prévue pour début octobre, est une nouvelle fois repoussée pour des raisons
sanitaires. Plusieurs pistes sont d’ores et déjà envisagées et nous vous tiendrons au courant de l’évolution de la situation.

Ce sont nos amis de MHRE89 qui représenteront Caminar.

– Les prochaines Rencontres Transfrontalières auront lieu à Mauléon les 8, 9 et 10 octobre prochain.
Ce seront les 10èmes rencontres. TML est l’organisateur de ces rencontres, où Caminar y sera représenté.

Plaintes pour torture : les oubliés du franquisme

En Espagne, les plaintes de victimes du franquisme se multiplient depuis un an pour des actes de torture commis dans les années 70. Mais la justice espagnole refuse encore d’ouvrir des procès. Comment expliquer qu’aucun criminel franquiste n’ait été jugé, plus de 40 ans après la mort de Franco ?

Place de la Puerta del Sol, en plein cœur de Madrid, un lieu emblématique prisé par les touristes qui s’y prennent en photo ou par les Espagnols qui ont l’habitude de s’y promener. Sur le côté, se dresse un grand bâtiment, qui surplombe la place : il s’agit du siège du gouvernement régional de Madrid. Aujourd’hui, les nombreux touristes qui passent devant ne connaissent pas la fonction bien différente que ce lieu avait sous le franquisme. Il faut dire qu’aucune plaque commémorative n’a été apposée sur la façade.

endant la dictature de Franco (1939-1975), c’était le siège de la Direction générale de la sécurité (DGS), l’un des principaux centres de détention et de torture par lequel sont passés de nombreux opposants politiques.

Antonio González Pacheco, tortionnaire visé par neuf plaintes de victimes

Jesús Rodríguez Barrio est l’une des nombreuses victimes à avoir été torturée dans ce bâtiment. Il a été arrêté trois fois exactement dans les années 70 : en 1972, il avait alors 18 ans, en 1974 et en 1975. Cette année-là, ce militant de la Ligue communiste révolutionnaire croise le chemin d’un policier franquiste, Antonio González Pacheco, surnommé Billy el Niño, pour l’habitude qu’il avait de manier l’arme comme un cow-boy.

 » Le 16 avril 1975, j’étais sur le point d’entrer dans la maison où j’étais invité. A ce moment, un groupe de policiers qui m’attendait caché s’est jeté sur moi. J’ai été conduit à la Direction générale de la sécurité puis aux interrogatoires, où m’attendaient plusieurs policiers. L’un d’entre eux était le célèbre Antonio González Pacheco. J’étais à peine entré dans la salle d’interrogatoire, et sans me dire un mot, il me donna un gros coup dans les parties génitales : j’étais plié en deux, tellement j’avais mal. Il a continué à me frapper. Et après tous ces coups, il a commencé à me poser des questions « . Jesús Rodríguez Barrio

Jesús Rodríguez Barrio a été torturé pendant trois jours dans ce centre de détention. Enfermé dans une cellule au sous-sol, entre deux interrogatoires, il entendait le bruit des pas des gens qui se promenaient Puerta del Sol, à travers une petite fenêtre « où n’entrait pas la lumière, seulement un peu d’air ». « Les gens passaient en riant, sans savoir ce qu’il y avait en dessous. Toi, tu étais juste sous leurs pieds et tu te disais : ces personnes qui se promènent n’ont aucune idée de ce qui se passe en dessous. Les gens ignoraient complètement l’horreur qu’il y avait dans ces trous, dans ces sous-sols », raconte aujourd’hui ce professeur d’économie à la retraite. Jesús Rodríguez Barrio s’apprête à porter plainte devant la justice espagnole contre son tortionnaire : « un homme qui savourait les moments où il nous torturait. Son objectif était d’humilier et de détruire moralement les personnes qu’il interrogeait ».
Rosa García Alcón a porté plainte au mois de mars contre son tortionnaire, Antonio González Pacheco​.

Rosa García Alcón, elle, a déjà porté plainte contre ce même tortionnaire, au mois de mars. Elle aussi a été torturée dans ce centre de détention, à Madrid. C’était en août 1975, avant d’être conduite à la prison pour femmes de Yeserías de Madrid jusqu’en décembre, pour appartenance à une organisation illégale : la Fédération Universitaire Démocratique Espagnole (FUDE), une organisation étudiante qui appartenait au FRAP.

 » J’étais à peine arrivée à la DGS qu’Antonio González Pacheco m’a donné des coups de poings dans le visage, sur le corps, des coups. Je tombais et il me relevait en m’attrapant par les cheveux, je les avais longs à l’époque. Il me donnait des coups de pieds. […] Deux fois, ils m’ont emmenée en voiture pour trouver une de nos planques … mais nous n’en avions pas. En chemin, ils me disaient qu’ils allaient m’emmener dans un grand parc de Madrid, qui s’appelle Casa de Campo, qu’ils allaient me violer et que mes parents ne sauraient jamais où j’étais. C’était ce genre de menaces en continu « .
Rosa García Alcón

Aujourd’hui, Antonio González Pacheco est visé par neuf plaintes de victimes, pour crimes contre l’humanité à Madrid. D’autres victimes s’apprête à porter plainte contre lui. Toutes les victimes sont membres de l’association La Comuna, une association créée en 2011 pour venir en aide aux victimes de la fin du franquisme. Il existe déjà de nombreuses associations de victimes, dite de mémoire historique, mais la plupart était composée de proches de victimes disparues au moment de la Guerre civile (1936-1939). Leur travail portait plus sur la recherche des corps de ces victimes, souvent jetées dans des fosses communes. Il y avait donc comme un « vide associatif », qu’a voulu combler La Comuna en accompagnant les victimes, encore vivantes, dans un combat judiciaire que n’avaient pas forcément entrepris les autres associations de victimes.

De Madrid à Oviedo, un mouvement « juridique » qui s’étend à toute l’Espagne

Les neuf premières plaintes de victimes de torture ont été déposées à Madrid, où vit aujourd’hui le tortionnaire Antonio González Pacheco. Mais ce qui ressemble aujourd’hui à un mouvement « juridique » est en train de s’étendre à d’autres villes espagnoles. Au mois de mai, trois autres victimes, résidant à Oviedo dans les Asturies, ont porté plainte pour torture contre Pascual Honrado de la Fuente. Vicente Gutiérrez Solís, 85 ans, est l’une de ces trois victimes.

Ce militant du Parti communiste a été arrêté et torturé plusieurs fois dans les années 60. « Ils me frappaient dans le dos, il y avait aussi les coups de poings qu’ils te donnaient dans l’estomac. Tous les coups qu’ils te mettaient, ça t’anéantissait », confie aujourd’hui ce mineur à la retraite, dans son appartement à El Entrego, un petit village situé à une trentaine de minutes d’Oviedo. Comme Antonio González Pacheco à Madrid, Pascual Honrado de la Fuente est toujours vivant et peut croiser ses victimes dans Oviedo. « Pascual, je l’ai croisé après dans les années 80, avec un autre policier devant le local du parti communiste. Quand je les ai vus, je suis allé les voir et je leur ai dit que c’était lamentable de rencontrer encore ces tortionnaires dans la rue, que c’était une honte qu’ils aient poursuivi les gens quand ils manifestaient ou quand ils luttaient pour les libertés démocratiques. Il ne m’a pas répondu ! Cela me fait mal de devoir me rappeler que ces policiers se promènent encore par ici et qu’on ne les ait pas sanctionner comme ils le méritent », s’emporte le vieil homme moustachu.

Sa plainte, comme celles des deux autres victimes d’Oviedo, a été rejetée en première instance. Il a fait appel et est prêt à poursuivre son combat judiciaire. « Tant que j’ai de l’énergie, que je suis en bonne santé, je continuerai à exiger que ce type de personnes soit jugé comme il se doit et qu’ils paient pour ce qu’ils ont fait. Nous allons continuer à nous battre jusqu’au dernier moment », affirme Vicente Gutiérrez Solís. Il marque une pause : « pour leur rappeler que nous sommes toujours là ».

La plainte argentine

L’année choisie pour créer l’association de victimes La Comuna n’est pas due au hasard. En 2010, le juge Baltasar Garzón est suspendu de ses fonctions au sein de l’Audience nationale, la plus haute juridiction pénale espagnole pour avoir enquêté sur les crimes du franquisme. Deux ans après, celui qui a provoqué l’arrestation du dictateur chilien Augusto Pinochet est définitivement écarté.

Dans une résolution du 28 mars 2012, la Cour suprême espagnole se prononce définitivement contre l’ouverture d’enquête sur les crimes du franquisme. Depuis, plus aucun juge n’a suivi l’exemple du juge Garzón. La plupart des plaintes des victimes du franquisme, comme celle de Rosa García Alcón, ont été rejetées en première instance par les tribunaux espagnols.

« De mon point de vue, abandonner les victimes du franquisme, comme cela a été le cas jusqu’à aujourd’hui, c’est un manquement aux devoirs d’un Etat de droit, un manquement aux obligations d’un juge. Malheureusement, la position de la justice est à l’opposé de cette idée. J’étais conscient des risques que je prenais et des conséquences que cela pouvait engendrer, mais je ne pouvais pas poursuivre des crimes contre l’humanité, génocides, des actes de torture, commis sous la dictature argentine et chilienne, je ne pouvais pas me contenter d’avoir arrêté Pinochet à Londres et dire qu’ici il ne s’était rien passé, quand j’ai eu l’opportunité d’enquêter sur des crimes similaires en Espagne. Si, il s’est passé quelque chose. Et il y a aujourd’hui une impunité sur laquelle s’accordent toutes les institutions, tous les partis au pouvoir de gauche comme de droite « .
Baltasar Garzón, ex-juge de l’Audience nationale

La notion de crimes contre l’humanité, rejetée par la justice espagnole

Dès 2010, plusieurs victimes, voyant que les voies judiciaires sont bloquées en Espagne, portent plainte devant un tribunal argentin pour crimes contre l’humanité au nom du principe de la justice universelle. C’est un dispositif juridique qui permet à un Etat de poursuivre les auteurs de crimes contre l’humanité, quel que soit le lieu ou le crime qui a été commis, sans prendre en compte la nationalité de l’auteur ou des victimes. Pour constituer leur plainte, les victimes ont besoin d’associations pour les orienter vers des avocats, les appuyer dans leur travail de recherches de documents. C’est là qu’intervient La Comuna, qui permet à de nombreuses victimes, comme Jesús Rodríguez Barrio et Rosa García Alcón, de porter plainte en Argentine.

La juge argentine, María Servini de Cubría, se saisit de l’affaire et demande l’extradition de plusieurs criminels franquistes, dont Antonio González Pacheco. En 2014, le gouvernement espagnol a refusé d’extrader ces criminels franquistes, au motif qu’il ne s’agit pas de crimes contre l’humanité.

L’ouverture de procès contre des tortionnaires franquistes est en fait conditionnée par cette notion de droit. Les actes de torture qu’ont subis ces opposants politiques dans les années 70 peuvent-ils être considérés comme étant des crimes contre l’humanité ? Pour que cela soit le cas, il faut que ces actes « ne soient pas isolés mais qu’ils aient été commis dans le cadre d’un plan généralisé et systématique de la part des autorités », comme le rappelle Javier Chinchón, professeur de droit international à l’Université Complutense de Madrid. En rejetant la notion de crimes contre l’humanité par rapport à ces actes de torture, la justice espagnole considère donc qu’il s’agit d’actes isolés. Et les actes de torture, même s’ils sont prouvés, sont prescrits au bout de dix ans. « Selon l’interprétation de certains tribunaux, ce n’était pas commun de la part des autorités franquistes de torturer systématiquement les prisonniers. La réalité, que nous connaissons, est tout autre : la torture était généralisée et c’est pour cela qu’il n’y avait aucune conséquence judiciaire. C’était une politique mise en place par l’Etat qui visait des opposants politiques ou d’autre catégories de personnes », détaille le professeur de droit international, membre de Rights International Spain.

Réforme de la loi d’Amnistie ou de mémoire historique ?

La loi d’Amnistie, votée en 1977 au moment de la transition démocratique, fait encore aujourd’hui l’objet de débat en Espagne.

Selon certains avocats ou certaines victimes, elle représente l’obstacle principal à l’ouverture de procès contre des criminels franquistes. Deux ans après la mort de Franco, cette loi a été votée par la plupart des partis, de gauche comme de droite. Elle a notamment permis de faire sortir l’ensemble des prisonniers politiques des geôles franquistes. Au moment de voter cette loi, la plupart des partis de gauche, comme le Parti communiste, ne se doutaient pas qu’elle deviendrait le motif invoqué par certains tribunaux pour rejeter les plaintes d’anciens opposants politiques.

Des projets de réforme ont donc vu le jour afin de modifier cette loi et d’empêcher les tribunaux d’en faire une interprétation erronée. Le 20 mars dernier, la proposition de réforme de la loi d’Amnistie a été rejetée par les principaux partis de droite, le Partido Popular et Ciudadanos, mais également par le PSOE, le Parti socialiste.

Le sujet est sensible politiquement, car cette loi représente un des symboles de la transition démocratique.

Aujourd’hui, le gouvernement du socialiste Pedro Sánchez préfère réformer la loi de mémoire historique. Cette loi a été votée en 2007, sous un autre gouvernement socialiste, celui de José Luis Rodríguez Zapatero. Bien qu’elle soit considérée comme étant un premier pas en faveur des droits des victimes, les associations ou encore certains avocats la jugent insuffisante. La loi de Mémoire historique devait permettre de retirer les symboles franquistes dans les rues, comme les statues ou le nom des rues. Elle devait également permettre la réouverture de fosses communes, où ont été jetés les corps de centaines de milliers de victimes – l’Espagne est derrière le Cambodge, le pays qui possède le plus de fosses communes.
Nomination d’un directeur général pour la mémoire historique au sein du gouvernement

Le gouvernement actuel a aussi pour la première fois créé une direction générale pour la mémoire historique. « Cela souligne la sensibilité de Pedro Sánchez sur ces questions », affirme Fernando Martínez López, qui occupe ce poste au sein du ministère de la Justice.

Fernando Martínez López va être chargé de présenter la nouvelle réforme de la loi de mémoire historique. Une première version avait déjà été présentée en décembre 2017, par le parti socialiste, à laquelle avait d’ailleurs participé Baltasar Garzón et sa fondation FIBGAR qui oeuvre en faveur des droits de l’homme. Le nouveau directeur général de la mémoire historique le reconnaît, la loi de Mémoire historique est « insuffisante », mais elle « pose les bases de la récupération de la dignité des victimes du franquisme et de la Guerre civile ». « Ce que nous envisageons avec la réforme de la loi de Mémoire historique, celle que nous allons présenter aux députés devant le congrès espagnol, ce sont toutes les mesures qui rendent possible une réparation intégrale en termes de vérité, de justice et de garanties de non-répétition. Nous avons travaillé en profondeur sur tous les aspects soulevés par les organismes nationaux et internationaux et humanitaires, par les associations de mémoire historique, sur toutes les insuffisances qui existaient pour faire en sorte qu’une fois pour toutes, nous puissions résoudre ces problèmes et respecter le droit des victimes de la guerre civile et du franquisme », détaille Fernando Martínez López, dans un des bureaux du ministère de la Justice.

Reste maintenant à faire voter cette réforme par les députés du Congrès, l’équivalent de l’Assemblée nationale en France. Le PSOE dispose de 85 sièges, loin de la majorité absolue : 176 voix sont nécessaires pour faire voter un texte. Le parti socialiste devra donc convaincre d’autres partis de gauche comme Unidos Podemos, afin d’atteindre cette majorité. Les principaux partis de droite, le Partido Popular et Ciudadanos, devraient eux voter contre cette réforme, comme ils l’ont fait sur des textes similaires. Le 13 septembre, lors d’un vote au Congrès, ces deux partis se sont par exemple opposés à l’exhumation des restes de Franco de son mausolée, situé dans ce qu’on appelle El Valle de los Caídos, à une cinquante de kilomètres de Madrid.

Le 13 septembre, les députés espagnols ont voté pour l’exhumation des restes de Franco, de son mausolée situé près de Madrid, dans ce qu’on appelle El Valle de Los Caídos.

« Rouvrir les blessures du passé »

Le Partido Popular a gouverné l’Espagne de 2011 à 2018, sous la houlette du chef de gouvernement Mariano Rajoy. Deux mandats – le deuxième a été écourté, après le dépôt d’une motion de censure à l’encontre de Mariano Rajoy – marqués par un retour en arrière, selon les victimes du franquisme. Les victimes dénoncent notamment le fait qu’aucun fonds public n’ait été versé par le gouvernement pour rouvrir certaines fosses communes, comme l’exigeait la loi de Mémoire historique.

La position du Partido Popular a toujours été la même, depuis la création du parti. Le parti est surtout héritier de l’Alliance populaire, fondé par Manuel Fraga, un ancien ministre de Franco. Aujourd’hui, encore, les députés conservateurs refusent de légiférer en faveur des victimes du franquisme. « Pour nous, c’est une question qui est résolue depuis longtemps en Espagne. Les députés s’étaient déjà prononcés de façon très claire sur la guerre civile, sur la dictature dans une résolution que la commission constitutionnelle a approuvée en 2002. Donc notre position sur ce sujet, c’est que les Espagnols ont d’autres priorités, ils s’intéressent à leur présent et à leur futur », affirme Francisco Martínez Vázquez, député du Partido Popular de Madrid, porte-parole de la commission constitutionnelle du Congrès.

« Le gouvernement et les parlementaires doivent travailler sur ces questions pour assurer le futur des prochaines générations et ne doivent pas rouvrir les histoires d’affrontement très tristes entre les Espagnols, qui appartiennent au passé. Pour nous, l’Espagne a vécu une transition exemplaire, une transition qui a permis de passer d’un régime qui n’était pas démocratique, un régime autocratique : c’était une dictature et nous n’avons aucun problème à le dire. Personne au parti Populaire ne défend, absolument personne, la dictature. Nous l’avons toujours dit de façon très claire lors des sessions parlementaires. Nous pensons qu’il faut défendre cette transition, commémorer les 40 ans de notre Constitution, célébrer ce qui a été fait pour réconcilier les Espagnols et construire notre présent et notre futur  » – Francisco Martínez Vázquez, député du Partido Popular de Madrid.

La loi sur la mémoire démocratique et l’infamie de la division des victimes en première et deuxième classe

Le texte ci-dessous est celui de la lettre ouverte adressée par l’ami Octavio Alberola à deux membres du gouvernement dit de « coalition progressiste » au sujet des victimes de la répression franquiste.

Comme l’a annoncé le nouveau ministre de la Présidence, des Relations avec le Parlement et de la Mémoire démocratique, Félix Bolaños, dans une interview publiée le 18 juillet dans le journal El Pais, le Conseil des ministres a approuvé mardi 20 juillet l’avant-projet de loi sur la mémoire démocratique qui devait être approuvé lors du Conseil des ministres ayant suivi le remaniement du gouvernement.

Il faut donc supposer que, conformément à ce qui a été dit dans cette interview – en réponse à la question de savoir si on ne toucherait pas au texte « malgré les critiques » –, le projet de loi sur la mémoire démocratique approuvé n’a pas été modifié et, par conséquent, cette loi – « nous allons la présenter aux Cortes et là elle pourra être modifiée par des amendements » – continue à maintenir l’infamie de la division des victimes de la répression franquiste en victimes de première et de seconde classe.

Craignant que ce soit le cas et ignorant ce que le Conseil des ministres du mardi 20 juillet allait faire, j’ai envoyé trois jours avant cette lettre ouverte, que je reproduis ci-dessous :

Lettre ouverte à Yolanda Díaz* et Irene Montero* :

L’ « égalité » et la loi sur la mémoire démocratique.

Les raisons de cette « lettre ouverte » sont les suivantes :

Comme vous le savez, le remaniement de l’Exécutif et la nomination de Félix Baños comme nouveau ministre de la Présidence, des Relations avec le Parlement et de la Mémoire démocratique ont empêché – selon la presse – le Conseil des ministres d’approuver l’avant-projet de loi sur la Mémoire démocratique le mardi 13 juin (1). Le même texte que celui approuvé par le Conseil des ministres en septembre 2020, bien que modifié et élargi sur certains points suite aux protestations et réclamations des groupes mémorialistes. Un texte que ces groupes continuent de considérer comme insuffisant et indigne, malgré ces modifications et extensions. Non seulement parce qu’il ne correspond pas aux normes internationales en matière de droits humains, mais aussi parce qu’il maintient l’infamie (article 10 de la loi de 2007) de la division des victimes de la répression franquiste en deux catégories.

Une infamie, la division des victimes de la répression franquiste en fonction de la date de leur exécution, ce qui implique de ne pas les reconnaître ni de les indemniser toutes de la même manière, et d’accepter qu’il y ait des victimes de première et de seconde classe par le fait d’avoir été exécutées après ou avant 1968. Une date arbitraire, choisie et fixée par les rédacteurs de la loi de 2007 sans autre « justification » que celle des « circonstances exceptionnelles » et sans expliquer pourquoi c’est à partir de 1968 que les « circonstances » deviennent « exceptionnelles » seulement pour les victimes de la répression franquiste exécutées ; car cette division arbitraire n’existe pas pour la réparation envers ceux qui ont été emprisonnés pendant le régime franquiste. Comment justifier une division si arbitraire dans un cas et pas dans l’autre ? De plus, tant dans la loi de 2007 que dans les projets de loi visant à la réformer, les victimes de la répression franquiste ont toujours été incluses dans une définition unique, sans aucune référence à cette date et aux « circonstances exceptionnelles ». Comme c’est le cas aujourd’hui, avec le nouveau texte, dans lequel ses rédacteurs consacrent un long article à la définition des victimes du coup d’État de 1936, de la guerre civile qui a suivi et de la dictature, pour souligner que sont victimes toutes les personnes qui ont subi la répression franquiste.

Vous savez également que, pour réformer la loi sur la mémoire historique de 2007, le groupe parlementaire socialiste a présenté en décembre 2017 au Congrès des députés une « Proposition de loi sur la mémoire historique et démocratique » qui maintenait cet infâme article 10, et que le groupe parlementaire Unidas Podemos a présenté le 13 juillet 2018 une proposition de loi – elle aussi pour réformer cette loi de 2007 – avec un article (article 32) qui mettait fin à cette infâme discrimination et rétablissait l’égalité entre les victimes de la répression franquiste, en établissant une réparation unique pour « toutes les personnes bénéficiaires de ceux qui sont morts ou ont subi des blessures invalidantes dues à la répression franquiste dans leur lutte contre la dictature jusqu’au 15 octobre 1977 » (2).Retour ligne automatique
Eh bien, le fait est que plus de trois ans se sont écoulés depuis lors et près d’un an depuis la présentation de l’avant-projet de loi sur la mémoire démocratique par le gouvernement de « coalition progressiste », dont vous êtes membres, et que l’avant-projet – qui devait être approuvé par le Conseil des ministres du mardi 13 juin – maintient toujours l’infamie de l’article 10 de la loi de 2007, bien que cet article n’apparaisse pas littéralement dans ledit texte et que le secrétaire d’État à la Mémoire démocratique, Fernando Martinez, prétende – sur la base de la rédaction maquillée et ambiguë de ce texte – qu’« il existe une autre lecture de l’avant-projet » qui efface cette infamie.

En effet, cet avant-projet entretient cette infamie car la disparition dans le nouveau texte de cet article (qui figurait bien dans la proposition de nouvelle loi « sur la mémoire historique et démocratique » du PSOE de décembre 2017) ne signifie pas qu’il n’est plus en vigueur, puisque dans la nouvelle loi – qui est composée de cinq titres « structurés autour du protagonisme et de la réparation intégrale des victimes… » – le chapitre III (du titre I, « sur les victimes »), qui « se réfère à la réparation », indique littéralement que, « avec les mesures qui ont été déployées depuis la Transition, et qui demeurent dans le système juridique, des actions spécifiques sont incorporées… ». Ainsi donc, l’article 10 – qui fait partie des mesures déployées depuis la Transition – reste dans la mise en ordre juridique, tout comme l’infamie de ne pas considérer et accorder des réparations de manière égale à toutes les « victimes de la guerre et de la dictature ». Une discrimination qui ne fait qu’ajouter une peine injuste et douloureuse à celle déjà infligée par le criminel régime franquiste à ceux qui ont donné leur vie pour les libertés aujourd’hui constitutionnelles.

La poursuite d’une telle infamie est une indignité que Unidas Podemos ne doit pas assumer. Non seulement par dignité mais aussi par cohérence avec la proposition de loi présentée par ce groupe le 13 juillet 2018. Car il est évident que ce n’est que si la nouvelle loi considère et indemnise toutes les victimes de manière égale que l’égalité de toutes les victimes de la répression franquiste deviendra réelle et sera rétablie dans le système juridique.Retour ligne automatique
Le rétablissement de cette égalité devrait donc être une priorité pour le gouvernement de « coalition progressiste ». Et plus encore pour la nouvelle deuxième vice-présidente du gouvernement, qui vient de déclarer à la presse que « ce gouvernement doit être celui du redressement, mais aussi le gouvernement de l’égalité », et pour la responsable d’un ministère dont le titre est ministère de l’Egalité

Octavio Alberola

(17 juillet 2021)

* Yolanda Díaz est une élue du Parti communiste espagnol et Irene Montero de Podemos.

NO PASARAN !

Retirada37 a pour objet de « Faire vivre les mémoires et les valeurs des Républicains espagnols exilés ».

Il y a plus de 80 ans 500 000 espagnols fuyaient le franquisme dans un hiver très rude.
Ils finissaient dans les camps de concentration français, traités moins bien que des animaux.
Par la suite un grand nombre fut envoyé dans les camps de déportation nazis où moururent 5.000 d’entre eux.
Des familles s’installèrent en France, en Amérique, dans les anciens pays de l’Est et ailleurs dans le monde. Nous n’avons pas le droit de les oublier.
Le fascisme n’est pas mort, pas plus, avec la mort de Franco en Espagne, qu’avec la fin du régime de Vichy en France, ou la fin de Mussolini en Italie.

Comme le disait si justement Bertolt Brecht :
« Le ventre est encore fécond d’où peut surgir la bête immonde ».

Il ressurgit aujourd’hui avec Vox en Espagne.
Il resurgit avec Le Pen chez nous et Salvini en Italie, en Pologne, en Hongrie avec Orban, avec Bolsonaro au Brésil.

Si de leur côté l’heure de la revanche a sonné,
du nôtre, le combat pour les Libertés continue et Retirada37 en toute modestie doit et peut y contribuer.

Sachons préserver cette originalité de fonctionnement sous la devise
No Pasaran !

L’association Retirada37 s’associe à cet appel contre les idées d’extrême droite et à se rassembler et manifester le 12 juin prochain à Tours, Place Jean Jaurès à 16 h.

8 MAI DÉSIGNÉ PAR LE GOUVERNEMENT ESPAGNOL : JOUR D’HOMMAGE AUX ESPAGNOLS QUI SOUFFRIRENT L’EXIL EN CONSÉQUENCE DE LA GUERRE D’ESPAGNE ET DE LA DICTATURE FRANQUISTE

Le 8 mai 2021, avec d’autres associations, l’association 24 août 1944 a été invitée à participer au premier hommage à l’exil républicain espagnol, organisé par le gouvernement d’Espagne (département de la mémoire historique et démocratique).

Ce jour du 8 mai sera désormais celui de la célébration des exilés républicains espagnols, associés à la victoire sur le fascisme mondial. Victoire à laquelle ils ont largement participé.

Dans bien des lieux en France, les célébrations du 8 mai 1945 se déroulent avec la participation des organisations d’anciens combattants Républicains espagnols, brandissant le drapeau de la république comme seule identification de leur appartenance.

Car même si tous les combattants de l’Exil dit républicain n’exaltaient pas ce drapeau, ce drapeau est le symbole d’une Espagne trahie par ses généraux, l’Eglise et une grande partie de la bourgeoisie.

Dans tous les cas, ce drapeau, même pour nous qui n’en sommes pas fétichistes, celui de la République Espagnole revêt un caractère éminemment anti-franquiste.

À la fin de la guerre d’Espagne, Franco le remplace par le Rouge, Jaune, Rouge. C’est sous cette bannière que la Division Azul ira combattre aux côtés des armées hitlériennes.

C’est sous cette bannière que l’Espagne demeure 36 ans sous la dictature.

Franco, quelques temps avant sa fin, impose une transition monarchique, aux mêmes couleurs : toute la classe politique l’accepte. Ainsi les élections qui transformeront l’Espagne en une démocratie monarchique, ne permettront pas aux partis républicains de s’y présenter. Quel paradoxe ! Et par voie de conséquence, le drapeau de la République est banni.

Cette bataille-là n’est toujours pas terminée, tant que durera la transition de 1978 qui assure la monarchie et l’impunité aux bourreaux.

Cette bataille pour le drapeau de la République est donc la continuité des batailles menées contre le franquisme.

L’association 24 août 1944 a donc jugé important d’être présente à cet hommage et ainsi d’y faire figurer l’engagement des Républicains espagnols de toutes idéologie dans la lutte pour la Liberté et leur présence incontournable dans les diverses résistances au nazisme et au franquisme. Ce jour devrait marquer un grand pas pour l’avenir de l’Espagne et son droit à s’autodéterminer

Pour cause de pandémie cette cérémonie, à la Casa de América à Madrid, fut modeste, solennelle et émouvante d’une durée d’environ deux heures.

Notons la présence parmi nous d’Éliane Ortega bernabeu, spécialiste de l’exil républicain espagnol en Afrique du Nord.

Plusieurs interventions se sont succédées, des représentants de diverses associations mémorielles étrangères ont pris la parole :

Véronique Salou Olivares, présidente de l’association du « 24 Août 1944 » avec l’artiste peintre Juan Chica Ventura qui portait le calot rouge et noir ainsi que l’écharpe ;

Henri Farreny, président de « l’amicale des Anciens Guérilleros Espagnols en France  » ;

Ernesto Casanova Caloto, président de « L’Ateneo Español de Mexico » ;
Pilar Nova Melle, présidente de l’association des « Descendants de l’Exil Espagnol » ;

l’historien Nicolás Sánchez Albornoz, fils de l’historien et président du gouvernement républicain en exil Claudio Sánchez Albornoz ;

l’intervention remarquée par vidéo de Cuathémoc Cárdenas, fils du président Lázaro Cárdenas qui ouvrit les portes du Mexique à des milliers de Républicains. espagnols.

Des intermèdes musicaux sont venus accompagnés la cérémonie, ainsi que des poèmes d’auteurs de l’exil, lus par Manuel Rivas écrivain galicien célèbre, auteur entre autre des non moins célèbres romans Le crayon du charpentier,La langue des papillons . Il était accompagné d’Elvira Sastre.

L’exécutif espagnol maintient cet « engagement ferme » envers la mémoire historique du pays, comme l’a fait remarquer ce samedi la première vice-présidente, Carmen Calvo.

Nous vous offrons également cette vidéo, avec Colette Flandrin Dronne, la dernière que nous avons réalisée avec notre regrettée amie, le 19 mars 2019:

Anarquista, pionera y revolucionaria: radiografía de Federica Montseny, la primera ministra de la historia de España

La periodista Ariadna García Chas repasa en laSexta Clave la vida y obra de Montseny, anarcosindicalista que alcanzó la cartera de Sanidad en 1936, en plena Guerra Civil. Planteó medidas tan revolucionarias como el primer proyecto de ley del aborto de España.

En la semana del 90 aniversario de la proclamación de la II República laSexta Clave fija su mirada en Federica Montseny. Hace 90 años, su ejemplo cambió la historia de España: fue dirigente anarquista y figura destacada del movimiento obrero, y en 1936, durante el Gobierno de Largo Caballero, se convirtió en la primera mujer ministra de España: ministra de Sanidad y Asistencia Social. Aguantó medio año dirigiendo la cartera, en medio de la Guerra Civil.

Montseny se crió en el seno de una familia anarcosindicalista, y eso influyó en su personalidad. Sin embargo, pocos años antes de morir confesó en una entrevista que hubo otro evento histórico que marcó esa vena activista: la gran huelga de mujeres de 1918 en Barcelona. Durante dos semanas, las mujeres paralizaron la ciudad: fábricas, tiendas y comercios. Todo para protestar por la subida de precios de productos básicos después de la Primera Guerra Mundial.

En ese momento, Montseny tenía 13 años. A los 15 ya era activista ‘practicante’, y unos años después se afilió a la CNT, convirtiéndose en una figura muy relevante y visible de la organización. Tanto que los niños la llamaban ‘la mujer que habla’. Así mismo lo contó ella en una entrevista realizada en 1991: « Los chicos, cuando entrábamos en los pueblos, empezaban a gritar: ¡Ahí va, ahí va la mujer que habla y el hombre que la acompaña! Que era un compañero que venía conmigo ». En 1936, en plena Guerra Civil, Largo Caballero la convirtió en ministra. ¿Cómo llegó a ocupar esta cartera siendo anarquista?

Fue una decisión difícil. De hecho, ella no quería aceptar el cargo al principio. Sus padres también se mostraron en contra, afirmando que era dar la espalda a su pasado anarquista. Pero un sector de la CNT la convenció de esta forma que ella misma manifestó: « Vencer todas las resistencias íntimas y las resistencias familiares, y aceptar diciendo lo que me decía siempre Mariano Vázquez, que era el secretario de la CNT que sustituyó a Horacio Prieto: ‘Hazte cargo que estás movilizada’. En lugar de ir al frente, vas al Ministerio ».

Así se convirtió Montseny durante medio año en una de las líderes de España. Y durante seis meses intentó reformas muy relevantes y revolucionarias desde el Ministerio. Por ejemplo, los liberatorios de la prostitución, que eran casas de acogida para mujeres que querían abandonar esa profesión para buscar otro trabajo. También intentó desarrollar el primer proyecto de ley del aborto en la historia de España. Lo redactó, aunque el Consejo de Ministros no lo aprobó. De hecho, ella misma reconoció no estar tampoco a favor, pero entendió que era un « mal menor ».

« Largo Caballero, entre otros ministros, era adverso a la práctica del aborto. Yo también era adversa, pero lo aceptamos como un mal menor en los casos en donde llevar a término un embarazo representara un problema social, médico o personal para la mujer que era víctima de esa situación de hecho », argumentó Montseny en aquella entrevista de 1991. Cabe resaltar que durante la guerra, apostó por la evacuación por miles de niños de España a Francia, México o la Unión Soviética. Fue parte de su labor, pero también su gran arrepentimiento.

Lo hizo, junto a otros dirigentes, con la intención de salvar a los niños de la guerra, pero con la perspectiva de los años se dio cuenta de que había enviado a muchos de ellos a la orfandad, y de muchos no volvió a saberse nunca nada. Cuando Franco y los golpistas vencen en la Guerra Civil, Montseny acaba en el exilio, como otros cientos de miles de republicanos. Cruzó la frontera hacia Francia acompañada de su madre, que estaba enferma y a la que transportaron en una camilla, aunque finalmente murió a los pocos días de llegar. Unos años después, cuando los nazis entran en Francia, es arrestada por orden del franquismo.