Chanson écrite par les réfugiés du camp d’Argelès-sur-Mer, archives de M. Vincent Arbiol. Des variantes existent, v. notamment Serge Salaün, Les voix de l’exil. La poésie espagnole en France : 1938-1946, in Pierre Milza; Denis Peschanski (sous la direction de), Italiens et Espagnols en France, 1938-1946, Paris, IHTP, 1992, p.424 ; v. également Max Aub, Manuscrit corbeau, Narbonne, Mare Nostrum, 1998 (1ère édition 1955), pp. 93-95.
Nul doute que ces paroles, crues sous tous les aspects, aient été écrites par des hommes. Des hommes en souffrance et en désespérance..
La chanson :
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=YAfZK17IeCY]
CANCION DE LOS REFUGIADOS
Somos los tristes refugiados
a este campo llegados
después de mucho andar,
hemos cruzado la frontera
a pie y por carretera
con nuestro ajuar
Mantas, macutos y matelas
dos latas de conservas
y algo de humor,
es lo que hemos podido salvar
después tanto luchar
contra el fascio invasor.
Y en la playa de Argelès sur Mer,
nos fueron a meter
¡ pa no comer!
Y pensar que hace tres años
España entera
era una nación feliz,
libre y prospera;
abundaba la comida,
no digamos la bebida,
el tabaco y el “parné”.
Había muchas ilusiones
la paz en los corazones
y mujeres a granel…
Y hoy, que ni cagar podemos
sin que venga un “Mohamet”,
nos tratan como a penados
y nos gritan los soldados…
¡ Allez!… Allez!
Vientos, chabolas incompletas,
ladrones de maletas,
¡ arena y mal olor!
mierda, por todos los rincones,
sarna hasta los cojones,
¡ Fiebre y dolor!
Y alambradas para tropezar,
de noche al caminar
buscando tu “chalet”
y por todas partes donde vas,
te gritan por detrás…
¡ Allez!… ¡ Allez!…
Y si vas al “barrio chino”,
estas “copado”,
Te quedas sin un real…
¡ y cabreado!
Tres cigarros mil pesetas
y en el juego no te metas
porque la puedes “palmar”
y si tu vientre te apura
y a la playa vas, oscura,
te pueden asesinar…
En mal año hemos venido,
no sabemos ya que hacer,
cada día sale un “bulo”
y al final de dan por el c…
¡ Allez!… ¡ Allez!…
CHANSON DES REFUGIES
Nous sommes les tristes réfugiés Dans ce camp arrivés Après avoir beaucoup marché La frontière avons passé A pied et par la route Avec notre balluchon. Couvertures, sac à dos et matelas, Deux boites de conserve Et un peu d’humour, C’est tout ce que nous avons pu sauver Après tant de lutte Contre l’envahisseur fasciste. Et ils nous ont parqués sur la plage d’Argelès-sur-Mer Sans rien à bouffer! Et dire qu’il y a trois ans L’Espagne était un pays heureux, libre et prospère ; La nourriture était bonne, sans parler des boissons, du tabac et du pognon. Nous avions tant de rêves, La paix dans nos cœurs Et des femmes à gogo… Et maintenant, on ne peut même pas aller chier Sans qu’un « Mohamed » Ne nous traite comme des condamnés Et que des soldats nous crient Allez, allez !! Vent, cabanes délabrées, Voleurs de valises, Le sable et les odeurs insupportables ! De la merde partout, La gale jusqu’aux cou..., Fièvre et douleur ! Les barbelés qui s’accrochent La nuit quand tu cherches ton « pavillon », Et où que tu ailles On te crie par derrière Allez, allez !! Et si tu vas au "quartier chinois", T'es foutu Tu t'retrouves sans un sou T'es emmerdé ! Trois cigarettes mille pesetas, Ne te lance pas dans les jeux Parce que tu peux passer l'arme à gauche, Et si ton ventre a des besoins Ne t'aventure pas sur la plage obscure Car tu te fait trucider... Nous ne sommes pas venus au bon moment, On ne sait pas quoi faire, Chaque jour un ragot Et à la fin tu l'as dans le c... Allez, allez !!
Source :
La liberté d’expression dans les camps de concentration français : le cas des réfugiés espagnols en 1939. Dossier de recherche DEA de Valérie Lanier, sous la direction de M. Rafaël Encinas de Munagorri
Séminaire de Droit et Histoire, Droit de la personne et Protection de l’Humanité, Mention Sciences Politiques, Université de Bourgogne, 2000. Texte en pdf :