Sont reproduits ici les textes qui ont été mis en voix par la Compagnie Cano López le 20 novembre 2015 au Plessis-Théâtres à La Riche (Indre-et-Loire).
Les Olympiades oubliées – Barcelone, juillet 1936
17 juillet – En 1936 le tourisme n’est pas encore populaire mais sur les Ramblas de Barcelone les accents étrangers, surtout européens, se mélangent aux parlers catalans, andalous, madrilènes… On attend plusieurs milliers de sportifs et visiteurs à l’occasion des Olympiades Populaires qui vont se dérouler au stade Montjuich du 20 juillet au 26 juillet. Ces Olympiades sont organisées par le mouvement sportif catalan en opposition aux Jeux Olympiques de Berlin présidés par Hitler.
Dès l’arrivée d’Hitler au pouvoir un mouvement de boycott lancé par des sportifs américains avait contesté l’organisation par le régime nazi des Jeux Olympiques attribués en avril 1931 à l’Allemagne. Les protestataires s’appuyaient notamment sur le fait qu’aucun athlète juif ne serait sélectionné en Allemagne. Le mouvement de protestation s’était également développé dans d’autres pays, notamment en France, avec les organisations sportives FSGT (Fédération sportive et gymnique du travail), UFOLEP (Union française des organisations laïques d’éducation physique) et même des associations ou fédérations purement sportives. En mai 1936 l’invitation était venue d’Espagne d’organiser des Olympiades Populaires à la fois sportives et culturelles en signe de protestation pacifique à l’encontre des Jeux encadrés par les uniformes nazis.
L’entrée en rébellion de Franco au Maroc « espagnol » mettait la République en grand danger. Le général Goded était attendu, venant de Majorque, pour prendre la tête de la rébellion à Barcelone, un colonel assurait l’intérim. Mais l’armée était loin d’être gagnée à la cause monarcho-fasciste et des armes avaient été données aux travailleurs par des sous officiers ; certaines unités de Gardes d’Assaut et de Gardes Civiles, la majorité des forces de police, se mirent aux côtés des travailleurs armés dans les jours qui suivirent.
Les 18 et 19 juillet les combats sporadiques eurent lieu dans Barcelone. Les délégations sportives logées dans les hôtels de la place de Catalogne les entendirent et il y eut quelques blessés parmi eux. Mais aussi de nombreux morts des deux côtés des combattants. Le général Goded arrivé dans la mi-journée du 19 ne put rallier les unités de la Garde Civile, il fut fait prisonnier et lança un appel à la radio pour cesser le combat. Les travailleurs armés de la CNT, du Poum et du Parti socialiste unifié catalan avaient gagné la première épreuve à Barcelone. Il n’en était pas de même en d’autres lieux. Les barcelonais victorieux allaient devoir prêter main forte aux républicains des autres villes.
Le 20 juillet les Olympiades Populaires durent être annulées. Le 24 juillet la plupart des sportifs et accompagnateurs français furent rapatriés à Marseille dans deux paquebots. Jacques Gérald, responsable de la délégation girondine, raccompagna les sportifs aquitains dans leur région et repartit, en volontaire, au mois d’août, pour combattre au côté des républicains espagnols, il fut tué sur le front le 2 janvier 1937. Andrés Martin, ex secrétaire du Comité d’organisation des Olympiades Populaires, fut tué, en septembre, sur le front d’Estrémadure.
En 1937 des Olympiades Populaires eurent lieu à Anvers en souvenir des Olympiades Populaires de Barcelone. Les organisations sportives travaillistes internationales continuaient de rechercher les bases possibles de l’unité antifasciste. En Espagne la guerre continuait et s’aggravait avec l’intervention ouverte des forces armées hitlériennes et mussoliniennes.
Gilbert Déverines