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Hispaniste, libertaire et camusien.

Auch : Exposition historique : «Ces affiches étaient autant de cris des Républicains espagnols»

Pendant un mois au moins, le centre culturel espagnol expose «une iconographie» de la guerre d’Espagne. Avec notamment beaucoup d’affiches murales

Pendant la révolution espagnole, de 1936 à 1939, plus de 2000 affiches ont été conçues. Et toutes imprimées en grand nombre de 3 000 à 10 000 exemplaireschacune, ajoutent Rafaël Ramirez, Jean-Louis Moreau -Muñoz et Maryse Danos qui avec beaucoup d’autres «socios» du centre culturel espagnol, ont contribué à la réalisation de cette exposition consacrée à l’iconographie de cette période qui ne put empêcher l’avènement du Franquisme. Et avec lui, -«car sous Franco, la République a été cachée, interdite, tue» rappelle Rafaël Ramirez qui préside le centre culturel-, la production d’affiches a cessé. Il faudra attendre la mort de Franco en 1975 pour que réapparaissent les affiches d’époque et que renaisse une culture de l’affiche sociale en Espagne. «Ces affiches étaient des cris collés sur les murs dénonçant les crimes fascistes, valorisant l’œuvre sociale et culturelle du peuple espagnol pour la liberté et l’égalité». Le centre culturel espagnol en expose 7 collées à ses murs sans compter toutes celles, environ 250, scannées et projetées sur grand écran. Mais l’iconographie de cette période, c’est aussi le «Guernica» et des dessins de Picasso dont des répliques sont exposées, un calendrier républicain, le carnet de 32 aquarelles de Sim qui était le pseudo de Rey Vila, la collection en 5 volumes des livres de Georges Soria, correspondant de guerre en Espagne pour le journal «Combat», des dessins d’André Masson, des photos, des timbres, des cartes postales également… «Autant de modes d’iconographies pour participer à la lutte, pour défendre et promouvoir la République». Parmi ses affiches, l’espadrille qui écrase une croix gammée ou encore celle qui clame que défendre Madrid c’est défendre… la Catalogne.

Une chronologie de la guerre, divers autres documents et objets (dont la chemise phalangiste d’une gamine) ajoutent à la qualité de cette exposition qui se visite sur fond sonore. Avec «Ay, Carmela !» entre autres chants révolutionnaires.


170 familles adhérentes..

L’exposition consacrée à l’iconographie de la guerre d’Espagne, ouverte à tous, sera visible le vendredi et le samedi durant un mois. De nombreux scolaires vont la visiter aussi. Le centre culturel espagnol qui compte 170 familles adhérentes, organise de nombreuses animations, conférences, expositions, ateliers, durant toute l’année. Tout un chacun peut y adhérer sans conditions particulières même s’il est préférable d’être sensible à la culture et à l’art de vivre espagnol. Art de vivre qui s’exprime notamment chaque vendredi soir, autour du bar, en toute convivialité.
Source :

http://www.ladepeche.fr/article/2017/01/16/2497037-ces-affiches-etaient-autant-de-cris-des-republicains-espagnols.html#q5P7FpDvWJJj1jvh.99

Collioure : Journée d’hommage à Antonio Machado le 19 février 2017

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Le grand poète Antonio Machado nous quittait – quittait à jamais sa terre natale  – le 22 février 1939 .  Mort symbolisant celle de la République. Mais notre République est un Phénix, l’histoire le prouvera.

« Adiós madre » furent ses dernières paroles.

Dans sa chambre de l’hôtel Bougnol-Quintana.

Y cuando llegue el día del último viaje,
y esté al partir la nave que nunca ha de tornar,
me encontraréis a bordo ligero de equipaje,
casi desnudo, como los hijos de la mar.

 

 

Source : http://ffreee-retirada.blogspot.fr/2017/01/hommage-antonio-machado.html

 

Crédit photo :

http://De href= »//commons.wikimedia.org/wiki/User:Quinok » title= »User:Quinok »>Quinok – Trabajo propio, CC BY-SA 4.0, Enlace

Journée commémorative le 5 février 2017 en Occitanie.

FFREEE  –  Fils et Filles de Républicains Espagnols et Enfants de l’Exode organise une journée commémorative

Le 5 février va désormais s’inscrire dans l’histoire puisque enfin en Catalogne, le 5 février devient la journée nationale de l’exil et de la déportation. Les personnes qui seraient intéressées pour participer aux manifestations à la Jonquera, la Vajol, Argelès doivent nous contacter par mail ou téléphone pour réserver une place dans le bus qui partira d’Argelès sur Mer le matin et nous ramènera l’après midi pour apposer une plaque au monolithe de la plage.

(pour vous inscrire au voyage 04.68.95.85.03 ou ffreee.retirada@gmail.com)

Source : http://ffreee-retirada.blogspot.fr/2017/01/5-fevrier-2017.html

Journée d’études « Les mots de l’exil dans l’Europe du XIXe siècle » 19 janvier 2017, Musée national de l’histoire de l’immigration

 

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Cette journée d’études a pour but d’analyser le vocabulaire européen de l’exil au XIXe siècle, s’appuyant sur l’hypothèse selon laquelle les statuts des exilés et réfugiés ne sauraient être compris sans une prise en compte des termes par lesquels ils étaient alors désignés. La rencontre se propose également de comparer les pratiques administratives et judiciaires mises en œuvre par les États d’accueil à leur égard, en s’intéressant à la circulation des modes de désignation, de surveillance et de contention de ces étrangers. Une session éclairera enfin les représentations contrastées des exilés et réfugiés dans l’Europe du XIXe siècle, saisies à travers débats parlementaires, littérature et chansons.

Journée d’études “Les mots de l’exil dans l’Europe du XIXe siècle” 19 janvier 2017, Musée national de l’histoire de l’immigration

UN HÉROE DESCONOCIDO: FRANCISCO PONZÁN, « EL MAESTRO DE HUESCA »

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Francisco Ponzán Vidal, conocido como « el maestro de Huesca » (también « François Vidal », « Paco », « Gurriato » y  » El gafas »), fue el más legendario de los resistentes españoles que, durante la Segunda Guerra Mundial, organizaron desde Francia redes de evasión a España a través de los Pirineos. Estas redes, a las que dediqué mi artículo anterior en estas páginas, permitieron a miles de personas escapar del horror nazi y evitar así la deportación y la muerte.

Aunque Ponzán nació en Oviedo en 1911, se crió en Huesca, de donde su madre era originaria. Estudió magisterio en la capital oscense y ejerció como maestro en Castejón de Monegros y otros pueblos de la provincia. Militante anarquista desde muy joven, tuvo a Ramón Acín (fusilado en 1936) como profesor de dibujo, y junto a él se inició en el activismo político que le ocasionó varias detenciones en los años anteriores a la Guerra Civil. Durante la contienda, perteneció al Servicio de Inteligencia Militar y fue responsable de Transportes y Comunicaciones en el Consejo de Aragón. Luchó en la 127 Brigada (« Roja y Negra »), luego 28 División, principalmente en el frente de Zuera. Mariano Constante, que tiene para Ponzán un emocionado recuerdo en uno de sus libros, rememora cómo éste, pese a las pocas simpatías que anarquistas y comunistas se profesaban, ayudó a sacar de la prisión de La Seo de Urgel a un comisario comunista injustamente encarcelado. Una de las características que se destaca del « maestro de Huesca » es su saber estar por encima de los sectarismos imperantes en la época. Al parecer, la decisión de poner su red al servicio de los aliados no fue muy bien aceptada por algunos de sus correligionarios anarquistas.

En los libros « La red de evasión del grupo Ponzán: anarquistas en la guerra secreta contra el franquismo y el nazismo, (1936 – 1944) » y « Francisco Ponzán Vidal y la red de evasión Pat O’Leary (1940-1944) » (Ediciones Virus, 1996 y 1998), Antonio Téllez Solá trata sobre la actividad de nuestro personaje. También Sixto Agudo hizo una breve semblanza biográfica de Ponzán en el congreso « La España exiliada de 1939 », celebrado en Huesca en 1999 y cuyas actas han sido editadas por el Instituto de Estudios Altoaragoneses y la Institución Fernando el Católico.

Pilar Ponzán, hermana de Francisco, era maestra en Jaca cuando se produjo el alzamiento militar de 1936. Fue detenida y encarcelada junto a la madre de Mariano Constante en el fuerte Rapitán de la capital jacetana. Logró salir de la prisión en un canje de prisioneros gracias a la intervención de su cuñado, militar participante en la sublevación contra la República. Tras la Guerra Civil, pasó a Francia donde conoció la decepción y la incomodidad de los campos de internamiento para los exiliados españoles. Durante la Segunda Guerra Mundial, luchó activamente contra los alemanes, colaboró con su hermano en la organización de las cadenas de evasión y recibió tras la contienda la Cruz de Guerra como reconocimiento a su labor. Plasmó por escrito sus experiencias en el libro « Lucha y muerte por la libertad (1936-1945) », editado en Barcelona en 1998.

Francisco pasó también a Francia después de la derrota republicana de 1939 y fue internado en el campo de Vernet d’Ariège. Pudo salir de allí gracias al contrato de trabajo que le ofreció el dueño de un garaje. Poco después del inicio de la Segunda Guerra Mundial, entró en contacto con los servicios de inteligencia británicos y empezó a organizar, desde Toulouse y junto a su hermana Pilar, la más importante de las redes que facilitaban el paso de evadidos de Francia a España. Se trataba de una amplia tela de araña que comenzaba en Bruselas y terminaba en Lisboa, tenía como centro Toulouse y se ramificaba hacia los Pirineos franceses y Andorra y, en la costa mediterránea, llegaba hasta Banyuls, muy cerca ya de la frontera española. Ponzán contó con la colaboración de sus contactos anarquistas españoles y sus hombres guiaban a los evadidos hasta los consulados del Reino Unido, Bélgica o Estados Unidos en Barcelona y Madrid, desde donde se les facilitaba el viaje hasta Lisboa o Gibraltar y la salida de la península hacia sus nuevos destinos. Entre 1941 y 1943, esta red salvó a numerosos franceses, ingleses, polacos, belgas y judíos. Según Ferran Sánchez Agustí  -de cuyo libro « Espías, contrabando, maquis y evasión. La II Guerra Mundial en los Pirineos » (Milenio, Lérida, 2003) extraigo bastantes datos de este artículo-, fueron unos 2000 los aliados evadidos, de los cuales unos 200 eran aviadores británicos de la RAF. Una de las anillas de evasión vinculadas a la red de Ponzán era la del médico y general belga Albert Guérisse (« Pat O’Leary » y « Josep Catier »), que sobrevivió a los campos de exterminio de Dachau y Mauthausen. Entre los personajes salvados por la red puede destacarse al príncipe Werner de Merode, nacido en Bélgica y piloto de la RAF durante la guerra. Fue derribado en 1941 en Boulogne-sur-Mer y se le sacó de Francia por Banyuls, desde donde pudo llegar al consulado belga de Barcelona y volver a cruzar la frontera en 1943.

Fueron muchos los colaboradores de Ponzán en su cadena de evasión, y bastantes de ellos eran altoaragoneses. Es el caso de Prudencio Iguacel Piedrafita, nacido en Botaya (Jaca) en 1913 y muerto en Burdeos en 1979, que había coincidido con Ponzán en la Guerra Civil y en el campo de internamiento francés de Vernet. También Antonio Saura y Carmen Mur, de Calasanz; y los hermanos Rafael, Eusebio (« Coteno ») y Pascual (« Sixto ») López Laguarta, naturales de Fontanelles, cerca de Ayerbe. El castellonés Josep Albalat Ripollés, carpintero de oficio, pasó con Ponzán a España en mayo de 1940 con la intención de liberar a presos anarquistas en Zaragoza. Ponzán resultó herido y tuvieron que refugiarse en Boltaña. Ambos compartieron prisión en Vernet en 1942; Albalat es un caso excepcional pues consiguió sobrevivir al paso por cinco campos de exterminio. Floreal Barberà trabajó en la red y en una ocasión ayudó a cruzar a España por Viella y Esterri d’Àneu a un grupo excepcionalmente numeroso de 62 judíos. Entre los expedicionarios hubo dos bajas: un anciano que murió de agotamiento y un joven que se despeñó. Barberà fue detenido en España durante una misión y tras una breve estancia en la cárcel logró salir en libertad. Junto a otros miembros de la Asociación General Francesa de Antiguos Combatientes y Resistentes Españoles reivindicó la figura de Ponzán, en cuya memoria se colocó en Montjuïc una placa en el monumento a los voluntarios españoles muertos en la guerra europea. No tenemos espacio aquí para nombrar a otros muchos compatriotas que colaboraron con « el maestro de Huesca », gran número de los cuales sufrió deportación a los campos de exterminio nazis.

Mención aparte merece Josep Ester Borrás, natural de Berga, íntimo colaborador de Ponzán. Su mujer, Alfonsina Bueno Vila, era natural de Moros, en la provincia de Zaragoza. Ester fue enviado a Mauthausen de donde salió con vida. Fue condecorado por los gobiernos británico, francés y estadounidense, y entre 1947 y 1965 fue secretario general de la Federación Española de Deportados e Internados Políticos Víctimas del Fascismo. Murió en Francia en 1980. Su mujer, Alfonsina, también sobrevivió al campo de mujeres de Ravensbrük, aunque, a causa de un experimento que los fanáticos médicos nazis le practicaron durante su internamiento, contrajo una enfermedad crónica y perdió la salud hasta su muerte en 1979. Su padre, Miguel Bueno Gil, murió en Mauthausen como consecuencia de esos terroríficos experimentos.

La red dirigida por Ponzán, financiada por los aliados, además de ayudarlos a salir de Francia, facilitaba a los evadidos una impecable documentación falsa. En su casa de Toulouse había abundante material para realizar falsificaciones: matrices metálicas, sellos de administraciones, pasaportes, certificados de casamiento británicos, documentos oficiales, etc. Hay que destacar la enorme inteligencia y capacidad que demostró Ponzán en los años que estuvo al frente de esa extensa organización clandestina. Destacable es también su tolerancia política y su visión global del conflicto que vivía Europa. Sánchez Agustí recoge en su libro unas palabras, pronunciadas por « el maestro de Huesca » en una reunión celebrada en septiembre de 1940 en su domicilio de la calle Montplisir de Toulouse, que reproduzco: « No es hora de lamentarse de nada, señores, sino el momento de las decisiones. No es la patria francesa la que está en juego; es la libertad, la cultura, la paz…No somos nosotros quienes estamos en peligro; es el mundo. Y no olviden que cuando se fusila a un hombre existe la posibilidad de que un día se fusile a toda la humanidad ». Como muchos otros españoles que lucharon en Francia, estaba convencido de que ayudando a los aliados éstos precipitarían después la caída del régimen de Franco.

Ponzán fue arrestado en 1942 e internado de nuevo en el campo de Vernet, del que logró escapar con varios miembros de su red. Se instaló en el hotel París de Toulouse, centro de actividades de la Resistencia, que le proporcionó medios para continuar con su labor de ayuda a los evadidos. Detenido nuevamente en abril de 1943, fue encerrado en la prisión de Saint-Michel y condenado a seis meses de reclusión por indocumentado. Localizado por la Gestapo, fue sometido a nuevos interrogatorios y a un nuevo juicio que le condenó a nueve meses de cárcel. Cumplidos éstos, los nazis se negaron a ponerlo en libertad. Cuando Toulouse estaba a punto de ser liberada, Ponzán fue sacado de la prisión de Saint-Michel junto a otros 52 detenidos. Todos ellos fueron ejecutados en el bosque de Buzet sur Tarn, a 27 km de la ciudad. Los cuerpos de los prisioneros fueron arrojados a tres enormes hogueras, sin que se haya podido saber si fueron lanzados a ellas aún con vida o habían sido previamente fusilados. Sus cenizas fueron depositadas en tres féretros en un mausoleo de Buzet donde en una placa puede leerse: « A nuestro hermano Francisco Pozán Vidal, exiliado político español, Gran Resistente muerto por Francia el 17-8-1944 a la edad de 33 años ».

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Francisco Ponzán recibió a título póstumo las más altas consideraciones por parte de los gobiernos aliados. La distinción de Su Majestad británica por « su valiente conducta y el servicio prestado » con el emblema de la Hoja de Laurel de la Corona y la « Medalla por la libertad » del Reino Unido, el grado de capitán de las Fuerzas Francesas, la Medalla de la Resistencia, la Cruz de Guerra y el « reconocimiento y la admiración de las naciones aliadas ». Además del Certificado de Gratitud firmado por el presidente de Estados Unidos Dwight D. Eisenhower, que también recibió su hermana Pilar. Contó siempre con el respeto y la admiración de sus colaboradores y de todas las fuerzas aliadas, y su labor permitió salvar muchas vidas, aunque en ese empeño sacrificara la suya. Su contribución, junto a la de muchos otros españoles, fue decisiva en la victoria sobre el fascismo que amenazaba al mundo. Es de justicia que en la provincia en la que pasó buena parte de sus primeros años y de la que era originario también recordemos su abnegación y su humanitarismo ejemplares.

Carlos Bravo Suárez
(Artículo publicado en Diario del Alto Aragón, el 27 de noviembre de 2005)

Fuente :

http://carlosbravosuarez.blogspot.fr/2008/02/un-hroe-desconocido-francisco-ponzn-el_28.html

Téllez Solá, Antonio, Le réseau d’évasion du groupe Ponzan – Anarchistes dans la guerre secrète contre le franquisme et le nazisme, Toulouse, Ed. du Coquelicot, 2008, 405 p.

LA DISOLUCIÓN DE LAS CORTES EN ENERO DE 1936

El 7 de enero de 1936 el presidente de la República, Niceto Alcalá-Zamora, disolvió las Cortes y convocó elecciones generales para el 16 de febrero. ¿Por qué? Intentemos dar algunas claves sobre esta trascendental disolución en la Historia de la Segunda República.

 

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Primer Consejo de Ministros presidido por Chapaprieta, 25 de septiembre de 1935.

En septiembre de 1935 se formaba un nuevo gobierno presidido por el independiente Joaquín Chapaprieta Torregrosa. Alcalá-Zamora destituía a Alejandro Lerroux, que había llegado a presidir seis gobiernos, aprovechando una crisis. Ante el temor de una disolución de las Cortes, el que hasta entonces había sido ministro de Hacienda aceptó el complicado encargo. Chapaprieta era consciente de la necesidad de contar con un respaldo claro en el parlamento de las fuerzas del centro y de la derecha, algo harto complicado dadas las distintas posturas de las dos fuerzas fundamentales, el Partido Radical y la CEDA. Recordemos que, según la Constitución de 1931, el presidente del Consejo de Ministros necesitaba la doble confianza, la del presidente de la República, y la de las Cortes. Por eso, continuó la línea de los gobiernos radical-cedistas anteriores. Designó a Lerroux para Estado (Asuntos Exteriores), y nombró tres ministros de la CEDA. Gil Robles era encargado de la cartera de la Guerra, Luis Lucía fue nombrado ministro de Obras Públicas, y Federico Salmón pasaría a Trabajo, Sanidad y Justicia. Por su parte, Chapaprieta mantuvo la cartera de Hacienda.

El primer gobierno de Chapaprieta duró hasta finales de octubre. El escándalo del Estraperlo provocó que Lerroux saliera del gobierno. El posterior caso de corrupción, el denominado Asunto Nombela, hundió para siempre al radicalismo español. Alcalá-Zamora volvió a encargar a Chapaprieta formar un nuevo ejecutivo. Pero su segundo gobierno cayó el 14 de diciembre. Gil Robles estaba presionando dentro de su estrategia para hacerse con el poder. Sin el apoyo de la CEDA, y con un radicalismo desprestigiado, el ejecutivo no podía continuar. La excusa presentada por la derecha para retirar el apoyo a Chapaprieta fue el asunto de la reforma fiscal. Gil Robles quería la presidencia del gobierno, pero Alcalá-Zamora, a pesar de su evidente conservadurismo, recelaba intensamente de la CEDA porque consideraba que no era una formación política completamente leal a la República, que sólo había aceptado el juego político desde un calculado accidentalismo. Pero el presidente de la República tampoco quería ir a elecciones, y decidió encargar la responsabilidad de formar gobierno a Manuel Portela Valladares, otro político independiente y que gozaba de la confianza y aprecio de Alcalá-Zamora. Esto ocurría el 15 diciembre. Pero era una solución muerta de antemano porque la CEDA no iba apoyar al nuevo ejecutivo, por lo que faltaba la confianza parlamentaria imprescindible. Alcalá-Zamora se vio obligado a disolver las Cortes. La Constitución permitía hacerlo al jefe del Estado, aunque solamente dos veces en su mandato. En el segundo caso, las nuevas Cortes debían examinar si la segunda disolución había sido adecuada. Esta obligación fue aprovechada por la izquierda para destituir en la primavera de 1936 a Alcalá-Zamora gracias a su mayoría parlamentaria. Recordemos que, efectivamente, esta era la segunda disolución, ya que hubo una anterior que permitió la celebración de las elecciones de noviembre de 1933.

Mientras se desarrollaba esta crisis política en el seno del centro y la derecha españolas en el ejecutivo y las Cortes, la izquierda comprendió, aunque desde distintas interpretaciones, que debía tender a la unión si quería volver al poder, en un clima nacional e internacional cada día más radicalizado. En ese tiempo se fue gestando, no sin grandes dificultades, el Frente Popular.

Eduardo Montagut

Fuente :

http://www.nuevatribuna.es/articulo/historia/disolucion-cortes-enero-1936/20170107125611135422.html

 

A Luna-Park, Blum tente de justifier aux militants sa politique de non intervention en Espagne

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Ce discours prononcé par Léon Blum le 6 septembre 1936 à la fête commémorative de la République organisée par la fédération de la Seine au stade de Luna Park (sur l’emplacement actuel de la Porte Maillot – Paris 17è) a été publié dans Le Populaire le lendemain. Il a, quelques semaines plus tard, été diffusé sous forme de brochure sous le titre Les événements d’Espagne (Imprimerie du commerce et des postes, Paris, 1936, 19 p, au prix de 0,30 F). Comme il le dit d’entrée, Léon Blum s’est invité à cette manifestation pour répondre aux interrogations de ses camarades sur sa politique. Son intervention garde encore une grande puissance d’émotion. 

Blum intervient en tribun, discours emphatique propre aux politiciens de la IIIè République.  Le discours dure environ 50 minutes. Une source « première » pour comprendre le dilemme de Blum.

Un extrait audio (12′) :

http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu02043/a-luna-park-blum-tente-de-justifier-aux-militants-sa-politique-de-non-intervention-en-espagne.html

Transcription fidèle et intégrale de cette brochure de 19 pages.


Léon Blum et les événements d’Espagne
Luna Park, le 6 septembre 1936
Publié dans Recherche socialiste 6 septembre 2006 p. 75-83 (d’après la brochure Les événements d’Espagne, 1936).

Je n’étais pas inscrit au programme de cette fête. C’est moi qui, hier soir, à la fin d’une assez dure journée et après m’être entretenu avec nos camarades délégués des usines métallurgiques de la région parisienne, ai pris le parti soudain de demander à la fédération socialiste de la Seine de m’accorder aujourd’hui son hospitalité. Je m’étais entretenu avec nos camarades des usines. J’éprouvais le besoin de m’entretenir ensuite avec mes camarades et mes amis de la fédération.

Je n’ai pas besoin de vous dire longuement maintenant pourquoi. Je ne ferme pas les yeux, croyez-le bien, à la réalité. Je ne voulais pas laisser s’installer un malentendu cruel entre le gouvernement de Front populaire que je préside, et une partie tout au moins des masses ouvrières sans m’expliquer, parce que je ne veux à aucun prix le laisser subsister. 

 

CHEF DE GOUVERNEMENT ET MILITANT

On se demandera peut-être si je parle en qualité de chef du gouvernement ou en qualité de militant socialiste. Qu’on se pose ailleurs la question, si l’on veut, mais pas ici. Du reste, je vous avoue que je n’arrive pas à distinguer très bien en ce qui me concerne entre les deux qualités.

En tant que chef du gouvernement, je ne pourrai pas bien entendu vous dire ici plus que je pourrai dire ailleurs. Comme militant, il n’y a pas une seule de mes pensées que j’entende aujourd’hui dissimuler. 

Tout d’abord, je vais vous poser une question que chacun de vous pourrait se poser à lui-même. Est-ce qu’il y a ici un seul homme, en accord ou en désaccord avec moi sur la question que je vais traiter, qui croit que j’ai changé depuis trois mois ?

 

« JE N’AI PAS CHANGE »

Trois mois d’exercice du pouvoir auraient-ils fait de moi un homme autre que celui que vous connaissez depuis tant d’années ? Car, il y a trois mois aujourd’hui même que nous nous sommes présentés devant les Chambres.

Et je vous assure que ces trois mois me paraissent à moi, en ce moment, aussi longs que je ne sais combien d’années, non pas peut-être seulement par l’œuvre accomplie, mais parce que cette suite de jours sans répit et de nuits sans sommeil font trouver la course du temps étrangement lente. 

Vous savez bien que je n’ai pas changé et que je suis toujours le même. Est-ce que vous croyez qu’ici il y a un seul de vos sentiments que je n’éprouve pas et que je ne comprenne pas?

Vous avez entendu l’autre soir, au Vélodrome d’hiver, les délégués du Front populaire espagnol ; je les avais vus le matin même. Croyez-vous que je les aie entendus avec moins d’émotion que vous ? (Applaudissements)

 

« QUAND JE LISAIS LES DÉPÊCHES… »

Quand je lisais comme vous dans les dépêches le récit de la prise d’Irun et de l’agonie des derniers miliciens, croyez-vous par hasard que mon cœur n’était pas avec eux ? Et est-ce que vous croyez, d’autre part, que j’ai été subitement destitué de toute intelligence, de toute faculté de réflexion et de prévision, de tout don de peser dans leurs rapports et dans leurs conséquences les événements auxquels j’assiste ?

Vous ne croyez rien de tout cela, n’est-ce pas ?

Alors? 
Si j’ai agi comme j’ai agi, si j’agis encore comme j’estime qu’il est nécessaire d’agir, alors il faut qu’il y ait des raisons à cela, il faut bien qu’il y ait tout de même à cette conduite des motifs peut-être valables. Je les crois en tout cas intelligibles. 

 

« JE NE VOUS DEMANDE PAS UNE CONFIANCE AVEUGLE »

Je ne vous demande pas une confiance aveugle, une confiance personnelle. Mais cette confiance, du fait de ma constance avec moi-même, du fait de ma conscience de militant et de cette faculté, après tout, de jeter sur les événements un regard empreint de quelque clairvoyance raisonnable, cette double confiance, je crois que vous pouvez tout de même l’avoir pour moi.

Alors, ces motifs ? Dans toute la mesure où cela est possible, je veux essayer de vous les faire comprendre maintenant, vous parlant face à face, moi chef du gouvernement, et vous militants du Front populaire. (Applaudissements)

Vous pensez bien qu’aucun des arguments qui vous sont familiers ne m’échappe.

 

L’INTERET NATIONAL DE LA FRANCE

Je sais très bien, en cette affreuse aventure, quels souhaits doivent nous imposer l’intérêt national, l’intérêt de notre pays, en dehors de toute espèce d’affinité ou de passion politique. Je suis obligé ici de mesurer mes mots, et vous le comprendrez.

Je sais que le maintien du gouvernement légal de la République espagnole garantirait à la France, en cas de complications européennes, la sûreté de sa frontière pyrénéenne, la sûreté de ses communications avec l’Afrique du Nord et, sans que je me permette aucune prévision sur un avenir que nul ne connaît exactement, je peux pour le moins dire que du côté du gouvernement militaire, il nous est impossible de prévoir avec certitude quelles seraient ou les obligations ou les ambitions de ses chefs. 

Je dis que d’un côté, il y a pour nous une sécurité et, de l’autre, qu’il subsiste pour le moins un risque.

 

L’INTERET IMMEDIAT DE LA FRANCE

Quiconque se place au point de vue de l’intérêt immédiat du pays doit sentir cela et je le sens comme chacun de vous. Et, si quelque chose aujourd’hui doit être aux yeux de tous un affreux scandale, c’est que cet intérêt évident de la France ait été à tel point méconnu par une presse partiale jusqu’au crime et jusqu’à la trahison (applaudissements), faisant passer par-dessus tout certain esprit personnel de représailles ou certain égoïsme collectif de classe. Je ne veux pas chercher les mobiles qui, d’ailleurs, diffèrent selon les individus. Je ne sais pas comment, dans d’autres pays, cette campagne aurait été accueillie, ni jusqu’à quel endroit précis elle aurait pu conduire leurs auteurs ?

Dès la rentrée des Chambres, nous tâcherons de trouver le moyen de mettre fin à cela. (Applaudissements)

Mais, sur le fond des choses, je le répète, je n’ai pas plus de doute que vous. 

 

LE DROIT PUBLIC

La question du droit public n’est pas plus douteuse que la question de l’intérêt direct et national de la France.

Comme nous l’avons dit nous-mêmes dans un document public, le gouvernement constitué par le président de la République Azaña, conformément aux directions tracées par le suffrage universel consulté, est le gouvernement régulier d’une nation amie.

Quand il s’agit de ces mots : gouvernement légal, gouvernement régulier, j’aime mieux y ajouter, quant à moi, les mots ou la formule de « gouvernement issu du suffrage universel et correspondant à la volonté et à la souveraineté populaires ». 

Car, camarades, je ne veux chercher que dans notre propre Histoire. Notre Histoire de France nous enseigne que certains gouvernements, en dépit de la légalité formelle, ont pu ne pas représenter exactement la volonté et la souveraineté populaires et que peut-être cette volonté et cette souveraineté résidaient plus exactement dans les mouvements qui les ont renversés.

 

PAS DE DOUTE LA-DESSUS

Je peux aussi vous signaler qu’en Espagne le gouvernement légal est en face d’une rébellion militaire. Mais je m’adresse ici à votre imagination, pas à autre chose qu’à votre imagination. Vous pourriez, à la rigueur, concevoir des cas où, contre tel gouvernement, qui n’existe pas, mais qui pourrait exister, comme tel gouvernement disposant de la légalité formelle, un mouvement militaire pourrait recueillir et attirer et justifier vos sympathies profondes. Par conséquent, employons de préférence les formules dont je me suis servi : gouvernement issu du suffrage universel, gouvernement répondant à la volonté et à la souveraineté populaire, selon la règle des majorités qui est la loi dernière des démocraties.

Pas de doute là-dessus. Pas de doute que si nous nous plaçons sur le terrain strict du droit international, du droit public, seul le gouvernement légal aurait le droit de recevoir de l’étranger des livraisons d’armes, alors que ce droit devrait être refusé sévèrement aux chefs de la rébellion militaire. (Applaudissements) 

Oui, vous avez raison de m’applaudir, mais je crois que vous aurez raison aussi d’écouter et de méditer les paroles que je vais ajouter. Dans la rigueur du droit international, si c’est une rigueur qu’on invoque comme on l’a fait dans un grand nombre d’ordres du jour dont le gouvernement a été saisi, laissez-moi vous dire que le droit international permettrait demain aux gouvernements qui jugeraient cette mesure commode, de reconnaître comme gouvernement de fait la junte rebelle de Burgos, et qu’à partir de cette renaissance de fait, sur le terrain du droit international (terrain moins solide que vous ne le pensez) des livraisons d’armes pourraient être faites à ce gouvernement rebelle aussi bien qu’au Gouvernement régulier.

 

« CELA EST CONTRAIRE AU DROIT INTERNATIONAL »

Cette reconnaissance de fait, il y a eu des moments où elle a paru possible, dans certaines éventualités ; elle le deviendrait encore demain. En tout cas, dans la réalité des choses, tout s’est passé comme si certaines puissances avaient reconnu le Gouvernement rebelle comme un Gouvernement de fait et s’étaient jugées en droit de livrer des armes à ce soi-disant Gouvernement de fait aussi bien que d’autres pouvaient le faire au Gouvernement régulier. 
Vous me dites : « Cela est contraire au droit international. » Peut-être. Pour assurer alors l’observation stricte du droit international, que d’ailleurs il devient si aisé de tourner, quel autre moyen auriez-vous que la force ?

Quel autre moyen auriez-vous vu que la sommation, que l’ultimatum, avec toutes ses conséquences possibles ?

 

CE QUE CHACUN SOUHAITE

Camarades, je vous parle gravement, je le sais, je suis venu ici pour cela. Je sais bien ce que chacun de vous souhaite au fond de lui-même. Je le sais très bien. Je le comprends très bien. Vous voudriez qu’on arrivât à une situation telle que les livraisons d’armes puissent être faites au profit du gouvernement régulier et ne puissent pas l’être au profit des forces rebelles. Naturellement, vous désirez cela. Dans d’autres pays, on désire exactement l’inverse.

Je vous le répète, c’est bien ce que vous pensez, j’ai traduit votre pensée ! Mais vous comprenez également qu’ailleurs on veuille agir de telle sorte que les rebelles soient munis sans que le gouvernement régulier reçoive quelque chose.

Alors, à moins de faire triompher la rigueur du droit international par la force et à moins aussi que l’égalité même sur le plan du droit international ne soit rétablie par la reconnaissance de fait, alors ? Devant quelle situation se trouve-t-on ? N’espérez dans la possibilité d’aucune combinaison qui, sur le plan européen, permette d’assister les uns, sans qu’on assiste par contre les autres. 

 

LA CONCURRENCE DES ARMEMENTS

Demandez-vous aussi qui peut fournir dans le secret, par la concentration des pouvoirs dans la même main, par l’intensité des armements, par le potentiel industriel, comme on dit ; demandez-vous aussi qui peut s’assurer l’avantage dans une telle concurrence. Demandez-vous cela ! Une fois la concurrence des armements installée, car elle est fatale dans cette hypothèse, elle ne restera jamais unilatérale. Une fois la concurrence des armements installée, sur le sol espagnol, quelles peuvent être les conséquences pour l’Europe entière, cela dans la situation d’aujourd’hui ?

Et alors, si ces pensées sont maintenant suffisamment claires et suffisamment présentes devant votre esprit, ne vous étonnez pas trop, mes amis, si le gouvernement a agi ainsi. Je dis le gouvernement, mais je pourrais aussi bien parler à la première personne, car j’assume toutes les responsabilités. (Vifs applaudissements)

 

LE GOUVERNEMENT SOLIDAIRE

Au nom du gouvernement que je préside, je n’accepte pas d’exception de personne ou d’exception de parti. Si nous avons mal agi aujourd’hui, je serais aussi coupable en ayant laissé faire qu’en le faisant moi-même ; je n’accepte pas ces distinctions… 

Ne vous étonnez pas si nous sommes venus à cette idée. La solution, ce qui permettrait peut-être à la fois d’assurer le salut de l’Espagne et le salut de la paix, c’est la conclusion d’une convention internationale par laquelle toutes les puissances s’engageraient, non pas à la neutralité – il ne s’agit pas de ce mot qui n’a rien à faire en l’espèce – mais à l’abstention, en ce qui concerne les livraisons d’armes, et s’engageraient à interdire l’exportation en Espagne du matériel de guerre.

Nous sommes donc arrivés à cette idée par le chemin que je vous trace, chemin sur lequel nous avons connu, je vous l’assure, nous aussi, quelques stations assez cruelles. Je ne dis pas que nous n’ayons pas commis d’erreurs, je ne veux pas nous laver de toute faute possible. Qui n’en commet pas ?

 

LE 8 AOUT

 Le 8 août, nous avions, en conseil des ministres, décidé de suspendre les autorisations d’exportations au profit du gouvernement régulier d’une nation amie. C’étaient les termes mêmes de notre communiqué officiel. Nous l’avons fait, nous avons dit pourquoi, en espérant par cet exemple piquer d’honneur les autres puissances et préparer ainsi la conclusion très rapide de cette convention générale qui nous paraissait le seul moyen de salut.

Seul moyen de salut ? Excusez-moi, je ne voudrais pas que les paroles que je vais prononcer puissent sembler cruelles ou amères à mes amis d’Espagne qui, je le sais, et je ne m’en étonne pas, jugent quelquefois notre conduite avec dureté ; cela est naturel. Je ne voudrais pas avoir l’air d’apprécier ici mieux qu’eux leurs intérêts propres et les intérêts de leur pays.

Mais nous avions pensé, c’était notre conviction, que même pour l’Espagne, au lieu d’ouvrir une lutte et une concurrence nécessairement inégale, la conduite finalement la meilleure, celle qui contenait le secours le plus réel était d’obtenir cette sorte d’abstention internationale qui, alors, malgré l’inégalité criante et blessante du départ, aurait permis malgré tout à la volonté nationale, à la souveraineté nationale de reprendre et d’assurer peu à peu sa prévalence. Nous l’avions fait pour cela, et nous l’avions fait pour éviter des complications internationales dont la gravité et l’imminence ne pouvaient pas nous échapper. 

 

UNE INJUSTICE QUI A FAIT SOUFFRIR

Il en est résulté que, pendant un trop long temps, beaucoup plus long que nous l’avions prévu, beaucoup plus long que nous ne l’aurions voulu, en raison de cette offre peut-être trop confiante, nous nous sommes trouvés, nous, les mains liées, tandis que les autres puissances gardaient juridiquement, gardaient politiquement, jusqu’à ce que leurs engagements fussent souscrits, jusqu’à ce que les mesures d’exécution fussent promulguées, l’aisance que nous nous étions interdite à nous mêmes. C’est cette injustice, cette inégalité qui vous a fait souffrir comme nous pouvions en souffrir nous-mêmes.

Mais, malgré tout, sans vouloir défendre chacun de nos actes – car, encore une fois, j’en prends la responsabilité entière, j’admets que sur tel ou tel point on me blâme –, voulez-vous mesurer la contrepartie ? Voulez-vous vous demander : si nous n’avions pas fait l’offre du 8 août, si nous n’avions pas aussitôt après recueilli – alors que notre suspension des autorisations était conditionnelle – des adhésions sans réserve d’un certain nombre de puissances, si nous n’avions pas recueilli de leur part et de la part des plus importantes, un assentiment de principe, voulez-vous vous demander ce que serait devenu alors un incident comme celui du « Kamerun » ?

 

UNE REDOUTABLE INTERVIEW

Avez-vous oublié la redoutable interview publiée, il y a déjà un mois, où l’un des chefs des rebelles déclarait aux représentants de la presse internationale que, plutôt que d’accepter la défaite, il n’hésiterait pas à jeter l’Europe dans les pires difficultés internationales ? Demandez-vous cela en toute conscience ; demandez-vous-le en toute bonne foi et dites-vous que cette conduite qu’on nous reproche, qui a comporté de votre part des critiques que je comprends, qui a blessé en vous des sentiments que je fais mieux que comprendre, a peut-être, en une ou des heures particulièrement critiques, écarté de l’Europe, le danger d’une conflagration générale.

Et si on me dit : « Non, vous exagérez le danger », eh bien, écoutez-moi. Je vous demanderai de m’en croire sur parole, de vous en référer à la parole d’un homme qui ne vous a jamais trompés. (Applaudissements)

 

LA SITUATION D’AUJOURD’HUI

Et maintenant, aujourd’hui, devant quelle situation nous trouvons-nous ? J’ai reçu hier, je vous l’ai dit, les délégués de puissantes sections syndicales qui venaient demander au gouvernement de revenir sur sa position, d’entreprendre une autre politique, une politique déclarée de secours à l’Espagne. Je vous répondrai aussi franchement et aussi clairement que je leur ai répondu hier à eux-mêmes. Aujourd’hui, toutes les puissances ont non seulement donné leur assentiment, mais promulgué des mesures d’exécution. Il n’existe pas, à ma connaissance, une seule preuve ni même une seule présomption solide que, depuis la promulgation des mesures d’exécution par les différents gouvernements, aucun d’eux ait violé les engagements qu’il a souscrits. Je le répète, s’il le faut, et en pesant chacun de mes mots, ce que je viens de dire. 

Et vous pensez que, dans ces conditions, nous pouvons, nous, alors, déchirer le papier que nous avons, nous-mêmes, demandé aux autres de signer alors qu’il est tout frais de leurs signatures, alors que nous sommes hors d’état de prouver que par l’un quelconque des contractants, la signature en ait été violée !

 

JE REPONDS : NON !

Camarades, c’est une question trop grave pour qu’on la raisonne par des interruptions ou par des mouvements de séance. Je vous apporte ici matière à réflexion pour vous-mêmes, et ce n’est pas votre assentiment du moment que je vous demande ; ce que je vous demande, c’est tout à l’heure, ce soir, demain, la réflexion grave et sincère sur ce que je vous aurai dit

Si on me demande de revenir sur les positions du gouvernement et de déchirer le papier que nous avons signé, aujourd’hui comme hier, je réponds : « Non ! » Cela ne nous serait possible que si nous étions devant la certitude prouvée que la signature d’autres puissances a été violée. Nous ne pouvons pas retirer la nôtre, et nous pouvons encore moins faire quelque chose qui, à mes yeux, serait pire encore : la trahir en fait, sans avoir le courage de la retirer.

 

IMPOSSIBLE !

Je vous répète : impossible à mes yeux, et je parle ici, cette fois, à la première personne, impossible à mes yeux en l’heure présente d’agir autrement. Impossible d’agir autrement sans ouvrir en Europe une crise dont il serait difficile ou dont il serait malheureusement trop facile de prévoir les conséquences. (Applaudissements. Cris : « Vive la paix ! ») Camarades, je répète que dans une occasion semblable, je ne demande d’applaudissements de personne, mais que je réclame, que je revendique comme un droit l’attention de tous. 

Maintenant, je veux conclure. J’ai, je peux le dire, évité le pouvoir de mon mieux pendant une assez longue suite d’années. Je l’exerce aujourd’hui dans des conditions qui ne peuvent guère faire envie à personne, et vous savez, moi, quand je dis cela, c’est vrai !

 

DEUX DEVOIRS

J’ai deux devoirs à remplir : un devoir à remplir envers le Parti dont je suis le délégué au gouvernement, et j’ai, comme chef de gouvernement, à remplir des devoirs vis-à-vis de la collectivité nationale auprès de laquelle, nous, Parti, nous avons contracté des obligations.

Le jour où je ne pourrai plus concilier ces deux devoirs, le jour où je ne pourrai plus, sans manquer à ma solidarité disciplinée à l’égard de mon parti, pourvoir aux grands intérêts nationaux dont j’ai la charge, ce jour-là, le pouvoir pour moi deviendra impossible. 

 

LE GOUVERNEMENT DE FRONT POPULAIRE

J’ajoute encore quelque chose. Je suis au gouvernement non pas à la tête d’un gouvernement socialiste, non pas à la tête d’un cabinet prolétarien, mais à la tête d’un gouvernement de coalition dont le contrat a été formé par le programme commun du Rassemblement populaire. Le programme de notre gouvernement et le programme du Front populaire doivent compter pour une large part dans la direction de la politique quotidienne intérieure ou extérieure.

Cependant, nous n’avons pu tout régler par le contrat.

 

L’ADHESION DE L’URSS

La politique que nous venons de suivre n’a pas trouvé d’objection, de la part d’autres puissances. La convention à laquelle je déclare aujourd’hui impossible de refuser ou de soustraire la signature de la France, porte par exemple la signature de l’Union des républiques soviétiques. (Applaudissements)

Je ne puis donc pas croire que la conduite que nous avons suivie soit contraire aux principes du Rassemblement populaire et aux lignes générales du programme qu’il avait rédigé. 

 

SI L’UN DES PARTIS N’EST PAS D’ACCORD

Mais si l’un des partis ou l’un des groupements qui ont adhéré dès sa fondation au Rassemblement populaire, qui ont apposé leur signature au bas du programme, qui, dans le Parlement ou en dehors du Parlement, sont un des éléments nécessaires de notre majorité, juge notre conduite en contradiction avec les déclarations communes, le programme commun, les engagements communs, eh bien, qu’il le dise ! (Applaudissements)

Qu’il le dise franchement, qu’il le dise tout haut, et je vous l’assure : nous examinerons aussitôt ensemble quelles conséquences nous devons tirer de cette dénonciation du contrat. 

Et maintenant, un mot encore, peut-être celui auquel je tiens le plus, celui que je vous dirai du plus profond de moi-même : tant que je resterai au pouvoir, je veux vous dire à côté de ce que je ferai ou de ce que j’ai fait, ce que je ne ferai pas, ce que je me refuse à faire.

 

LA VRAI DIGNITE NATIONALE

Nous avons des amis qui traitent la conduite du gouvernement de débile et de périlleuse par sa débilité même. Ils parlent de notre faiblesse, de nos capitulations. C’est, disent-ils, par cette habitude, cette molle habitude de concessions aux puissances belliqueuses qu’on crée, en Europe, de véritables dangers de guerre. Ils nous disent qu’il faut, au contraire, résister, raidir et exalter la volonté nationale, que c’est par la fierté, l’exaltation du sentiment patriotique qu’on peut aujourd’hui assurer la paix. 

Mes amis, mes amis !… je connais ce langage, je l’ai déjà entendu. Je l’ai entendu il y a vingt-quatre ans. Je suis un Français – car je suis Français – fier de son pays, fier de son histoire, nourri autant que quiconque, malgré ma race, de sa tradition. (Applaudissements)

Je ne consentirai à rien qui altère la dignité de la France républicaine, de la France du Front populaire. Je ne négligerai rien pour assurer la sécurité de sa défense. Mais quand nous parlons de dignité nationale, de fierté nationale, d’honneur national, oublierons-nous, les uns et les autres, que, par une propagande incessante depuis quinze ans, nous avons appris à ce peuple qu’un des éléments constitutifs nécessaires de l’honneur national était la volonté pacifique ? (Ovation prolongée) 

 

LE SPECTACLE DE CERTAINES HEURES…

Est-ce que nous lui laisserons oublier que la garantie peut-être la plus solide de la sécurité matérielle, il la trouvera dans ces engagements internationaux, dans l’organisation internationale de l’assistance et du désarmement ? Est-ce que nous avons oublié cela ? Je crois que vous ne l’avez pas oublié. En tout cas, moi je vous le répète, j’ai vécu trop près d’un homme et j’ai reçu trop profondément de lui un enseignement, et j’ai gardé trop présent et trop vivant devant mes yeux le souvenir et le spectacle de certaines heures, j’ai tout cela en moi trop profondément pour l’oublier jamais, et y manquer jamais.

Tout ce qui resserre entre Français le sentiment de la solidarité vis-à-vis d’un danger possible, je le conçois ; mais l’excitation du sentiment patriotique, mais l’espèce de rassemblement préventif en vue d’un conflit qu’au fond de soi on considère comme fatal et inévitable, cela non ! Pour cela, il n’y aura jamais, je le dis tout haut, à tout risque, ni mon concours ni mon aveu. Je ne crois pas, je n’admettrai jamais que la guerre soit inévitable et fatale. Jusqu’à la dernière limite de mon pouvoir et jusqu’au dernier souffle de ma vie, s’il le faut, je ferai tout pour la détourner de ce pays.

 

JUSQU’AU BOUT… LA PAIX !

Vous m’entendez bien : tout pour écarter le risque prochain, présent de la guerre. Je refuse de considérer comme possible la guerre aujourd’hui parce qu’elle serait nécessaire ou fatale demain. La guerre est possible quand on l’admet comme possible ; fatale, quand on la proclame fatale. Et moi, jusqu’au bout, je me refuse à désespérer de la paix et de l’action de la nation française pour la pacification. 

Eh bien ! mes amis, c’était pour moi un besoin, non seulement de conscience, mais un besoin presque physique de vous parler aujourd’hui comme je l’ai fait.

Je me suis demandé gravement, amèrement, dans notre Conseil national, si je trouverais en moi la volonté, la substance d’un chef. Je n’en sais rien. Quand je reprends avec quelque sévérité critique l’histoire de ces trois mois, il peut y avoir bien des circonstances où je ne suis pas pleinement satisfait de moi-même, où un autre aurait pu faire mieux que je n’ai fait. (Cris : « Non ! ») Oui, je sais ce que je dis, je le sais mieux que vous ! (Rires) Seulement, il y a deux choses qu’on ne pourra jamais me reprocher : le manque de courage et le manque de fidélité. 
Je crois qu’en étant ici à cette heure, et en vous parlant comme je viens de le faire, je vous ai donné un témoignage du premier. (Applaudissements)

Ma fidélité, elle, ne faillira pas davantage : fidélité aux engagements pris envers mon Parti, fidélité aux engagements pris envers la majorité électorale, fidélité aux engagements souscrits par les autres éléments du Rassemblement populaire, fidélité aussi, laissez-moi vous le dire, à moi-même, aux pensées, aux convictions, a la foi qui ont été celles de toute ma vie et dans lesquelles j’ai grandi et vécu comme vous – comme vous et avec vous. (Ovation prolongée. La salle, debout, applaudit et crie : « Vive Blum ! » et chante l’Internationale.)

LES ENFANTS DE LA GUERRE CIVILE. Quelques photos.

Des enfants de la Guerre Civile, victimes innocentes d’un conflit qui les a souvent arrachés à leur terre natale. Que sont-ils devenus ?

Quelques images dans le désordre de la guerre. Il suffit de lire les visages.

Le photographe Hermes Pato (1897-1978) saisi ce cliché sur la Gran Vía de Madrid en 1940.
. A l’abri de la pluie sur la Gran Vía en 1940. Hermes Pato (1897-1978), photographe espagnol.

 

 

Cliché de Kati Horna (1912-2000), photographe anarchiste de nationalité hongroise.
Cliché de Kati Horna (1912-2000), photographe anarchiste de nationalité hongroise.

 

 

Kati Horna, Madrid 1937.
Kati Horna, Madrid 1937.

 

 

Barcelone 1939. Margaret Bourke-White (1904-1971), première femme correspondant de guerre de l'armée américaine.
Barcelone 1939. Margaret Bourke-White (1904-1971), première femme correspondante de guerre de l’armée américaine.

 

Des enfants ramassent quelques grains de blé, Gran Vía 4 novembre 1936. Luis Ramón Marín (1884-1944), l'un des premier photrepoters espagnol. A la fin du conflit, il n'a plus été autorisé à pratiquer sa profession.
Des enfants ramassent des grains de blé, Gran Vía, 4 novembre 1936.
Luis Ramón Marín (1884-1944), l’un des premiers photoreporters espagnols. A la fin de la guerre, il n’a plus été autorisé à exercer sa profession.

 

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Orphelines. Biarritz, mai 1939.
Orphelines. Biarritz, mai 1939.

 

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La chute d'Irun.
La chute d’Irun, le pont international.

 

Le photographe Raymond Vanker (1913- ), franchi la frontière d'Irun avec un bébé.
Le photographe Raymond Vanker (1913 ), sous les balles franquistes,  franchi la frontière d’Irun avec un bébé que lui a confié une maman lors de l’incendie de la ville.

 

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Luchon, 13 avril 1938.
Luchon, 13 avril 1938.

 

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Madrid, 1936.
Madrid, 1936.

 

 

Guernica, 1937.
Guernica, 1937.

 

Gerda Taro.
Gerda Taro.

 

 

Gerda Taro.
Gerda Taro.

 

Gerda Taro.
Gerda Taro.

 

 

Gerda Taro, 1936.
Gerda Taro, 1936.

 

Gerda Taro.
Gerda Taro.

 

Plaza del Carmen, Madrid.
Plaza del Carmen, Madrid.

 

Plaza del Carmen, Madrid.
Plaza del Carmen, Madrid.

 

 

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Madrid, fin juillet 1936.
Madrid, fin juillet 1936.

 

 

Enfants évacués.
Enfants évacués.

 

Évacuation de Madrid, gare d'Atocha, décembre 1936.
Évacuation de Madrid, gare d’Atocha, décembre 1936.

 

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Extremeño, 1936. David Seymour, dit "Chim" (1911-1956), cofondateur de l'agence Magnum en 1947 avec Robert Capa, Henri Cartier-Bresson et George Rodger.
Extremeño, 1936. David Seymour, dit « Chim » (1911-1956), cofondateur de l’agence Magnum en 1947 avec Robert Capa, Henri Cartier-Bresson et George Rodger.

 

Croix Rouge, 29 octobre 1936.
Croix Rouge, 29 octobre 1936.

 

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Madrid 1937.
Madrid 1937.

 

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Cati Horna.
Cati Horna.

 

Henri Cartier-Bresson.
Henri Cartier-Bresson.

 

Capa, Teruel.
Teruel. Capa

 

Cordoue, septembre 1936. Capa.
Cordoue, septembre 1936. Capa.

 

Madrid 1936. Capa
Madrid 1936. Capa

 

Malaga, février 1937. Capa.
Malaga, février 1937. Capa.

 

Bilbao, mai 1937. Capa.
Bilbao, mai 1937. Capa.

 

Argelés. Capa.
Argelés. Capa.

 

Bilbao 1937. Capa.
Bilbao 1937. Capa.

 

Tarragona, 15 janvier 1939. Capa.
Tarragona, 15 janvier 1939. Capa.

 

Le camp d'Argelés.
Le camp d’Argelés.

 

Le camp Joffre à Rivesaltes.
Le camp Joffre à Rivesaltes.

 

Calla Alcalá.
Calle Alcalá.

 

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Distribution de cadeaux día de Reyes, Madrid 1937.
Distribution de cadeaux día de Reyes, Madrid 1937.

 

Refuge, 1938.
Refuge, 1938.

 

Premiers bombardements de Madrid, août 1936.
Premiers bombardements de Madrid, août 1936.

 

Le Perthus, 1939.
Le Perthus, 1939.

 

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Mons, Belgique, juin 1937.
Mons, Belgique, juin 1937.

 

Distributions de jouets, día de Reyes, Barcelone 1936.
Distributions de jouets, día de Reyes, Barcelone 1936.

 

Barcelone 1939.
Barcelone 1939.

 

Barcelone, Agustí Centelles (1909-1985). Il est l'auteur de la seule photographie de George Orwell dans les rangs du POUM.
Barcelone, Agustí Centelles (1909-1985). Il est l’auteur de la seule photographie de George Orwell dans les rangs du POUM.

 

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Dessins d’enfants (origine indéterminée, collection personnelle). On reconnait en particulier les Savoia Marchetti italiens et les Junker Ju 87 allemands

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ATTENTISME ET DEMISSION ou TRAHISON, CYNISME ET HYPOCRISIE.

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GRELLET, Gilbert, Un été impardonnable.1936 : la guerre d’Espagne et le scandale de la non-intervention. Préface de Manuel Valls. Paris : Albin Michel, 2016, 278 p.

 

 

La non-intervention en Espagne fut une des farces diplomatiques les plus scandaleuses perpétrées en Europe entre les deux guerres.
William Shirer, journaliste et historien américain.

Les démocraties occidentales ont abandonné à son sort la démocratie espagnole. La farce de la non-intervention a poignardé dans le dos un gouvernement démocratique constitutionnel sous le couvert de l’impartialité.
Claude Bowers, ambassadeur des Etats-Unis en Espagne.

Il eût suffi d’une aide insignifiante au gouvernement de Madrid pour qu’il étouffât dans l’œuf la rébellion.
Jean Zay, ministre de l’Education Nationale.

A l’été 1936, les troupes nationalistes du général Franco, avec l’appui d’avions allemands et italiens, remontent du sud de l’Espagne vers Madrid. C’est une véritable « colonne de la mort » (*), formée de légionnaires et de mercenaires marocains. En chemin, ils multiplient les massacres de civils et assassinent les responsables politiques d’une République espagnole fragile, qui avait appelé au secours le gouvernement français du Front populaire.
Indifférentes à ces crimes de masse, la France de Léon Blum, l’Angleterre de Churchill (**) et l’Amérique de Roosevelt ont refusé d’intervenir pour aider les démocrates espagnoles, alors que les régimes fascistes prenaient fait et cause pour Franco et les militaires putschistes.
Le livre de Gilbert Grellet est le récit de cette faute impardonnable, qui allait meurtrir le peuple espagnol et accroître l’appétit de conquête d’Hitler et de Mussolini, préfigurant Munich et la Seconde Guerre mondiale. A l’heure où se repose la question des interventions extérieures, cette leçon d’histoire sonne comme un avertissement. L’attentisme et la démission sont inexcusables dans les situations extrêmes.
Gilbert Grellet est écrivain et journaliste à l’Agence France-Presse, dont il a notamment dirigé le bureau de Madrid de 2005 à 2010.
[reproduction de la quatrième de couverture]

(*) Expression attribuée à l’historien Francisco Espinosa Maestre (membre par ailleurs du groupe d’experts chargés de la recherche et de l’identification des fosses communes).
(**) Stanley Baldwin est alors premier ministre.

Divisé en une quarantaine de courts chapitres, telle une chronique, ce récit est une reconstitution historique des premiers mois de la guerre civile en Espagne. Bien documenté, il a pour source livres et documents publiés sur la guerre d’Espagne et sur les principaux acteurs mais aussi journaux publiés à cette époque en Espagne, en France ou en Angleterre (voir bibliographie). Sont situés dans leur contexte les discours prononcés et les articles écrits par les grands protagonistes de ce drame (Blum, Churchill et Franco en particulier), enfin sont consultées les archives militaires allemandes de Fribourg et de l’Association pour la Récupération de la Mémoire Historique (ARMH) à Madrid. Les dialogues des réunions et les entretiens reconstitués dans l’ouvrage sont tirés directement de ces documents. Lise London (rencontrée par l’auteur en 2006 et décédée en 2012), participant à la création des Brigades Internationales, qui fut la secrétaire – interprète d’André Marty, capitaine dans la Résistance, qui a survécu aux camps de la mort nazis (comme son mari, le communiste tchèque Arthur London, auteur de l’Aveu) est l’inspiratrice de ce livre.

Lise London née Elisabeth Ricol, de parents espagnols :
http://www.revues-plurielles.org/_uploads/pdf/1358528683.pdf

17 juillet 1936, soulèvement de la garnison de Melilla au Maroc espagnol. 

Franco, surnommé « Miss Iles Canaries 1936» à cause de ses hésitations et sa façon de se faire désirer (les sobriquets concernant Franco sont nombreux et bien imagés), atterrit à Ceuta et rejoint le mouvement insurrectionnel initié par les généraux Mola (véritable cerveau et organisateur du soulèvement militaire), Sanjurjo (considéré comme le chef des insurgés). Queipo de Llano les a rejoints plus tardivement.
Dans cette colonne (la guerre dite « des colonnes » qu’elles soient franquistes ou républicaines – du POUM et de la CNT-FAI – se déroule au début du putsch, de juillet à novembre 1936) qui avance inexorablement vers la capitale, figurent les « volontaires » marocains tant redoutés. Souvent enrôlés de force, ils sont recrutés notamment par Soliman Al-Khattabi, un cousin d’Abd El Krim (chef de la révolte marocaine lors de la guerre du Rif dont la reddition aux espagnols ne sera effective qu’en 1926 grâce à l’appui déterminant des forces françaises commandées par Lyautey puis Pétain). Ces combattants, âgés de 16 à 50 ans, reçoivent une solde de 180 pts par mois (*), leurs parents reçoivent quant à eux huile, sucre, pain. Parfois, le butin recueilli, des machines à coudre Singer – très recherchées – sont directement expédiées par leurs officiers dans les douars du Rif oriental où s’effectue le recrutement nationaliste.
(*) 6 pts / jour est bon salaire pour un journalier agricole. En 1936, la majorité des articles de consommation courante était inférieur à 5pts : 1kg de pain ou de lait coûtait 70cts, pommes de terre 30cts, huile 2pts.

20 juillet.

José Giral, chef du gouvernement espagnol, envoie à son homologue français Léon Blum le message suivant : « Surpris par dangereux coup d’état militaire. Vous demandons de nous aider immédiatement par armes et avions. Fraternellement vôtre. Giral. »
Entouré de ses ministres, il n’y a aucun doute dans l’esprit de Léon Blum lors de cette réunion d’urgence à Matignon : « Bien entendu, nous allons accéder à leur demande. Le Frente Popular espagnol est dans le pétrin et nous devons absolument les soutenir. Vous êtes tous d’accord, n’est-ce pas ? ». Blum est en effet profondément solidaire des républicains espagnols.

23 juillet.

Stanley Baldwin (cousin de Rudyard Kipling), premier ministre conservateur (tory) de 1935 à 1937, laisse entendre à son homologue français quelques remarques préoccupantes : « Ne comptez pas sur nous. Londres resterait ‘ neutre ‘ si la livraison d’armes à Madrid entrainait un conflit avec Berlin ou Rome ». Il est clairement établi que les britanniques sont favorables aux militaires espagnols insurgés et pas seulement pour défendre les intérêts des entreprises britanniques actives en Espagne comme le groupe minier Río Tinto.
D’autre part, Franco s’est rendu des Canaries au Maroc en compagnie de l’ex- agent secret Hugh Pollard, dans l’avion Dragon Rapide loué en Angleterre à la compagnie Olley Air Services par le journaliste espagnol de droite Luis Bolín. Les militaires anglais à Gibraltar ont ensuite aidé en sous-main les rebelles en facilitant leurs communications téléphoniques. Neutralité ? Les dés sont pipés dès le début du conflit.
Les dirigeants britanniques ont été largement intoxiqués par les rapports des services secrets, le MI6, obsédés par la lutte contre le communisme, sur une soi-disant menace marxiste – en fait inexistante – dans la péninsule ibérique.
Une campagne de presse française de droite se fait l’écho de ces rumeurs.
Via « La revue de Paris » ou « La revue des deux mondes » l’homme politique et écrivain Jacques Bardoux (grand-père de Valéry Giscard d’Estaing) propage depuis plusieurs mois la fable d’un complot communiste pour justifier le putsch.
Voir également : BARDOUX Jacques, Le chaos espagnol, éviterons-nous la contagion ? Paris : Flammarion, 1937, 47p.

« Le juif Léon Blum nous conduira-t-il à la guerre ? » s’interroge ainsi L’Action française de Charles Maurras.

Blum autorisera en secret la livraison de quelques avions en pièces détachées ainsi que du matériel mais ces fournitures (payées en or) seront très limitées et insuffisantes.
Que faire ?
Albert Lebrun, esprit conservateur, président de la République, confie grandiloquent, à Blum : « Livrer des armes à l’Espagne peut signifier la guerre en Europe et la révolution en France. » Blum, isolé politiquement par son propre gouvernement et subissant la pression britannique, hésite à donner sa démission. Ses amis espagnols l’en dissuade car il est un précieux allié même si ses pouvoirs sont dérisoires. Blum, résigné, se voit contraint, à contrecœur, de se soumettre. Le gouvernement français décide alors à l’unanimité de n’intervenir en aucune manière dans le conflit intérieur espagnol et propose le principe de « non-intervention ».
Parmi les opposants les plus résolus à la non-intervention – nous devons les citer pour mémoire et par gratitude – figurent les socialistes Vincent Auriol (ministre des Finances, sera président de la République de 1947 à 1954), Roger Salengro (ministre de l’Intérieur), Georges Monnet (ministre de l’Agriculture), Marius Moutet (ministre des Colonies), Marx Dormoy (sous-secrétaire d’Etat à la Présidence du Conseil) ou Léo Lagrange (sous-secrétaire d’Etat aux Loisirs et aux Sports, il soutint les Olympiades de Barcelone), mais aussi les radicaux Pierre Cot (ministre de l’Air), Maurice Viollette (ministre d’Etat), Jean Zay (ministre de l’Education nationale et des Beaux-Arts) ou Alphonse Gasnier-Duparc (ministre de la Marine).
En face, ceux qui soutiennent le projet d’abandonner à son sort la démocratie espagnole en arrêtant de lui vendre des armes ont un poids politique plus important, que ce soit parmi les radicaux, Camille Chautemps (ministre d’Etat, fut maire de Tours, député, il succéda à Blum en juin 1937), Edouard Daladier (ministre de la Défense nationale et de la Guerre), Yvon Delbos (ministre des Affaires étrangères), ou chez les socialistes, Charles Spinasse (ministre de l’Economie nationale), Albert Rivière (ministre des Pensions), Albert Bedouce (ministre des Travaux publics), Robert Jardillier (ministre des Postes, Télégraphes, Téléphones), ou encore Paul Faure (co-secrétaire général de la SFIO avec Léon Blum), chantre du pacifisme, qui finira rallié à Vichy en 1940 comme la plupart des personnages précités. A cette liste non exhaustive, il faut ajouter le très influent poète-diplomate Alexis Léger (remarqué depuis 1924 sous le pseudonyme de Saint John Perse, auteur du sibyllin recueil de poèmes Anabase, qui recevra le prix Nobel de littérature en 1960), secrétaire général du Quai d’Orsay qui saura convaincre le gouvernement Blum : « Il est indispensable d’éviter toute provocation, si nous intervenons pour aider le gouvernement Giral face aux putschistes, ce sera un chiffon rouge agité devant Berlin et Rome. »

Churchill, écarté du pouvoir depuis plusieurs années, ne joue aucun rôle décisionnel. Il occupe un siège aux Communes mais ses idées, ses suggestions, sont écoutées par les dirigeants anglais. Il est aveuglé par un anticommunisme virulent qui l’empêche d’apprécier objectivement la situation en Espagne.

Début août, la presse française fait état de livraisons à Franco d’avions italiens. Hitler envoie discrètement 52 avions sans plaques de nationalité et du matériel de guerre.
Un mois de conflit déjà. Lorca est assassiné le 18 août (une hypothèse communément admise est que José Valdés Guzmán, gouverneur civil de Grenade, aurait ordonné la mise à mort du poète après avoir reçu le feu vert de Queipo de Llano).

Début septembre, Irun tombe, premier genou à terre de la République.

Des meetings de soutien à la République espagnole sont organisés partout en France, « neutralité immorale » dénonce Le Populaire, organe du parti socialiste.
Le 9 septembre enfin a lieu à Londres la première réunion pour formaliser le pacte de non-intervention proposé par la France afin de mettre en place des mécanismes permettant de contrôler les agissements des pays signataires. Vingt-cinq pays sont représentés hormis le Portugal et la Suisse. Dino Grandi, fasciste notoire représente l’Italie, Joachim Von Ribbentrop (futur ministre des Affaires étrangères), l’Allemagne. Cinq jours plus tard, un sous-comité est mis en place, composé de huit pays : Grande-Bretagne, France, Allemagne, Italie, Union Soviétique, Suède, Belgique et Tchécoslovaquie – ces trois derniers n’y feront que de la figuration. Dès le lendemain, Madrid fait savoir qu’il y a eu des violations de l’accord de la part de l’Allemagne, de l’Italie et du Portugal, en vain. L’opération « Feu magique », montée en une semaine, est le nom donné par Goering à l’aide militaire nazie aux nationalistes (en référence à l’opéra de Wagner « Siegfried »). Le 25 septembre, Julio Álvarez del Vayo, le ministre espagnol des Affaires étrangères, dénonce, indigné et impuissant, devant la 17è assemblée générale de la Société des Nations à Genève, ce scandale politique sans précédent. Rappelons que l’Allemagne n’est plus membre de la SDN depuis 1933.
Cette attitude va pousser Moscou à aider à son tour les républicains à partir du mois d’octobre. Ce « comité de non-intervention », comme il sera désormais désigné, va demeurer actif jusqu’en août 1938, et sera seulement dissous en avril 1939. Cynisme et hypocrisie.

Quelle est la position des Etats-Unis ?

Claude Bowers (*), ambassadeur des Etats-Unis en Espagne, véritable démocrate, considère que ce conflit oppose « une armée à un peuple », il dénonce « la sinistre farce et les simulacres éhontés» de la non-intervention, l’attitude « pitoyable » de Blum, la « trahison de la démocratie espagnole ». Roosevelt, initialement favorable aux républicains espagnols a cédé au secrétaire d’Etat Cordell Hull qui s’appuyait sur le Neutrality Act de 1935 (lois de neutralité et de non-interventionnisme dans les conflits étrangers) pour écarter toute idée de soutiens aux belligérants. Un embargo formel sera même décrété début 1937 alors que le Neutrality Act ne s’applique nullement aux guerres civiles comme le conflit espagnol. Comme pour la Grande-Bretagne, cette apparente neutralité penche plutôt du côté des insurgés car les milieux d’affaires américains accordent leur soutien aux putschistes. Texaco livre pétrole et carburant, Studebaker et Général Motors fournissent à crédit quelque douze mille camions, Dow Chemical livre des dizaines de milliers de bombes via l’Allemagne. En revanche, le 10 août, le gouvernement américain interdit au fabricant aéronautique Glenn L. Martin de vendre huit bombardiers à Madrid. Cependant, la grande majorité des journalistes américains couvrant le conflit espagnol appuie plutôt les républicains, Hemingway est le plus connu. Sur une idée de Maurice Thorez, le Komintern crée début novembre les Brigades Internationales, près de trois mille américains intégreront le bataillon Abraham Lincoln (aux côtés des dix mille français).
(*) BOWERS Claude G., Ma mission en Espagne 1933-1939. Paris : Flammarion, 1956, 412 p.

Le pacte de non-intervention ne sera pas respecté par les alliés de Franco. Entre avril et juillet 1937, 42 navires chargés de matériel de guerre à destination des franquistes passeront outre le blocus ou seront protégés par les « navires de contrôle » allemands et italiens. Malgré ces infractions, aucune mesure ne sera prise. En octobre 1937 ont lieu des premiers contacts entre la junte de Burgos et le gouvernement britannique. Des accords commerciaux sont signés et, le 16 novembre, les britanniques envoient Robert Hodgson comme « agent commercial ». Euphémisme pour un ambassadeur en puissance.

Abandonnée par les démocraties européennes, attaquée par les nazis et les fascistes, Franco a fait massacrer son peuple par des troupes étrangères. La République espagnole se vide de son sang.
Le 20 octobre 1936, Sanjurjo meurt dans un accident d’avion, le 3 juin 1937 c’est le tour de Mola dans les mêmes circonstances (Manuel Machado, frère d’Antonio, lui dédiera même un poème : « ¡ Emilio Mola ! ¡Presente ! »). Affranchi de ses principaux rivaux Franco a désormais le champ libre.
Nous connaissons la suite.
Ce livre nous place dans le fébrile contexte international et diplomatique qui règne au début du coup d’état militaire des insurgés contre la République. La boucherie de la Première Guerre mondiale a laissé des stigmates indélébiles aux victimes, mutilés, veuves, plaies restées ouvertes pendant encore plusieurs décennies pour cette génération née à la charnière des deux siècles : « plus jamais ça » répétaient-ils. La crainte d’un nouveau conflit mondial a probablement abusé non-interventionnistes et pacifistes face à une réalité qui leur échappait : « Il ne suffit pas d’interdire la guerre pour garantir la paix ». Dès 1933, quand Hitler devient chancelier, on relève dans la presse française les premières inquiétudes – justifiées – face à la lente montée de la peste brune. L’attentisme a rendu la guerre inexorable, déclenchée six mois après la fin de la Guerre Civile espagnole. On peut penser que les pays fascistes n’auraient pas résistés à une attitude ferme et non équivoque des pays démocratiques.