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Cipriano Mera, le maçon devenu général…
Le 5 mai 1937 mourait assassiné Camillo Berneri
Le 5 mai 1937 mourait assassiné Camillo Berneri, professeur de philosophie, anarchiste militant, grand théoricien de l’anarchisme qui exigeait une évolution constante de la pensée libertaire ainsi qu’un effort critique pour sortir de ce qui avait déjà été pensé.
Né à Lodi, en Italie, le 20 juillet 1897. Sa mère, Adalgisa Fochi était enseignante, féministe et socialiste. Camillo a commencé son militantisme politique à la Fédération socialiste de la jeunesse de Reggio Emilia, où il a mené une intense activité culturelle et bouleversante. Trois ans plus tard, il quitterait le Parti et s’engagerait à l’anarchisme.
Dans «Lettre ouverte aux jeunes socialistes d’un jeune anarchiste», il dénonçait la dégradation du parti socialiste italien. Depuis lors, ses efforts ont été dirigés vers l’antimilitarisme. Il a été appelé en rang et quand ils ont rencontré ses idées, il a été confiné sur l’île de Piavosa jusqu’en 1919.
Berneri a initialement défendu la révolution russe, même si ses critiques se sont très vite accrues compte tenu de l’autoritaire du processus révolutionnaire soviétique. En 1922, il a terminé ses études à la faculté de philosophie et de lettres et a exercé le poste de professeur de l’enseignement secondaire entre 1923 et 1926.
Au cours de ces années, il a développé une activité publique intense en concentrant ses efforts sur la réorganisation du mouvement anarchiste et la lutte contre le fascisme.
Fin 1926, le régime de Mussolini a contraint les enseignants à prêter serment d’adhésion au régime. Berneri a refusé, ce qu’il ne pouvait plus enseigner et a commencé un exil dont il ne reviendrait pas.
Durant les dix prochaines années d’exil, il vivrait un siège constant de la part de l’espionnage fasciste italien, ce qui n’a pas fait diminuer sa production intellectuelle de collaboration dans divers journaux. Son obsession constante a été de concrétiser les propositions anarchistes en vue d’une éventuelle révolution en Italie. Il a également publié au cours de ces années plusieurs ouvrages de dénonciation sur le fascisme et son caractère répressif contre toute opposition.
Fin juillet 1936, jours après le soulèvement fasciste, Berneri arriva à Barcelone. Il s’est tout de suite chargé de regrouper et d’organiser les volontaires venant combattre le fascisme dans une colonne italienne qui allait bientôt partir vers le front d’Aragon.
En raison de divers problèmes physiques, il a dû quitter le front en se consacrant à Barcelone à un travail culturel et propagande, diffusé diverses émissions radio destinées aux bénévoles italiens et travaillé à l’édition du journal «Guerra di classe».
Dans sa «Lettre ouverte à la compagne Federica Montseny», elle censure l’intervention anarchiste dans le gouvernement républicain et réaffirme son désir de voir la révolution marcher parallèle à la victoire contre Franco.
Il s’est également consacré à l’analyse de la documentation des archives du consulat italien à Barcelone. Ses dernières interventions publiques, début mai 37, visaient à défendre le POUM face aux accusations du PSUC de collaboration avec le fascisme. Quelques jours plus tard, il serait sorti de son appartement avec son colocataire Francesco Barbieri par une patrouille de l’UGT et de la police.
Son corps apparaîtrait le lendemain, criblé de balles. Une autre victime de l’infamie stalinienne, un autre révolutionnaire internationaliste venu lutter contre le fascisme en Espagne et, paradoxalement, a été tué par ceux qui se prétendaient le combattre aussi.
Il faut souligner à Berneri son humanisme déclaré, qui le rapproche de Kropotkin qu’il cite tant dans ses écrits.
Il détestait la polémique sans autre but que de dénigrer l’adversaire, ce qui prouvait sa taille intellectuelle. Leur obsession continue était de libérer la pensée non seulement de l’autorité des institutions mais aussi de tout dogme ou apparence dogmatique. Berneri a abordé de façon complète toutes les discussions sur les questions clés du mouvement libertaire.
Une partie des problèmes qu’il a soulevés (communalisme libertaire, fédéralisme, organisation des groupes, participation électorale, ouvrier-idolâtrie) ne sont plus novateurs, d’autres sont encore en vilo.
Il ne croyait pas l’anarchiste italien en la bête humaine, il pensait que même chez la plus effrayante des gens il y avait un peu de chaleur si on touchait les bonnes touches, il méprisait aussi le manichéisme des classes et pensait que dans tout cercle social il y avait des qualités remarquables et que la disparition de les cours serait donné par la fusion de celles-ci.
En fin de compte, il défendait l’humanisme comme l’une des caractéristiques intrinsèques de l’anarchisme qui le poussait à se préoccuper du développement individuel de chaque personnalité et de l’émancipation finale de l’humanité tout entière sans distinction de classe.
Source : José María Fernández Paniagua (et quelques phrases de Frank Mintz).
CNT-AIT Puerto Real
Édité par Anarquismos
LE « TRAIN FANTÔME » : L’HISTOIRE INCROYABLE D’UN GROUPE DE MILITAIRES RÉPUBLICAINS DÉPORTÉS À DACHAU.
Un groupe de chefs et d’officiers de l’armée qui étaient restés fidèles à la République, qui après la victoire du camp franquiste, ont dû fuir vers la France. Capturés en France par la Gestapo allemande, sept d’entre eux ont été emmenés au camp d’extermination de Dachau. Un seul, le plus jeune, a survécu et a pu le raconter.
En tirant le fil d’un bref journal et de quelques lettres des protagonistes, il a été possible de parcourir les derniers mois de l’enfer que ces huit hommes ont enduré.
Après avoir fui l’Espagne et séjourné en France quelques années, le 8 décembre 1943 ils ont été arrêtés par la Gestapo, la police politique allemande, à l’hôtel Alexandra de Vernet les Bains, petite ville du périnée français à quelques kilomètres de la frontière avec leur pays. Après l’invasion allemande de la France, sa vie en exil avait été très compliquée, notamment par la pression de l’Espagne sur le régime nazi pour qu’il persécute les républicains qui y sont réfugiés.
Il s’agissait du général Mariano Gámir, 66 ans, le chef de l’armée du Nord qui, après l’entrée des troupes de Franco à Santander, s’est enfui en sous-marin jusqu’à Gijón puis en avion pour Santander. Il est retourné en Espagne après la chute de la Catalogne, il est retourné en France. À côté de lui se trouvaient à Vernet les Bains d’autres vétérans officiels, la plupart de l’arme d’infanterie, avec des âges similaires à la retraite et avec une grande expérience militaire derrière leur dos : le colonel Jesús Velasco Echave, 65 ans; le colonel Carlos Redondo Flores, 64 ans; le colonel Cesar Blasco Sasera, 66 ans; lieutenant-colonel Fernando Salavera Camps, 60 ans; lieutenant-colonel José María García-Miranda Esteban-Infantes, 46 ans; commandant Joan Amer Vadell, 46 ans; et commandant Teodoro Marín Masdemont, 66.
Après leur capture en tant que membres de la résistance clandestine, selon la partie de détention, ils ont été transférés à la Citadelle de Perpignan, transformée en centre de détention de la Gestapo. Deux mois de difficultés et de mauvais traitements ont passé là-bas, jusqu’à ce qu’ils soient remis à la police française, qui les a internés dans le camp de concentration pour étrangers du Vernet d’Ariège, à 20 kilomètres de Toulouse, où la plupart des prisonniers étaient espagnols. Seul le général Gamir a échappé à ce destin après être tombé gravement malade la veille.
Après le débarquement de Normandie et la perte probable de la France, les Allemands ont décidé d’évacuer les prisonniers et de les emmener par trains de bétail vers les camps d’extermination nazis situés en Allemagne et en Pologne.
Environ 400 prisonniers sont sortis du camp du Vernet, dont les sept du Vernet (Gamir était le seul à avoir évité ce sort à cause de sa maladie), à destination de Toulouse, d’où le 2 juillet 1944 un train les conduirait au camp de concentration de Dachau, près de Munich, après avoir parcouru 905 kilomètres éternels sur un parcours qui a duré deux mois dans les pires conditions. De passage à Toulouse, puis 4 semaines à attendre Bordeaux et fusiller une dizaine de déportés, il est arrivé au camp d’extermination de Dachau le 28 août. Pendant le parcours entre bombardements, brutalités et conditions déplorables, près de 200 parviennent à fuir.
Sur les quelque 720 qui ont intégré le convoi du « train fantôme », la plupart des 420 étaient des Espagnols qui les ont transférés directement du camp de concentration du Vernet (Ariège) sans passer par l’ancienne prison de Toulouse. À Toulouse, les Allemands chargent 180 personnes supplémentaires (dont des dizaines d’autres Espagnols). Bien qu’il reste à clarifier plus précisément le numéro précis.
Ils sont arrivés à Dachau dans des conditions si mauvaises que les internes du terrain les ont impressionnés. Dans le livre « Le train fantôme » du journaliste italien et survivant Francesco Nitti. on peut lire: «J’admire leur grande morale, leur dignité et le courage avec lesquels ils affrontent toutes ces épreuves malgré leur âge et leur mauvaise santé», sur les colonels Redondo, Blasco et Velasco, avec lesquels ils ont coïncidé dans le train.
Le colonel Velasco, très malade à 65 ans, n’est pas entré à Dachau. Des années plus tard, on apprend qu’il a été transféré au camp de Bergen-Belsen, en Basse-Saxe, où il est mort en novembre 1944, seulement trois mois plus tard.
À partir de maintenant, ce que nous savons c’est grâce aux écrits conservés du lieutenant-colonel José María García-Miranda, qui était l’un des plus jeunes à 46 ans. «L’effondrement moral total de l’être humain. En choisissant de te sauver… pouvait provoquer la mort d’autres personnes», pensait García-Miranda, qui est même venu à jouer le cobaye dans un programme de recherche médicale (à Dachau, on a étudié le paludisme) autour d’un verre de lait.
Le 29 avril 1945, quelques jours seulement avant la reddition allemande, les troupes américaines de la 45e division d’infanterie libèrent le camp de Dachau. Il y avait alors 32 000 prisonniers sur les plus de 200 000 qu’il avait abrités.
Seul Garcia-Miranda avait survécu, même s’il pesait 39 kilos lorsqu’il a été libéré et il lui faudrait des semaines avant qu’il puisse se remettre. Grâce aux lettres qu’il a envoyées à sa femme Lucia, nous savons que « tous les autres camarades ; Velasco, Blasco, Marin, Salavera, Redondo et Amer sont morts du typhus et de faim. Vous allez annoncer la triste nouvelle à Mme Amer et à la famille de Redondo avec les précautions naturelles. Si vous connaissez l’adresse du général Gámir, écrivez-lui immédiatement pour qu’il parle à nos représentants afin qu’ils poursuivent les autorités françaises pour notre évacuation rapide, ou qu’ils envoient au moins des vivres et du tabac. Nous sommes 200 Espagnols. Militaires de course il ne reste plus que deux : un commandant et moi (… )» (Première lettre du 2 mai 1945).
Quelques jours plus tard, le 8 mai, il écrivait la deuxième missive, avec plus d’informations : « Velasco est tombé très malade peu de temps après son arrivée, il a été sorti du champ et nous n’avons plus de nouvelles de lui, il est très probable qu’il ait été gazé. Blasco est mort en décembre et Amer en février, tous les deux parce qu’ils avaient perdu le moral et le moral, ils se sont dégonflés et c’était leur perte; Salavera est mort en janvier consumé par la diarrhée, les poux et les mauvais traitements; Marin est mort en février du typhus et Redondo est mort dans la nuit du 8 au 9 mars de fièvre, de poux et surtout de faim; nous dormions ensemble et il est mort enlacés à moi, me parlant de ses enfants; toute la nuit depuis 11 heures je l’ai passée avec le pauvre cadavre et au petit matin, aidé par un autre Espagnol, nous avons pu le laver et le réparer un peu avant qu’ils ne le prennent. Je vis de miracle, mais je vis, et je préfère ne plus parler de choses aussi tragiques.»
Son incroyable vie a été romanée par son neveu-petit-fils Rafael Pañeda Reinleín dans « La chance de l’autre » (Mandala Editions 2005).
Garcia Miranda est retourné à sa Toledo natale et s’est consacré à l’enseignement. Décédé en février 1971.
Quant à Gámir, il est resté en France jusqu’en 1955, où il a écrit Guerre d’Espagne 1936-1939, avec le prologue du général Miaja. Cette année-là, il est retourné en Espagne parce qu’il n’avait pas déjà eu de condamn Il est mort en 1962 à Valparaiso de Abajo (Cuenca), où il est enterré.
Le catalogue de l’exposition est paru : Les Républicains espagnols premiers déportés de France & La FEDIP
Durant la Seconde Guerre mondiale, il y eut près de 10.000 Républicain(e)s espagnol(e)s déporté(e)s dans les camps nazis. Ils y subirent les traitements inhumains réservés aux déportés qui ne devaient pas sortir vivants de ces camps. Il y en eut dans tous les camps : Auschwitz, Dachau, Buchenwald, Neuengamme, Oranienburg, Stutthof, (Pologne) Natzwiller-Le Struthof (Alsace), Sachsenhausen, Ravensbrück, Mauthausen et tous leurs kommandos…
Nous avons choisi pour parler de leur déportation d’évoquer le camp de Ravensbrück car c’était la destination principale des femmes déportées dont les Espagnoles.
Et celui de Mauthausen pour les hommes espagnols. Ce camp est communément appelé camp des Espagnols puisque ce sont eux qui l’on construit dans sa forme définitive. Dans nul autre camp qu’à Mauthausen, les Espagnols n’ont pu se constituer en groupe. Ils y sont trop disséminés parmi les autres nationalités. Souvent arrêtés en tant que résistants français, ils portent le triangle rouge des politiques et la lettre « F » de Français, tandis que d’août 1940 à avril 1941 les Espagnols déportés sont massivement envoyés à Mauthausen. Ils y portent le triangle bleu des apatrides et la lettre « S », pour Spanien. Ils y sont plus de 7200, seul 1/3 en sort en mai 1945.
Ils y constituent une véritable organisation clandestine de résistance, ils forcent l’admiration des autres groupes nationaux par leur cohésion et leur sens de la solidarité.
Edmond Michelet[1] dit à leur propos :
« Les déportés peuvent différer de point de vue dans le jugement qu’ils portent sur les groupes nationaux étrangers. Mais tous sont d’accord pour dire que les Espagnols réussirent le tour de force de faire l’unanimité dans la sympathie et l’admiration. »
Le bon de commande : https://www.24-aout-1944.org/newsletter/BDC-Repu-Ep-deportes.pdf
[1] Edmond Michelet (1889-1970), un des créateurs de « Combats » en 1941, chef régional des Mouvements unis de la résistance (MUR) en 1942, arrêté par la Gestapo en février 1943, est déporté à Dachau. Il sera compagnon de la libération, et successivement ministre des Anciens combattants et Victimes de guerre (1958), puis ministre de la Justice (1959-1961). Membre du Conseil constitutionnel, il succède à André Malraux en 1969 sous la présidence de Pompidou, comme ministre des Affaires culturelles.
Hommage aux déportés espagnols à Mauthausen.
Gardiens de l’héritage, transmettre la mémoire des républicains espagnols en Bretagne.
Dans ce long format, nous retraçons l’histoire méconnue de l’exil espagnol en France, et plus particulièrement en Bretagne, à la suite du coup d’État militaire du général Franco en 1936. Ce soulèvement marque le début de la guerre civile espagnole, opposant les forces nationalistes aux républicains, souvent appelés les « Espagnols rouges ».
Après la victoire de Franco en 1939 et l’instauration de sa dictature, des centaines de milliers de réfugiés espagnols fuient vers la France. Des milliers d’entre eux trouvent refuge en Bretagne, dans un exode dramatique et massif.
Mais l’espoir laisse rapidement place à la précarité : internements, travaux forcés… À la veille de la Seconde Guerre mondiale, les réfugiés espagnols sont tour à tour perçus comme une charge, puis exploités comme une main-d’œuvre essentielle à l’effort de guerre, notamment pour la construction des fortifications allemandes et de la base sous-marine de Brest.
🎥 À travers des témoignages de leurs enfants, des images d’archives et une analyse historique, ce long format met en lumière le rôle oublié des Espagnols exilés dans l’histoire de la Bretagne et de la France en guerre.
📺 Ce long format a été réalisé par des étudiants en troisième année de journalisme à l’IUT de Lannion dans le cadre de leur formation. Il a été diffusé sur les chaînes locales Tébéo, Tébésud et TV Rennes.




