FRAGMENTS DE MÉMOIRE 9

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Sont reproduits ici les textes qui ont été mis en voix par la Compagnie Cano López le 20 novembre 2015 au Plessis-Théâtres  à  La Riche (Indre-et-Loire).

Emilio

 

C’était une photo prise sur la sierra, à quelques encablures de Saragosse. Deux jeunes servants posant à l’ombre d’un canon.

Ces hommes appartenaient à la colonne Ortiz, une formation de miliciens anarchistes, qui marchait avec ceux de la colonne Durutti en direction de Belchite afin de tenter d’écraser les troupes franquistes qui s’étaient emparées de la région et qui en profitaient pour exécuter, par milliers, les militant-e-s ouvriers qui tombaient sous leur coupe.

Une soixantaine d’années après, j’ai rencontré un de ces deux là. Emilio, à peine sorti de l’adolescence, s’était rué, comme une grande partie du peuple d’Espagne dans la révolution naissante, ce bref été de l’anarchie, qui va bousculer l’ordre établi durant quelques mois et faire entrevoir la possibilité d’un monde nouveau, ouvert au possible, émancipé des totalitarismes et de l’oppression.

De ces quelques mois, qui l’ont marqué à vie, il en gardait la flamme qui pétillait dans ses yeux lorsqu’il me parlait de ces instants magiques, des ses combats contre les fascistes et les staliniens,  de la beauté de l’Espagne libertaire.

Et puis, il s’assombrissait soudainement, lorsqu’il invoquait l’exil, les camps de concentration de la France républicaine, la dureté du camp du Vernet, les compagnons qui  avaient  disparu morts de canonnades,  de maladies, de trahisons, d’exil et de désespoirs…

Et pourtant la geste libertaire qui l’avait fait basculer dans la grande histoire le tenait toujours debout, humble et joyeux d’avoir vécu tout cela et désirant toujours l’écrire à l’encre du possible.

 Eric Sionneau

Une réflexion sur « FRAGMENTS DE MÉMOIRE 9 »

  1. Ah Emilio et la fameuse colonne Durruti !!! Quel passionné de cette guerre, il en parlait avec ferveur ! Comme je fus contente de le côtoyer pendant plusieurs années, lui qui m’a permis de m’intéresser à celle-ci en me prêtant des livres auxquels il était très attaché ! Lui qui m’a permis de retrouver un peu de mon père disparu trop tôt, à l’âge de l’insouciance, merci à toi Emilio, sûrement frère de combat de mon père.

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