« C’est le début d’un cycle scientifique et mémoriel » résume François Godicheau. L’historien toulousain spécialiste de la guerre d’Espagne et de ses suites, est l’organisateur de « Anatomie du franquisme » : un colloque jusqu’à vendredi au Conseil départemental de Haute-Garonne, et une grande exposition qui débutera le 4 avril au musée départemental de la Résistance et de la Déportation, à Toulouse. Il y en aura une deuxième en 2025.
« C’est exceptionnel à Toulouse, en France et en Europe. C’est le premier colloque de synthèse sur l’histoire du franquisme après trois décennies de recherche intense » insiste François Godicheau. Pour ces échanges en langue espagnole, les meilleurs historiens de l’autre côté des Pyrénées sont présents pour exposer leurs travaux sur la dictature du général Franco, qui a régné sur l’Espagne de la fin de la guerre civile en 1939 jusqu’à sa mort en 1975. Le régime a perduré jusqu’en 1977.
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« Une dictature d’une violence extrême »
Ces historiens réunis à Toulouse viennent des universités de Madrid, de Barcelone, de Saint-Jacques-de-Compostelle, de Valence, etc. Leur but : faire mieux prendre conscience les horreurs de cette dictature aux Français. Car pour François Godicheau, il y une ignorance sur le sujet : « Dans les consciences en Europe, ce régime était certes autoritaire, mais finalement paternaliste sur la fin, etc. Non, c’était une dictature d’une violence extrême ! (…) Il y a une condamnation morale absolue du fascisme et du nazisme dans la conscience européenne, mais elle n’a pas touché le franquisme. C’est donc extrêmement important de rétablir ce qu’a été cette dictature et de comprendre sa nature et comment elle a duré 40 ans« .
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Toulouse, capitale de l’exil républicain… mais qui l’oublie
Et le choix de Toulouse n’a rien d’un hasard : la ville a été la « capitale de l’exil » des républicains espagnols. Des familles qui ont fuit les combats en 1936-1939 et qui ont refusé la dictature de Franco. En 1945, 10% de la population de Toulouse était ainsi d’origine espagnole. La ville a aussi accueilli le siège de plusieurs partis politiques, et notamment du PSOE (Parti Socialiste Ouvrier Espagnol).
Parmi les spectateurs de ce colloque, Placer Marey-Thibon. Cette fille de réfugiés est présidente du CTDEE, le Centre Toulousain de Documentation sur l’Exil Espagnol. Avec le temps, et la progressive intégration en France, difficile de maintenir une identité et de transmettre la mémoire des Espagnols exilés à Toulouse. Mais Placer Thibon espère que ce colloque et cette expo vont donner « un nouveau souffle » et « une prise de conscience« .
Pas de projet de musée à l’horizon
Placer Marey-Thibon rêve aussi d’un musée, mais pour l’instant aucune collectivité, Ville, Département ou Région, ne semble intéressée : « Toulouse se revendique ville capitale de l’exil républicain, mais je pense qu’il y a beaucoup de gens qui ne savent même pas ce que cela signifie« .
« On a l’impression d’être parfois ignoré et c’est un peu douloureux. Si on a fondé cette association en 2008, c’est pour essayer de perpétuer cette mémoire. On essaie de récupérer beaucoup de choses, mais c’est aussi très frustrant parce qu’on se dit la mémoire va être perdue, que nous sommes les derniers des Mohicans… »
Elle insiste aussi sur l’héritage : « La plupart des enfants de réfugiés ont compté dans la vie toulousaine, dans la vie culturelle, scientifique, etc. Alors c’est dommage de l’oublier. Nos parents ont eu un rôle. Nous, on continue à avoir un rôle. Peut-être que ces journées vont être un déclencheur« .
Notamment pour l’avenir du CTDEE : le centre doit être délogé de son local au faubourg Bonnefoy, rue des cheminots. Il est hébergé par la mairie, mais le quartier est en démolition et en transformation. Le CTDEE va devoir déménager, mais à ce jour, il n’a pas de point de chute.
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