Le dernier grand trésor photographique de la guerre civile espagnole

Retrouvées dans deux boîtes rouges au fond d’un garage, 5 000 photos cachées du photographe Antoni Campañà, prises durant la guerre civile espagnole, sont dévoilées pour la première fois.

On dit des photographes qui ont couvert la guerre d’Espagne (1936-1939) qu’ils ont été les pionniers du photojournalisme. A l’époque, cette guerre civile enflamme le pays. Elle oppose le camp des républicains espagnols composé de loyalistes à l’égard du gouvernement légalement établi, de communistes, de léninistes, d’anarchistes à celui des nationalistes et rebelles putschistes dirigés par le général Franco. Robert Capa, David Seymour, Gerda Taro ont photographié le conflit. Leurs images ont fait le tour du monde.

On pense alors avoir tout vu de cette guerre avant qu’en 2018, près de Barcelone, lors de la démolition d’une maison ayant appartenu au photographe catalan Antoni Campañà apparaissent, au fond d’un garage, deux boîtes rouges. Elle contiennent plus de 5 000 photos, des négatifs pour la plupart, mais également plusieurs centaines de tirages, le tout réalisé durant les trois années d’affrontements. Selon le quotidien catalan La Vanguardia, il s’agit « du dernier grand trésor photographique de la guerre civile espagnole ».

Mais qui est Antoni Campañà ? Dans le très beau texte d’introduction du livre La boîte rouge (Seuil) qui revient sur cette histoire et a été codirigé par le journaliste Plàcid Garcia-Planas, l’historien Arnau Gonzàlez Vilalta et le photographe David Ramos, la question est posée. « Qui fut Antoni Campañà Bandranas ? Un artiste, un photojournaliste de sport, un reporter de la vie politique et de la guerre, un représentant de commerce pour Leica et Contax, un éditeur de cartes postales ? Ou encore un saxophoniste de l’Iberian Orchestra, qui se produisait dans les années 1930 à Barcelone ? En guise de réponse, on pourrait dire que (…) Campañà fut un parfait homme-orchestre de la photographie. » Fils et petit-fils d’entrepreneurs dans le domaine de la construction, issu d’une famille aisée, Campañà décide très jeune de faire de la photographie sa vie. À douze ans, il vend déjà ses positifs. À quatorze ans, il réalise un reportage « graphique » sur le roi Alphonse XIII, publié dans une revue espagnole. Dès lors, l’appareil photo devient un inséparable compagnon.

Campañà a trente ans quand débute la guerre civile espagnole. Républicain, catalaniste et fervent catholique, le photographe manifestera très peu de prises de position politiques publiques, affirmant simplement être du côté de ceux « qui gouverneront, s’ils me plaisent ». Il adopte en quelque sorte la position d’un diplomate, et cette diplomatie lui permet de photographier les uns et les autres sans distinction : « De la Ligue de Cambò ou la gauche républicaine de Catalogne de Companys de février et mars 1936, puis, quelques mois plus tard, les révolutionnaires anarchistes et les franquistes victorieux, puis les fascistes et les nazis en 1939. »

Ses images, aussi exposées en ce moment au Musée national d’art de Catalogne, dépeignent une réalité tragique pleine de nuances et de contrastes douloureux. Elles sont une découverte incroyable sur la guerre civile espagnole, une véritable fresque allant du coup d’état de Franco, à la « Barcelone soviétique », jusqu’aux portraits des miliciens antifascistes se rendant au front. Campañà observe ce qui l’entoure, se soucie de son prochain et il se rend partout où il peut aller. Il photographie parfois au Leica, parfois au Rolleiflex, tout ce qu’il considère comme important, en particulier des évènements qui l’ont profondément heurté ou marqué : des églises victimes des révolutionnaires iconoclastes aux portraits d’attirants combattants libertaires, des protestations de rues aux conséquences misérables de la guerre.Retour ligne automatique

Car c’est de cela qu’il s’agit dans ces images cachées et retrouvées près de trente ans après la mort du photographe : de l’histoire d’un homme meurtri de voir son pays détruit. « Campañà a photographié la guerre civile espagnole avec amertume et tristesse, cet état d’âme a guidé son refus de diffuser ses photographies », écrit la commissaire d’exposition Marta Gili. Le photographe n’a pourtant pas aimé photographier la pauvreté, comme il l’a confié à ses enfants. Ainsi son fils Antoni se rappelle-t-il que son père « n’a jamais voulu que l’on sache qu’il avait réalisé des images de la guerre ». A qui se destinaient alors ces photos ? Nul ne le sait mais comme il est joliment écrit sur la quatrième couverture du livre La boîte rouge : « Aujourd’hui, par bonheur, elles nous sont offertes. »

Par Sabyl Ghoussoub

P.-S.

Né à Paris en 1988 dans une famille libanaise, Sabyl Ghoussoub est un écrivain, chroniqueur et commissaire d’exposition. Son deuxième roman Beyrouth entre parenthèses est sorti aux éditions de l’Antilope en août 2020.

https://www.blind-magazine.com/fr/stories/1276/Le-Dernier-Grand-Tresor-Photographique-De-La-Guerre-Civile-Espagnole

De la guerre civile au 15 Mai 2011 : les échos de la Commune de Paris qui ont atteint l’Espagne

De la guerre civile au 15 Mai 2011 : les échos de la Commune de Paris qui ont atteint l’Espagne
Les réminiscences du soulèvement français ont marqué une Espagne divisée : le mouvement cantonaliste, la persécution de l’Internationale, le symbolisme partagé et les commémorations de la révolution parisienne sont quelques-uns des marqueurs arrivés du pays frontalier.

Paris était un véritable bouillonnement de liberté et de ferveur patriotique. Cette révolution du 18 mars 1871 a mis en place le premier gouvernement de la classe ouvrière dans le monde. Cela dura peu de temps, 72 jours seulement, le temps qui s’écoulerait jusqu’à l’implacable répression qui en finirait avec les nouvelles lois inspirées du socialisme autogestionnaire.
La Commune de Paris a pris fin le 28 mai , et avec elle les décrets qui ont donné plus de pouvoir au peuple, entre autres : l’obligation des églises d’accueillir des assemblées de quartier, la laïcité, la création de crèches pour les enfants d’ouvriers, l’autogestion des usines abandonnée par leurs patrons et la suppression des intérêts sur les dettes.
En Espagne, la révolution est largement diffusée par la couverture médiatique des journaux de l’époque dans leurs différentes lignes éditoriales. « L’arc politique a été partagé entre ceux qui l’ont soutenue et ceux qui l’ont décriée, mais il y a des références explicites à La Commune jusqu’en 1937 », a commenté Marie-Angèle Orobon , professeure à l’Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3 (La Sorbonne), specialiste du sujet. 
 
 
Une France qui venait de sortir du chaudron de la guerre franco-prussienne et devint le principal héros de la presse Espagnole. « Les journaux républicains espagnols, très importants à l’époque, ont immédiatement souligné la légitimité de la réaction du peuple face à ce qu’ils ont considéré comme une attaque gouvernementale, tandis que les milieux monarchiques, libéraux, conservateurs et même les carlistes dénoncèrent l’anarchie et le desordre qui régnaient à Paris », explique madame Orobon. En Espagne, en plein dans sont mandat démocratique de six ans, (sexenio democratico) entre 1868 et 1874, les idées républicaines perçoivent la Commune comme le modèle d’un nouvel ordre social, allant jusqu’à la qualifier de «temple de la liberté, de l’égalité et de la fraternité» .   
Les premières conséquences de la révolution parisienne ne se font pas attendre «Les milieux internationalistes font preuve de prudence pour soutenir le soulèvement populaire, mais le 2 mai, date importante qui marque le début de la résistance anti-française, la section madrilène de l’Internationale organise une soirée fraternelle en soutien à la Commune; un évènement qui finit par être réprimé « , selon les termes de Marie Angèle Orobon.
Presque immédiatement après la révolution, on assiste à plusieurs  façons d’écrire cette histoire en Espagne. « Les républicains en Espagne n’appuyèrent pas la Commune de façon unanime, et par la suite certains d’entre eux écrivirent des ouvrages pour aider les citoyens afin de clarifier la compréhension de ce que fut le mouvement des communards », commente le professeur d’université .
 
 Illégalisation de l’Internationale
Cette première fois où les masses entrèrent dans l’histoire, eut des répercussions dans la société espagnole, là où les milieux sympathisant voyaient avec le soulèvement leurs idéaux se réaliser, bien que contrecarrés.

 En fait, quelques années plus tard, le mouvement cantonaliste espagnol s’inspirera de certaines des revendications portées par la Commune: « Antonio de la Calle participa à l’action dans le canton de Carthagène en 1873, il avait été aussi présent à Paris. S’il est vrai que le mouvement cantonal , surgi pendant la Première République espagnole, eu quelques corrélation avec la Commune, je ne crois pas qu’il en fut pour autant le produit des événements de Paris », précise M-A Orobon.  
La répression contre l’Internationale en Espagne fut une des conséquences directes que laissa le bref triomphe de la Commune Parisienne.  « Fin mai 1871, Mateo Sagasta , ministre de l’Intérieur de l’époque, réprima les membres de cette organisation par des persécutions et emprisonnements ; même les dirigeants de l’Internationale durent s’enfuir au Portugal. En Espagne, ils finirent par l’illégaliser en octobre 1871. Elle était considérée comme une organisation susceptible de mettre en danger la sécurité de l’État, alors que Fernando Garrido, Francisco Pi i Margall, Nicolás Salmerón et Emilio Castelar s’opposèrent à cette décision lors du débat au Congrès des députés », explique l’experte.  
Le pétrole : chaos et désordre
En conséquence la répression subie par le peuple parisien cristallisa les divergences qui couvaient dans les rangs républicains en Espagne. Les différences entre l’ouvriérisme et le républicanisme fédéral commençaient à devenir insurmontables , dès lors que les républicains espagnols étaient liés à cette France qui avait perpétré le massacre contre la Commune.  Les symboles laissés par la révolution parisienne furent très présents en Espagne. À titre d’exemple, le pétrole devient un symbole de désordre et de chaos 
 
 
C’est ainsi que l’explique M-A orobon, elle-même: «La Commune s’est terminée par un terrible incendie pendant la Semaine sanglante, quand elle fut abattue. Malgré le fait qu’il y ait eu nombre d’incendies, l’idée commença à circuler que presque tous étaient causés par des femmes, que l’on appelait Les Pétroleuses. 

On disait que les communards voulaient en finir avec Paris en la détruisant. Mais la vérité est que les premiers foyers ont commencé avec les bombes incendiaires lancées par les ennemis de la Commune. Cette symbolique, celle du pétrole, se propagea en Espagne depuis 1871jusqu’à la décennie des années 80 devenant ainsi un symbole intégré par le monde de la culture politique espagnole et reproduite de façon indépendante dans différentes caricatures publiées dans la presse de l’époque. »
De la commune à la guerre civile
L’Espagne n’oublia pas ce qui s’était passé, et encore moins ceux qui défendirent les idées qui avaient porté le peuple de la capitale française au pouvoir. Lors du premier anniversaire du soulèvement, des banquets et des fêtes eurent lieu dans diverses villes et au cours des années suivantes, les cercles socialistes et anarchistes ont commémoré la révolution comme une expression de la mémoire collective des travailleurs qui peu à peu se développe progressivement à la fin du 19e. siècle.  
Un militant en Catalogne, en 1887, disait déjà : « Ce que nous commémorons ici nous appartient, appartient au Parti socialiste ouvrier, car les idées qui ont donné à la Commune son véritable caractère révolutionnaire étaient les nôtres », une citation recueillie dans El Socialista sur 1er avril. Les cercles anarchistes organisent des soirées artistiques avec le même objectif, comme cela s’est produit avec le magazine mensuel catalan Acracia à l’occasion du 15e anniversaire de la Comuna dans un théâtre de Barcelone. L’entrée du XXe siècle n’a pas perturbé les réminiscences communales en Espagne. Ainsi, le théâtre Ensanche de Bilbao a creé le 18 mars 1904 la pièce La Grande Lutte , de Francisco Olabuénaga.       
 
 
Dans la guerre civile, l’expérience parisienne était encore chaude. Le 14 mars 1937, à Valence, la ministre anarchiste Federica Montseny a célébré l’insurrection avec une conférence intitulée La Commune de Paris et la Révolution espagnole . Dans cette intervention, la dirigeante libertaire fit le parallèle entre les aspirations de la Commune et de l’Espagne républicaine à cette époque. Orobon cite les paroles de Montseny: « Il y a toute une cause mondiale unie à la nôtre. La Commune vaincue déclencha la répression dans le monde entier . La révolution espagnole, vaincue, serait le début d’une agonie d’une révolution internationale en Europe et en Amérique. Le fascisme s’étendrait comme une tache d’huile.  »  
« Une prophétie qui s’est réalisée », fait remarquer la professeure de la Sorbonne. Au XXIe siècle, selon l’experte, quelque chose de La Commune pourrait aussi être vu dans le mouvement des indignés et du 15-Mai:  » Anti-système , comme on dit maintenant, mais aussi spontané, venant des bases populaires et avec une certaine projection internationale en dehors des partis politiques où se rassemblent différentes idéologies qui convergent vers l’autonomie sont les principaux aspects partagés ».  
Si la Commune fonctionne comme une sorte de mythe, dans lequel le mouvement spontané surgit des entrailles de la société et de ceux qui ne s’étaient jamais exprimés, il faut également voir cet évènement comme une révolution, comme le soutient notre experte. « Ce fut une révolution profondément sociale pour la défense de la République démocratique et sociale, qui fait appel à la République avec toutes ses conséquences», a conclu Orobon.   
 
traduction Luis Lopez

TEXTE EN ESPAGNOL tiré du journal Publico

De la Guerra Civil al 15M: los ecos de la Comuna de París que llegaron a España
Las reminiscencias del levantamiento francés impregnaron a una España que se dividió: el movimiento cantonalista, la persecución a La Internacional, la simbología compartida y las conmemoraciones de la revolución parisina fueron algunos de los hechos que llegaron del país fronterizo.

París era un hervidero de libertad y fervor patriótico. Aquella revolución del 18 de marzo de 1871 dio comienzo al primer gobierno de la clase obrera del mundo. Duraría poco, tan solo 60 días, el tiempo que trascurrió hasta que una implacable represión acabaría con la novedosa legislación vertebrada en torno al socialismo autogestionario.
La Comuna de París murió el 28 de mayo, y con ella los decretos que daban más poder al pueblo, entre otros: la obligación de las iglesias a acoger asambleas de vecinos, la laicidad del Estado, la creación de guarderías para los hijos de las obreras, la autogestión de las fábricas abandonadas por los patrones y la abolición de los intereses de las deudas.
En España, la revolución fue ampliamente difundida por la cobertura que hicieron los periódicos de la época con sus diferentes líneas editoriales. « El arco político se dividió entre aquellos que la apoyaron y los que la denostaban, pero hay referencias explícitas de La Comuna hasta 1937 », comenta Marie-Angèle Orobon, profesora en la Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3 (La Sorbona) y estudiosa del tema.

Una Francia en el calderero que acaba de salir de la guerra franco-prusiana se convirtió en la protagonista de la prensa española. « Los diarios republicanos españoles, muy importantes en aquella época, recalcaron en seguida la legitimidad de la reacción del pueblo ante lo que consideraban un ataque gubernamental, mientras que los medios monárquicos, liberales, conservadores e incluso carlistas denunciaron la anarquía y el desorden que reinaba en París », explica Orobon. En España, inmersa en su sexenio democrático, el republicanismo percibe a La Comuna como un modelo de nuevo orden social, llegándolo a tildar de « templo de la libertad, igualdad y fraternidad ».
Las primeras consecuencias de la revolución parisina no se hacen esperar: « Los círculos internacionalistas son prudentes con el apoyo al levantamiento popular, pero el 2 de mayo, una fecha muy señalada al marcar el inicio de la resistencia antifrancesa, la sección madrileña de La Internacional organiza una velada de té fraternal en apoyo de La Comuna; un acto que terminó siendo reprimido », en los términos de Orobon.
Casi de forma inmediata a la revolución se produce una gran historiografía sobre la misma en España. « Los republicanos en España no apoyaron La Comuna de forma unánime, y después algunos de ellos escribieron algunas obras como un servicio a la ciudadanía para aclarar qué fue el movimiento comunal », comenta al respecto la profesora universitaria.

Ilegalización de La Internacional
La primera vez que las masas ascendieron a la historia repercutió en la sociedad española, donde los círculos adheridos al levantamiento vieron realizados sus ideales, aunque frustrados.

De hecho, un par de años después el movimiento cantonalista español bebería de algunas de las reivindicaciones efectuadas en La Comuna: « En el cantón de Cartagena de 1873 participó Antonio de la Calle, quien también había estado en París, pero aunque el movimiento cantonal surgido en la Primera República española tuviera cierta relación, no creo que sea producto de lo ocurrido en París », puntualiza Orobon.
La represión contra La Internacional en España fue una de las consecuencias directas que dejó el corto triunfo de La Comuna parisina. « A finales de mayo de 1871, Mateo Sagasta, Ministro de Gobernación en aquel momento, reprimió a sus miembros con persecuciones y encarcelamientos; incluso la cúpula de La Internacional tuvo que huir a Portugal. En España terminaron por ilegalizarla en octubre de 1871 al ser considerada como una organización que podía poner en peligro la seguridad del Estado, pese a que Fernado Garrido, Francisco Pi i Margall, Nicolás Salmerón y Emilio Castelar se hubieran pronunciado en contra de la decisión durante el debate en el Congreso de los Diputados », se explaya la experta.
El petróleo: caos y desorden
De esta forma, la represión que sufrió el pueblo de París fue la cristalización de la separación que ya se venía fraguando dentro de las filas republicanas en España. Las diferencias entre el obrerismo y el republicanismo federal empezaron a ser insalvables, ya que los republicanos españoles eran ligados a aquella Francia que había perpetrado la masacre anticomunera, parafraseando a Orobon. La simbología que dejó la revolución de París también tuvo gran presencia en España. Como ejemplo de ello, el petróleo se convirtió en un símbolo de desorden y caos

Así lo explica la propia Orobon: « La Comuna terminó con un incendio terrible durante la Semana Sangrienta, cuando la derrotan. Pese a que hubo muchos incendios, empezó a circular la idea de que casi todos ellos eran provocados por mujeres, a las que se denominó las petroleras. Se dijo que los comuneros querían arrasar París para destruirlo, pero en realidad los primeros fuegos empezaron con las bombas incendiarias que tiraron los enemigos de La Comuna. Este símbolo, el del petróleo, circuló por España desde 1871 hasta la década de los 80, llegando a ser un símbolo asimilado por la cultura política española debido a que ya era utilizado de forma independiente en diferentes caricaturas publicadas en la prensa de la época ».
De La Comuna a la Guerra Civil
Pero España no olvidaba lo ocurrido, y mucho menos lo hacían quienes defendían las ideas que habían aupado al poder al pueblo de la capital francesa. En el primer aniversario del levantamiento se celebraron banquetes y fiestas en varias ciudades y durante los próximos años, tanto los círculos socialistas como anarquistas, conmemoraron la revolución como una expresión de memoria colectiva obrera que poco a poco se va elaborando a finales del siglo XIX.
Un militante en Catalunya, ya en 1887, diría: « El hecho que aquí conmemoramos es puramente nuestro, del Partido Socialista Obrero, pues las ideas que dieron a la Commune verdadero carácter revolucionario fueron las nuestras », cita recogida en El Socialista el 1 de abril. Los círculos anarquistas organizan veladas artísticas con la misma vocación, como ocurrió con la revista mensual catalana Acracia con ocasión del XV aniversario de La Comuna en un teatro de Barcelona. La entrada del siglo XX no perturbó las reminiscencias comunales en España. Así, el teatro del Ensanche de Bilbao estrenó el 18 de marzo de 1904 la obra La gran lucha, de Francisco Olabuénaga.

En la Guerra Civil la experiencia parisina seguía candente. El 14 de marzo de 1937, en Valencia, la ministra anarquista Federica Montseny conmemoró el levantamiento con una conferencia denominada La Comuna de París y la Revolución española. En ella, la líder libertaria hizo un paralelismo entre las aspiraciones de la Comuna y la España republicana en aquel momento. Orobon cita las palabras de Montseny: « Hay toda una causa mundial unida a la nuestra. La Commune vencida, fue la represión en todo el mundo. La revolución española, vencida, sería el principio del fin de una revolución internacional en Europa y en América. El fascismo se extendería como una mancha de aceite ».
« Una profecía que sí se cumplió », puntualiza la profesora de La Sorbona. En el siglo XXI, según la experta, también se pudo ver algo de La Comuna en el movimiento de los indignados y el 15-M: « Antisistema, como se dice ahora, pero también espontáneo, procedente de las bases populares y con cierta proyección internacional al margen de partidos políticos en donde se aglutinaban diferentes ideologías distintas que convergían en la autonomía son los aspectos que comparten ».
Aunque La Comuna funciona como una especie de mito, en el que el movimiento espontáneo surgió de las entrañas de la sociedad y de los que siempre habían callado, hay que verla como una revolución, tal y como defiende la experta. « Fue una revolución profundamente social en defensa de la república democrática y social, lo que en aquel momento denominaban como la República con todas sus consecuencias », concluye Orobon.

France Navigation 5/5

1940 : Les nazis occupent le pays, Vichy s’installe, l’extrême droite pavane. France-Navigation a été mise en gérance, trois concurrents se partagent ses navires, la Transatlantique, les Chargeurs et Worms. La direction de la compagnie passe en procès en août, à Toulon. Il s’agit en fait de quatre de ses responsables dont Auguste Dumay et Simon Pozner (Georges Gosnat a été fait prisonnier sur le front belge par les Allemands en mai 40 et Allard/Ceretti a pu échapper à la police).
La presse collabo couvre largement le procès, elle parle de « compagnie étrange » qui se livrait à une « étrange activité ». Pourtant la justice a du mal à trouver la faille, et l’argent. Les preuves manquent, et l’avocat (Maître Moro-Giafferi, vedette du barreau et homme politique fameux) est bon. Les quatre dirigeants sont acquittés le 27 août 1940, et France-Navigation la rouge est blanchie, si l’on peut dire.
Mais l’affaire ne s’arrête pas là. La société suscite bien des appétits. Nombreux sont ceux qui veulent mettre la main sur les fonds de France-Navigation, des aventuriers en tout genre, trafiquants d’armes ou aigrefins, des affairistes vichystes et l’occupant allemand. Tous sont à la recherche des actions (30 000) et des actionnaires. Tous multiplient les enquêtes, les procédures. La Gestapo veille.
Dans les archives de France-Navigation, on peut lire les commentaires de l’administrateur judiciaire de la société, ces années-là ; il y est beaucoup question des investigations d’un officiel allemand, un certain Rosenchaft, gestapiste. Chargé de suivre le dossier, il se montre très actif ; pourtant, de procès en procès devant le tribunal de commerce de Paris, les choses n’avancent pas. « Rien ne semble pouvoir résoudre l’affaire », écrivent les auteurs de l’ouvrage Les brigades de la mer. Puis, coup de théâtre : les Allemands s’aperçoivent que Rosenchaft est en fait un rouge infiltré, un juif hollandais qui travaille pour l’Internationale ; il est arrêté, déporté. Le dossier de France-Navigation est au point mort. On bute sur des questions juridiques, de propriété, d’identité des actionnaires, de secret bien gardé.
Juin 44 : Paris se libère. Le même administrateur, qui tient toujours une sorte de journal de bord, décrit l’ambiance parisienne : « ça tire de partout ». Paniqué, et prudent, il s’enfuit.
1945, Georges Gosnat rentre du camp disciplinaire nazi de Lübeck. Il se retrouvera bientôt, on l’a dit, secrétaire d’État à l’Armement. Il récupère la société, re-identifie petit à petit les différents actionnaires (qu’on retrouve jusqu’en Suède…), remet la main sur les 30 000 actions (volées par un patron de presse indélicat). Et France-Navigation repart. Mais sur un mode marchand plus traditionnel. La compagnie sera vendue en 1953 ; celui qui s’occupe de cette transaction s’appelle Raymond Aubrac.
Pas de conclusion mais une remarque : lorsque les deux livres mentionnés plus haut sur l’histoire de « France-Navigation » sont sortis, dans les années 70, les médias de droite ou de gauche, du Figaro de Giscard au Matin de Mitterrand, ont réservé à ces ouvrages des critiques assez hargneuses. On ne discutait pas les faits, avérés, on traitait le dossier avec mépris. Pourquoi cette attitude ? Sans doute qu’il ne fallait pas créditer les communistes de cette histoire puissante. Ainsi fonctionnait à l’époque l’anticommunisme ambiant. N’empêche, les faits sont là, il reste une formidable histoire rouge.
Gérard Streiff

France Navigation 4/5

1937/1938 : Alors que l’Espagne du Front populaire est victime de la non-intervention, lâchée par Paris et Londres, les communistes mettent sur pied une compagnie maritime pour nourrir et armer les Républicains.

(Illustration : un Polikarpov I-16 aux couleurs des Républicains espagnols)
Dans l’histoire de France-Navigation s’amorce bientôt ce que Ceretti appelle la « deuxième période » où la compagnie pour l’essentiel va transporter de l’aide soviétique à l’Espagne. Paradoxalement cette phase est la moins risquée. Les navires de France-Navigation en effet montent s’approvisionner dans l’extrême nord russe, à Mourmansk, port important sur la mer de Barents, la plus grande ville au nord du cercle arctique. Là, ils embarquent des techniciens, des tankistes, des pilotes d’avion, des officiers, mais aussi du matériel de guerre : avions démontés, tanks, canons.
Ces cargaisons sont déchargées au Havre ou à Bordeaux puis acheminées par la route ou par le train vers Puigcerda et la Catalogne : « un flux continu qui dura des semaines et des mois ». Au troisième trimestre 1938, France-Navigation transfère ainsi 200 avions (en pièces détachées).
L’armée républicaine disposera au total de 276 exemplaires du Polikarpov, l’avion de chasse le plus rapide de l’époque. Il était surnommé « Mosca » (mouche) par les Républicains et les fascistes l’appelaient « Rata » (rat).
« Malheureusement cette aide précieuse venait avec un an de retard », constate Ceretti. Si la livraison d’armes tarde, c’est en raison, semble-t-il, de divergences entre républicains espagnols mais surtout, répétons-le, par la faute de la politique de « non-intervention », une politique de capitulation qui va conduire, en septembre 1938, aux accords de Munich.
Janvier 1939 : Barcelone tombe, le ravitaillement par la Catalogne est désormais impossible. Dans les cahiers de Georges Gosnat, une brève annotation, comme toujours écrite dans un style télégraphique, raconte en quelques mots ce drame. À Bordeaux, en effet, le navire Winnipeg, le plus gros des bateaux de France-Navigation, arrive de Mourmansk bourré d’armes. Mais on fait comprendre au capitaine qu’il ne faut pas débarquer le matériel ; il arrive trop tard, la frontière franco-espagnole est impraticable. L’équipage ne comprend pas, il y a de la castagne dans l’air ; finalement le matériel est réembarqué et Winnipeg repart vers le grand nord.
Au printemps, des navires de France-Navigation qui se trouvent en Méditerranée (ils font le trajet Marseille-Espagne-Oran) vont pouvoir aider l’évacuation de républicains à Valence, mais ils seront en échec à Alicante.
Été 1939 : Suite au pacte germano-soviétique, le PCF est dissout, la société France-Navigation est dans le collimateur des autorités ; elle est l’objet d’une perquisition dès le mois d’août. Pourtant on retrouve le Winnipeg en septembre 1939 à Bordeaux (Alain Ruscio raconte cet épisode dans l’Humanité du 3/9/2019). Ce navire va transporter 3 000 républicains vers le Chili du Front populaire, grâce à l’entremise du consul chilien à Paris, chargé de l’émigration espagnole : Pablo Neruda.
Gérard Streiff 
« France Navigation » disposera jusqu’à 22 navires (certaines sources parlent de 25 bâtiments) ; en dépit des dangers, aucun ne sera coulé. Un seul est arraisonné à Ceuta (Maroc espagnol) et un autre séquestré à Constanta, en Roumanie. Voici les noms de certains de ces navires : Lézardrieux, Ploubazlanec, Perros-Guirec, Cassidaigne, Trégastel, Daissiguernec, Nemours, Mostaganem, Île Rousse, Guilvinec, Lola, Biscarosse, Grand-Quevilly, Gravelines, Paimpol, Saint-Malo, Boujaroui, Aine El Turk, Navarissou, Cap Pinède, Winnipeg.

A posteriori

Regards croisés sur notre compagnon Emilio Marco et François. Emilio est né en 1921 à Falset (Catalogne).Il combattra dans la centurie de Juan Peñalver, cénétiste de Sant Feliu de Llobregat pendant la Guerre d’Espagne. Il passe la frontière en 1939 et sera, comme beaucoup de compagnons, interné dans de nombreux camps. Anti-fasciste convaincu, il s’engagera rapidement dans la Résistance. A la fin de la Seconde guerre mondiale, il s’intégrera petit à petit dans la société française et finira à Saint-Pierre-des-Corps où il militera jusqu’à sa mort le 30 janvier 2013.

Documentaire de Mickaël Foucault et Maëlle Maugendre

France Navigation 3/5

Avant de poursuivre notre récit sur la livraison d’armes par France-Navigation à la République espagnole, il faut évoquer une séquence particulièrement dramatique de l’histoire de la compagnie : l’évacuation de réfugiés de Bilbao. En juin 1937, la capitale du pays basque tombe aux mains des fascistes. Pour fuir, les réfugiés, femmes, enfants, malades, n’ont que la mer. France-Navigation dispose de bateaux (notamment le Ploubazlanec) qui pourraient évacuer une partie de cette population mais ils risquent de subir les attaques des franquistes. Solution ? il faudrait le soutien de la marine de guerre française.
Aussi, une nuit de juin 1937, une délégation du Comité international pour l’aide à l’Espagne se rend chez le premier ministre Léon Blum pour demander l’aide des militaires. Blum et son gouvernement, on le sait, ont opté pour « la non-intervention ». Telle est l’orientation officielle mais celle-ci, on va le voir, se heurte, au sein même de l’administration, à des réticences, des résistances. La délégation est composée du physicien Paul Langevin, d’Émile Dutilleul, trésorier du PCF, et de Giulio Ceretti, alias Pierre Allard. « À 22 heures, on tirait la sonnette Quai Bourbon au domicile du Président du Conseil. » Léon Blum les reçoit en compagnie de Max Dormoy, ministre de l’Intérieur du Front populaire. Blum écoute Langevin qui se fait l’avocat, avec beaucoup de force, d’une intervention de nature humanitaire à Bilbao. À la suite de Langevin, Ceretti intervient, il explique en détail le plan de sauvetage. Le ministre de l’Intérieur déclare alors : « Comme par le passé, le gouvernement n’ordonnerait pas d’enquête sur ces mouvements clandestins de bateaux ». Ce qui est déjà un signe. Ceretti apprécie mais il rappelle que ce qui est demandé, c’est une aide militaire de la France pour accompagner les bateaux de France-Navigation jusqu’au port basque.
Blum hésite. Dans ses Mémoires, Ceretti décrit le premier ministre marchant de long en large dans le salon. Paul Langevin insiste : « Il s’agit de sauver des enfants, Monsieur le Président. » Blum demeure encore tout un temps indécis, puis il assure qu’il va parler au ministre de la Marine et demande à la délégation d’aller tout de suite voir ce dernier. C’est le radical César Campinchi qui reçoit la même nuit le trio dans son ministère. Blum vient de lui téléphoner. Ceretti raconte : « Il ne posa aucune question mais il appela son chef de cabinet et l’ordre fut donné à tous les bâtiments se trouvant au large de Bordeaux d’appareiller et de se diriger rapidement sur Bilbao pour prendre sous protection de la France les bateaux de tout genre chargés de réfugiés basques. (…) Pour une fois, un ministre prenait ses responsabilités.»
Sur cette opération, la marine (l’amiral Tavera notamment) joue le jeu ; elle fait prévenir les bâtiments de guerre espagnols qu’elle attaquerait tout navire qui intercepterait les bateaux en provenance de Bilbao et transportant des enfants, des femmes, des malades.
« Nous avions gagné, écrit Ceretti. La caravane flottante, escortée par la marine militaire française, put rejoindre les ports les plus rapprochés de la côte atlantique. »
Cette séquence montre que si la volonté avait été là, dès 1936, une autre politique que la « non-intervention » aurait été possible, efficace. Elle indique aussi que la position communiste d’aide à la République espagnole est alors largement partagée à gauche (les meetings de l’époque, communistes mais aussi socialistes, résonnent du mot d’ordre « Des canons, des avions pour l’Espagne ! ») ; cette position a l’oreille de toute une partie de l’opinion, elle trouve un écho dans certains milieux dirigeants de l’État. Comme le dit le ministre de l’Intérieur, l’État n’ordonna pas d’enquête sur « ces mouvements clandestins de bateaux ». On peut ajouter que l’aide discrète d’une partie de l’administration française, même de la haute administration, on pense notamment aux douanes, aux transports, sera importante pour permettre d’acheminer à travers tout le territoire, sans trop de complications, de l’armement militaire vers l’Espagne. 
Gérard Streiff

Disparition de Colette Flandrin-Dronne

Suite à la disparition de Colette Flandrin-Dronne, Mar y Luz Carino, fille d’un combattant de La Nueve, membre de Retirada 37 – association membre de Caminar – qui connaissait très bien Colette, a souhaité s’exprimer dans un texte que vous trouverez ci-dessous.

Le bureau de Caminar

C’est avec beaucoup d’émotion et une grande tristesse que j’ai appris le décès de Colette Flandrin-Dronne, la fille de celui qui est resté pour toutes et tous le capitaine de La Nueve, son père Raymond Dronne.

Fidèle et infatigable, Colette était toujours présente lors des commémorations ou divers évènements à Paris, Madrid, Ecouché ….

Pour évoquer les hommes de La Nueve, elle s’est toujours investie, en particulier auprès des jeunes, pour transmettre leur mémoire et leur combat.

Elle avait des souvenirs et des anecdotes qui les rendaient vivants.

Bien souvent, elle parlait plus des hommes de La Nueve que de son père, et ainsi elle pense avoir plus appris sur son père grâce à eux, en mettant toujours en avant le lien si particulier qui les unissait.

Elle était de ces personnes dont on pensait qu’elle serait toujours là pour eux.

Comme une évidence, presque toujours ses interventions se concluaient par : « Que voulez-vous, ils étaient ma famille ».

Elle va terriblement manquer aux descendants de cette famille.

Mar y Luz Cariño

A propos du film JOSEP, l’histoire amnésique

Le succès du film « Josep »remet en mémoire occultation de la révolution espagnole, le Poum dont Bartoli était un commissaire ,la propagande ,rouleau compresseur stalinienne.

Le film « Josep » que l’association 24 aout 1944 a présenté le 29 septembre, date de sa sortie sur les écrans en compagnie du réalisateur Aurel, « aux sept parnassiens », et qui a été sélectionné à Cannes, vient de recevoir le « Bayard spécial du jury » au festival de Namur. En quinze jours, il a enregistré 120 000 entrées. Chiffre considérable pour un film d’animation, sur un sujet quasi inconnu du public français : « La RETIRADA », du nom de l’épisode tragique de l’exil en France des républicains espagnols en 1939. Le catalan BARTOLI et ses dessins, reconnu mondialement, disparu en 1995, l’est tout autant, et cette découverte de l’homme, de l’œuvre, et d’une histoire oubliée ou volontairement tue, est le grand mérite d’Aurel et du scénariste de « Marius et jeannette » Jean Louis Milési .

Aurel a voulu, dit-il, partir d’un homme, et de son œuvre pour déboucher sur une page d’Histoire, qu’il ignore qu’il veut connaitre, et qu’ainsi il met au jour.
BARTOLI, dessinateur estimé est aussi un militant révolutionnaire. « LA RETIRADA » telle que nous la restitue Aurel, c’est son histoire, celles des 500 000 républicains espagnols réfugiés en France en janvier-février 1939, celle de la guerre d’Espagne et de la révolution.
Josep BARTOLI, commissaire politique du POUM (parti ouvrier d’unification marxiste) franchit les Pyrénées dans une colonne sous commandement anarchiste. Il fuit comme tous, les armées franquistes mais également parce que révolutionnaire et poumiste, les tueurs de la GPU, comme tous ses camarades de parti et bon nombre des militants « des amis de Durruti, » .Pour cela, il a dû rejoindre et s’y incorporer, l’armée dite régulière du gouvernement Négrin, exigée par Staline. Combattre les fascistes et être à l’abri d’un assassinat des hommes de main de Staline, nécessite de trouver un bataillon dont le commandement leur échappe, lui ce sera celui qui porte le nom du cénétiste, révolutionnaire ASCASO. C’est dans ses rangs qu’il entrera en France.

C’est la RETIRADA pour tous les républicains espagnols, mais leur lutte contre le fascisme n’est pas terminée, pour un grand nombre, ils la reprendront les armes à la main, dans les maquis, l’armée de Leclerc, la légion étrangère ou le

subiront dans les camps de la morts, quand prisonniers des allemands dans l’armée française, ils seront remis aux nazis et déclarés apatrides.

Pour tous, femmes enfants vieillards, ce seront, dès leur arrivée de ce côté des Pyrénées, les camps de concentration du gouvernement Daladier. Cependant qu’en Espagne se multiplient les bagnes, les exécutions, qu’on se prépare à assassiner plus de cent mille « rouges », souvent sans sépulture, comme en témoignent les centaines de fosses qu’on ne cesse encore de découvrir.

LA GUERRE D’ESPAGNE, LA REVOLUTION ? CONNAIT PAS

Pendant des dizaines d’années on a occulté la guerre d’Espagne, d’avantage encore la révolution

*La guerre au cinéma, quelques exceptions notables, « mourir à Madrid », « la guerre est finie »…

*La révolution : il a fallu attendre Ken Loach « Land and freedom », ( terre

et liberté).

*Le sort réservé aux 500 000 exilés, réfugiés en France, l’existence des camps de concentration de la troisième république de Daladier sur les plages et le long des Pyrénées (le camps du Vernet dans « la lie de la terre » d’Arthur Koestler). Au début des années 90, les travaux de Geneviève Dreyfus Armand..

*La retirada, une allusion lors d’hommages tardifs à Antonio Machado…

*La résistance : « le roman des Glières » de Véronique Salou, qui a eu le prix littéraire de la Résistance pour connaitre le rôle des républicains espagnols dans le maquis de Haute Savoie (2007).

L’histoire de la « nueve » composée de républicains espagnols sous le commandement du capitaine Dronne , de l’armée Leclerc , et qui arrive à paris Le 24 aout1944 , émerge peu à peu grâce à l’association « 24 aout 1944 » dont la présidente est Véronique Salou.

*L es 9000 républicains espagnols dont la quasi-totalité appartenant aux compagnies de travailleurs, sous commandement français et qui seront après les accords Pétain, Hitler,Franco déclarés apatrides et déportés à Mauthausen

Grace aux archives de la FEDIP, l’ouvrage en français et en espagnol de Pierre et Véronique Salou « les républicains espagnols dans le camp de concentration nazi de Mauthausen ».

L’HISTORIOGRAPHIE AMNESIQUE

Et puis la chape de plomb sur l’historiographie, qui obéit à la nécessité de ne pas traiter des raisons de la défaite, taire la révolution qui s’est dressée pour faire face au coup d’état fasciste.

Pendant des dizaines d’années les historiens, ont regardé ailleurs, trop avaient un fil à la patte et certains depuis 1936. Le souci qui domine, évacuer la révolution, est tellement partagé .La révolution, les collectivisations spontanées ont été au cœur de la prise de position pendant la guerre de trop de protagonistes, encore puissants. Il s’agit de ne pas en parler, car si par malheur elle avait été déterminante dans l’histoire de ce qu’on préfère appeler une guerre civile.

Il y a ceux qui dès le 19 juillet 1936, l’ont craint puis tuée. Et tout d’abord staline et les républicains de droite qui réussiront à s’imposer grâce à lui avec Négrin, le dernier président du conseil, quand la contre révolution prend le dessus et les responsables du POUM, et de la CNT, éliminés des centres de décisions du pouvoir central.

Et puis les fils spirituels des dirigeants des démocraties occidentales qui ne veulent pas chercher les raisons de la non intervention, socialistes, qui ont fait de Blum une icône, et radicaux ,mais aussi le parti communiste qui préfère qu’on laisse ,ignorée, la position de Staline favorable en 1936 à la non –intervention.

Paradoxalement les amis français de Franco qui présente le pronunciamiento comme une croisade, un sursaut de l’occident chrétien contre Moscou, dans une période où avec la guerre froide, il ne peut y avoir que deux camps, dont les capitales sont Moscou et Washington. Il convient donc de renforcer l’idée, comme dans la propagande franquiste, que les ennemis, les seuls combattants républicains étaient les communistes. Exit le POUM, la confédération nationale du travail (CNT), les anarchistes .Il n’y a jamais eu de révolution en Espagne. Cela convient à tout le monde.

CELA A COMMENCE DES 1937

Des 1937 la propagande stalinienne déroule le rouleau compresseur de sa puissante propagande. avec agents qui travaillent avec le NKVD comme l’envoyé spécial de l’Humanité en Espagne, Georges Soria qui deviendra après-guerre, un historien du mouvement ouvrier et de la Révolution française, au-dessus de tout soupçon. Il est à ce moment en 1937, le complice d’Alexandre Orlow, agent du NKVD (GPU) chargé d’éliminer les communistes anti staliniens ,et qui organisera l’assassinat d’Andreu Nin, le dirigeant du POUM en mai 1937.Il écrit une brochure contre le POUM, si évidemment mensongère qu’on lui préférera , le titre « l’espionnage trotskyste en Espagne. » Mais il faut quand même viser coute que coute le POUM, et il n’hésitera pas dans un des articles de « Ce soir » à l’intituler « le POUM organisation de terrorisme et d’espionnage au service de Franco »

CE SOIR : Staline a demandé à Thorez de produire un journal, grand public. Thorez en confie la direction à Aragon qui s’entoure des meilleures plumes, certaines honnêtes comme Louis Guilloux qui comprenant qu’il s’agit d’un instrument stalinien de propagande, s’en ira, mais discrètement, sans esclandre. Ce soir atteindra les 240000 exemplaires, distillant la vérité vraie, stalinienne aux militants ouvriers et a toute la très grande communauté espagnole, qui n’auront que le son de cloche sur ce qui se passe en Espagne , celui d’Aragon qui sait faire, il le prouvera quand il écrira « les communistes » et qu’ après Thorez qui l’aura traite de flic, il fera de Nizan un traitre. Tous les compagnons de route ne s’appellent pas Guilloux, même quand on est Malraux, tout le monde n’est pas Gide ou Panait Istrati. Les compagnons de route suivent .Il n’y aura donc chaque jour qu’une version officielle. Elle va perdurer des dizaines d’années. Que pourront cénétistes et poumistes après-guerre ?

Faute d’explication, on ne pourra que constater que la communauté espagnole aura intégré cette vérité sur la défaite, qui fait l’affaire de tout le monde « nous oui hélas, les espagnols on n’est bons qu’à se battre entre nous » Bref des immatures.

DONC CONCERNANT LE POUM, IL N’EXISTE PAS

Qui a accès à Orwell, Victor Serge, David Rousset, Daniel Guérin, Dos Passos, Marceau Pivert, Fred Zeller encore moins Benjamin Perret… qui a lu Arthur Koestler, et « la lie d la terre » et « le testament espagnol » décrété agent de l’impérialisme après « le zéro et l’infini » ?

Edgar Morin, après la résistance, attendra comme beaucoup d’autres 1956 Budapest et le rapport Kroutchev, il rencontrera le secrétaire des jeunesses du POUM Wilebaldo Solano dont il deviendra l’ami, pour accéder pleinement à cette histoire que les relais français de Staline, y compris à l’université, comme Soria auront tout fait pour occulter. Il faudra attendre Broué, Temine , leur histoire de la guerre et de la révolution en Espagne.

Le lien très fort entre la culture et la révolution continue à vivre porté comme en Espagne par le monde libertaire. Confiné, interdit d’expression grand public,

Ni lui ni le POUM n’ont d’existence visible. Hommage à la Catalogne d’Orwell devra attendre le film fidèle de Ken Loach « land and freedom ».

Qui connaissait le révolutionnaire du POUM, Bartoli, reconnu du monde des arts, comme l’était TOSQUELLES de celui de la médecine et de la psychiatrie ? Il faut du temps pour se libérer de la chape de plomb.

Tosquelles , est membre du POUM, il est catalan lui aussi de Reus dans la province de Tarragone, à deux pas du Vendrell d’Andreu Nin.

Frances Tosquelles, psychiatre, psychanalyste, est un des inventeurs de la psychanalyse institutionnelle. Membre du BOC, le bloc ouvrier et paysan de MAURIN, il participe à la création du POUM en septembre 1935. Quand en France on accueille les antis fascistes allemands ou d’Europe centrale en les enfermant dans des camps comme celui du Vernet où fut Koestler au début de la guerre, Barcelone en 1936 devient « une petite Vienne » Mais en même temps il combat dans les milices du POUM en Andalousie. Lors de la Retirada lui sera interné au camp de Septfonds en septembre 1939. Plus tard en Lozère, il dirige l’hôpital psychiatrique de San Alban où il développe sa pratique de la lutte contre l’aliénation sociale et les thèses de Lacan. C’est aussi un lieu de résistance. Il contribue à la formation de Frantz Fanon.

Ces hommes Bartoli, Tosquelles allient leur soif de culture et leur idéal révolutionnaire. Et ce n’est pas par hasard que Bartoli se retrouve au Mexique au sein du groupe Frida Kahlo, Rivéra, Vlady, le fils de Victor Serge, qui signe à la place de Trotsky , avec André Breton, « le manifeste pour un art révolutionnaire » . Pourquoi ? Parce que c’est le règne du « réalisme socialiste » entendons, stalinien et que pour reprendre l’expression de Victor Serge « il est minuit dans le siècle ».

Bartoli, Tosquelles, Orwell, Victor Serge, Benjamin Perret (le plus entêté, le plus fidèle, après Breton au surréalisme) .Le plus intransigeant aussi. En désaccord avec la direction du POUM, et de la CNT il préféra se battre et rejoindre la colonne DURRUTI, dans le bataillon « Makhno ».

L’art, la science, l’esprit au service de l’idéal révolutionnaire, on est forcément très loin du franquisme et du stalinisme et après la guerre du ronron social-démocrate qui va couvrir les camps qu’il a ouvert en 1939 d’Argeles ,de Septfonds, d’Agde, du Vernet…

LA REPRESSION CONTRE LE POUM, C’EST AUSSI LA DEFAITE DE LA CNT, LA CONTRE REVOLUTION VOULUE PAR STALINE, SOUHAITEE PAR LES REPUBLICAINS DE DROITE

Orwell ,engagé dans les combats sur le front d’Aragon, dans une colonne du POUM, après sa blessure découvre après les combats qu’ont menés vainement les comités d’ouvriers ,sur les barricades, le 4 mai 1937 pour défendre « la téléfonica » contre les gardes d’assaut gouvernementaux ,les communistes et les membres du PSUC encadrés par les agents de Staline, concrètement le reflux de l’esprit révolutionnaire .Les femmes désormais ne portaient plus de fusils écrit –il dans « hommage à la Catalogne », elle sont redevenues cantinières ou infirmières.

Fred Zeller, un moment secrétaire de Trotsky, et qui deviendra grand maître du Grand Orient écrit « Partout la révolution sociale accompagne la guerre civile. Pour écraser le fascisme, les travailleurs s’emparent des terres, des usines et les font marcher après avoir chassé les capitalistes et face au vieil état bourgeois, construisent leur propre état ouvrier » et il pose la question suivante « Quel était le programme politique de Staline-Négrin pour l’Espagne sinon restaurer la société capitaliste en torpillant la révolution ».

Alors bien sûr, ceux qui ne se plieront pas aux plans de Staline seront pourchassés et exterminés, ceux du POUM, de la CNT, de la FAI. Les comités ouvriers qui se sont spontanément créés dès le 19 juillet1936 doivent être démantelés, les terres et les usines collectivisées restituées dans le respect de la propriété privée.

Cette stratégie était dénoncée dans le journal du POUM, « la Batalla » le 15 novembre 1936 qui résume l’option de Moscou « ce qui intéresse vraiment Staline ce n’est pas le sort du prolétariat espagnol ou international, c’est la défense de son propre pouvoir, suivant la politique des pactes conclus par des états ,face à d’autres états et d’ailleurs le parti communiste espagnol, après avoir proclamé en mars 1936, « qu’il fallait lutter pour un gouvernement ouvrier et paysan, s’appuyant sur les alliances ouvrières et paysannes » En juin 1936déclare que son seul but est « la défense de l’ordre républicain dans le respect de la propriété »

Staline après s’être rallié dans un premier temps à la non-intervention de Paris et de Londres, comprend qu’une telle politique laisse le champs libre aux communistes anti- staliniens du POUM et aux anarchistes, et surtout à la révolution dont il ne veut à aucun prix.

Le PCE, pratiquement inexistant il lui faut démontrer qu’il maitrise le prolétariat espagnol.

L’envoi d’armes en quantité et qualité dérisoire, contre le rapt des neuf dixièmes des réserves d’or espagnol, l’Espagne possède à ce moment-là, la troisième des réserves mondiales, doivent lui procurer la sympathie du camp républicain complétement démuni.

Cette stratégie implique la main mise sur les rouages de l’Etat, et sur les brigades internationales qui se sont formées spontanément et qu’il doit diriger.
Marty entre autre sera à la hauteur de la tâche que contrôlent les agents envoyés par Staline. Il gagnera le surnom « de boucher d’Albacete ».Les talents d’oratrice de la pasionaria permettront de s’approprier une des plus belles des pages de la solidarité ouvrière et démocratique, la lutte héroïque en particulier des brigades dans la défense de Madrid.

Devant la réaction ouvrière et paysanne, les collectivisations, les premiers soviétiques engagés, pourraient espérer « un octobre espagnol »,ils seront perçus au moments ou se multiplient à Moscou ,les procès , comme d’éventuels opposants. Rappelés, ils seront fusillés.

Une politique qui convient à la bourgeoisie républicaine, aux sociaux-démocrates anglais et francais. Marceau Pivert propose à Blum de libérer Abd el Krim, assigné à résidence en France, pour soulever le Maroc espagnol, Blum refuse .David Rousset fait la même proposition au gouvernement espagnol et à Compagnys président de la généralité catalane. C’était la défaite assurée de Franco en le prenant en tenaille .Il reçoit la même réponse. Un tel soulèvement, serait insupportable aux anglais, ce serait un signal pour les colonies.

La stratégie de Staline ne peut que trouver un échos favorable chez la bourgeoise républicaine, prête a s’offrir, c’est ce que fera Négrin qui exigera après les évènement du 4 mai à Barcelone, des magistrats qui hésitent ,la condamnation des dirigeants du POUM, alors que des milliers de ses militants sont au front.

Staline n’a-t-il pas déjà déclaré le 20 mars1937, a la veille de l’attaque de « la téléfonica » et de la persécution des militants du POUM :

« Il faut dire au peuple et au monde entier : le peuple espagnol, n’est pas en état d’accomplir la révolution prolétarienne. La situation intérieure et surtout internationale n’est pas favorable »

Pourtant les collectivisations, au Levant, en Aragon, En catalogne, sur le plan économique, et commercial sont un succès total, productions et échanges sont supérieurs à ceux d’avant-guerre. Partout le pouvoir échappe au contrôle d’un parti ou d’un syndicat institué, partout la démocratie est directe. Dans les milices les officiers sont élus.

A partir de mai 1937, la répression va prendre les formes voulues par les envoyés de Staline. Andreu Nin est enlevé, par les tueurs d’Orlow, .A la question des militants du POUM, placardée sur les murs : « a donde esta Nin », la réponse des agents du Kominterm est « A Salamanca o à Berlin ». La torture doit obtenir que NIN dise qu’il est un agent nazi, selon la pratique employée contre Zinoviev et Kamenew. Pour justifier une répression totale et rapide du POUM.

Les mêmes calomnies qui pourvoient le goulag sont désormais ouvertement à l’œuvre en Espagne.

Quant aux collectivités, elles doivent résister aux assauts des agents gouvernementaux, et des responsables du parti communiste, c’est le cas en Aragon où le général communiste Lister, n’a de cesse de restituer les terres et les fabriques aux anciens propriétaires.

L’aliance Negrin –Staline peut enfin répondre totalement à ce que demandait Santiago Carillo dès janvier 1937 quand le POUM fut écarté du gouvernement de la généralité en Catalogne « les revendications révolutionnaires et socialistes constituent un obstacle pour l’unité de toute la jeunesse, les dirigeants du POUM sont des agents de Franco et de Mola .Il faut s’orienter vers la création d’une alliance nationale de la jeunesse espagnole, sans distinction de classe ni d’opinion.

Lors de la formation du gouvernement Négrin, « le Temps »indique la réelle signification de la chute du socialiste Largo Caballero au profit de Négrin et du bloc stalino-bourgeois : « le gouvernement de Valence (donc officiel) a atteint le point où il doit prendre une décision. Il ne peut plus longtemps demeurer dans l’ambiguïté dans laquelle, il s’est tenu jusqu’ici. Il doit choisir entre la démocratie et la dictature du prolétariat. Entre l’ordre et l’anarchie.

Jean Estivill

bibliographie

Louis Gil: George Orwell, de la guerre civile espagnole à 1984

Ma guerre d’espagne à moi de Mika Etchebehere (seule femme commandant de

milices , elle est du poum)

Antoine Gimenez, collect ,les « gimenologues » , Les fils de la nuit »

Libertalia

ma guerre d’espagne, les brigades internationales ,Sygmund Stein, seuil

(la mainmise sur les brigades par les staliniens et le GPU)

Bien sur G.Orwell qui fut dans les brigades : « hommage à la Catalogne » et le film de Ken Loach qui s’en est inspiré « Land and Freedom » terre et liberté

Pierre Broué et Emile Témine :la révolution et la guerre d’Espagne, 1961 Editions de Minuit

Godicheau ; la guerre d’Espagne : république et révolution en Catalogne

Wilebaldo Solano : Le POUM, Révolution dans la guerre d’Espagne Syllepses

Un témoignage : Guerre, exil et prison d’un anarcho syndicaliste CIPRIANO MERA ,les Coquelicots.

Les mouvements d’émancipation nationale d’ ANDREU NIN Syros

Julien Blanc « le temps des hommes » roman auto biographique ( sur l’engagement de l’immense écrivain, au côté de la république)

Et un formidable roman historique ,meilleure vente, plusieurs mois en Espagne en 2015 de Padura qui dévoile le parcours de Mercader l’assassin de Trotsky ,organisé par le GPU en Espagne des 1936 : « L’homme qui aimait les chiens »

Association 24 aout 1944

L’association 24 août 1944

Les cahiers du CTDEE, centre toulousain de documentation sur l’exil espagnol( treize numéros parus.

Les camps sur la plage,un exil espagnol Geneviève Dreyfus-Armand. Emile Témine .Autrement.