Miguel Campos « L’envoi de l’or à Moscou ne fut pas idéologique »

Cette question de l’or de Moscou est toujours sujette à polémiques. Faisons confiance aux historiens et mettons en débat ce thème avec toutes les avancées sur les dernières recherches. Merci à Eric pour son dernier article.
Miguel Campos vient de sortir un livre Armas para la Republica qui recentre le sujet sur la situation de l’époque par rapport à la non-intervention et ses conséquences. Cet article de Publico que j’ai traduit porte un nouvel éclairage sur l’Or de Moscou. Sa thèse de doctorat dirigée par Angel Vinas nous éclaire sur cette question
ci-dessous article en Français et en Espagnol
Si une traduction plus exacte ou des corrections peuvent être apportées n’hésitez pas
S y R
Luis
Miguel Campos « L’envoi de l’or à Moscou ne fut pas idéologique »

son livre : https://www.planetadelibros.com/libro-armas-para-la-republica/343864

L’historien nous renseigne sur les obstacles rencontrés par la République pour obtenir du matériel de guerre après le coup d’État et « l’absurde étranglement militaire » dicté par les puissances démocratiques, le Royaume uni et la France.

Barcelone
21 août 2022
Jose Oliva (EFE)

L’historien Miguel Campos reconstruit les efforts de la République pour surmonter jusqu’au mois de mai 1937 et « l’absurde étranglement militaire » dicté par les puissances démocratiques, le Royaume uni et la France, et donne des précisions sur l’envoi de l’or à Moscou qui ne fut pas « une décision aléatoire ou idéologique du gouvernement républicain » ;

La recherche de Campos, faisant partie de sa thèse de Doctorat, dirigée par Angel Viñas, a été reproduite dans le livre « Armes pour la République » (Critica) fruit de la consultation de plus d’une quinzaine d’archives espagnoles, françaises et mexicaines, certaines d’entre elles inédites, comme les archives personnelles de celui qui fut ambassadeur du Mexique à Paris, Adalberto de Tejeda.

Dans une interview à EFE, Campos rappelle que lors de l’éclatement du conflit en Espagne, Londres ne souhaitait pas que ce qui se passait en Espagne puisse dériver subitement en un conflit européen et ce, bien que « la France, si dans un premier temps était favorable à une intervention dans le conflit, les anglais lui font voir rapidement que si elle était entrainée dans un conflit avec l’Allemagne en raison de la question espagnole, elle resterait seule face à elle. »

ESCROQUERIES, TRAFIQUES ET PILLAGES DANS L’ACHAT DES ARMES

L’historien de Madrid soutient que les serviteurs de la République rencontrèrent des « difficultés pour rapatrier le matériel de guerre acheté clandestinement à certains pays » et de plus la République elle-même créa ses propres difficultés. « Aucune politique claire pour l’acquisition ne fut établie et se produisit alors la pagaille avec l’arrivée massive et dangereuse de commissionnaires de divers partis politiques , syndicats et des régions, particulièrement les basques et les catalans. »

Tous, ajoute-t-il «  se faisaient la concurrence entre eux, rendant plus difficiles les efforts des émissaires officiels, leur faisant perdre du temps en cherchant à les découvrir et surtout en faisant monter les prix ». Cette désorganisation conduisit à ce qu’ils furent à certains moments victimes d’escroqueries, de trafiquants et d’émissaires officiels qui s’enrichirent à leurs dépens. 

« Beaucoup de ces représentants républicains acheteurs d’armements n’avaient jamais vu un pistolet de leur vie et savaient d’autant moins mener des négociations dans le commerce des armes au marché noir et nombreux de ces principaux trafiquants avec lesquels ils firent affaire étaient des pronazis ou même avaient leurs quartiers d’opération en Allemagne, bien que ce qui fut encore plus triste et pathétique dans cette histoire est que les supposés défenseurs de la République profitèrent de la conjoncture et de leurs responsabilités pour s’enrichir. » souligne-t-il.

Entre ces escrocs « le cas le plus flagrant fut probablement celui du ministre du PSOE Angel Galarza, qui avec ses complices, déroba 20 millions de francs de l’époque ; et en Tchécoslovaquie, Juan Sanchez Quintana en collaboration avec le trafiquant Auerbach, comptant avec la protection de l’ex-ministre des Finances Gabriel Franco, de Izquierda Republicana (gauche républicaine), imaginèrent une opération pour se partager 11000 livres entre les trois et un certain Gobleman. »

Avec des exemples Campos illustre les opérations sabotées par des espions et des agents franquistes, par des diplomates dont certains passèrent dans le camps des factieux ou jouèrent le double jeu, comme l’ambassadeur de Paris au début du coup d’État, laissa filtrer dans la presse la demande la République provoquant ainsi un scandale médiatique dont le dénouement fut la non-intervention ; ou celui de Gaspar Sanz de Tovar, passé au camp des factieux, dont les tractations furent la clef pour ne pas obtenir des armes en Tchécoslovaquie

LES BANQUES INTERNATIONALES « TORPILLAIENT LES TRANSACTIONS »

L’auteur attribue les rares succès diplomatiques de la République pour recevoir de l’aide «  à la mauvaise planification qu’elle fit de ses intérêts sur la scène internationale. » tout spécialement en se satisfaisant de la dénommée non-intervention, ce dont se rendirent compte les diplomates mexicains qui défendirent les intérêts de la République à la Société des Nations et informèrent le président Cardenas de cette erreur. »

Sans que ce soit l’objet principal de sa recherche, Campos démontre par divers exemples que l’envoi de l’or de la Banque d’Espagne à Moscou se produisit « après plusieurs essais dans les banques britanniques, françaises et dans une moindre mesure, nord américaines, et il arrive à la conclusion, que les dites banques torpillaient au maximum les transactions républicaines. » Le seul espoir de rentrer des devises de la manière la plus opaque et rapide possible, continue Campos, étaient garantie par la Banque Commerciale pour l’Europe du Nord (BCEN) et pour cela l’argent devait être à Moscou.

Sans vouloir faire de l’Histoire-fiction, Campos pense que « si le blocus de la part des puissances démocratiques ne s’était pas produit de la part surtout de l’Angleterre et la France, il est très possible que le résultat du coup d’État et de la guerre aurait été autre, ainsi comme sa durée et son vainqueur, mais il ne faut pas oublier que Mussolini s’était engagé à appuyer le coup d’Etat avant qu’il n’éclate. »

Après cette recherche, Campos, professeur à l’Université Rey Juan Carlos, travaille avec le professeur Jose Manuel Azcona à un livre sur la Guerre civile en Amérique Latine.

Traducido por Luis

​ Miguel Campos: « El envío del oro de la República a Moscú no fue ideológico »
​ El historiador documenta las trabas de la República para conseguir material de guerra tras el golpe y el « absurdo estrangulamiento militar » dictado por las potencias democráticas Reino Unido y Francia.

BARCELONA

21/08/2022 17:56 ACTUALIZADO: 21/08/2022 19:04
JOSE OLIVA (EFE)

El historiador Miguel Campos reconstruye los esfuerzos de la República para superar hasta mayo de 1937 el « absurdo estrangulamiento militar » dictado por las potencias democráticas Reino unido y Francia llas potencias democráticas Reino Unido y Francila, y documenta que el envío del oro a Moscú no fue « una decisión aleatoria o ideológica del gobierno republicano ».

La investigación de Campos, que formó parte de su tesis doctoral, dirigida por Ángel Viñas, ha sido recogida en el libro Armas para la República (Crítica), fruto de la consulta de fuentes de más de una quincena de archivos españoles, franceses y mexicanos, algunos inéditas como el archivo personal del que fuera embajador de México en París, Adalberto de Tejeda.

En una entrevista con Efe, Campos recuerda que al estallar el conflicto de España, Londres no quería que lo que ocurriera dentro de España pudiera derivar en un conflicto europeo nuevamente y aunque « Francia sí estaba por la labor al principio de intervenir en el conflicto, los ingleses le hicieron ver rápidamente que si se veía envuelta en un conflicto con Alemania por la cuestion  Españolala cuestión española se quedaría solo ante ella ».

​ Estafas, tráfico y expolio en la compra de armas
El historiador madrileño reivindica a los servidores de la República que se encontraron con « la dificultad de sacar el material de guerra comprado clandestinamente de cualquier país » y además la propia República se creó sus propias dificultades: « No se estableció una política clara de adquisiciones y se produjo un descontrol con la llegada masiva y peligrosa de comisionados de diversos partidos políticos, sindicatos y regiones, especialmente los vascos y los catalanes ».

Todos ellos, añade, « se hacían la competencia entre sí, dificultando las gestiones a los emisarios oficiales, haciéndoles perder el tiempo en detectarlos y, sobre todo, encareciendo los precios ». Este desbarajuste les llevó en algún caso a ser víctimas de estafas, de traficantes y de emisarios oficiales que se enriquecieron a su costa.

« Muchos representantes republicanos para comprar armamento no habían visto una pistola en su vida y mucho menos sabían lidiar en el mercado negro y muchos de los principales traficantes con los que hizo negocios la República eran filonazis o incluso tenían sus bases de operaciones en Alemania, aunque lo más triste y patético de esta historia fueron los supuestos defensores de la República que aprovecharon la coyuntura y su cargo para enriquecerse », señala.

Entre los expoliadores, « el caso más flagrante fue probablemente el del ministro del PSOE Ángel Galarza, quien junto a sus compinches, supuestamente, robaron 20 millones de francos de la época; y en Checoslovaquia, de nuevo supuestamente, Juan Sánchez Quintanajunto con el traficante Auerbach, contando ambos con la protección del exministro de Hacienda Gabriel Franco, de Izquierda Republicana, idearon una operación para repartirse 11.000 libras entre los tres y un tal Goblemann ».
Ilustra Campos operaciones saboteadas por espías y agentes franquistas, y por diplomáticos que o se pasaron al bando sublevado o durante un tiempo jugaron a doble banda, como el embajador en París en los momentos iniciales del golpe, que filtró a la prensa la solicitud inicial de la República provocando con ello que estallara un escándalo mediático cuyo desenlace fue la no intervención; o el de Gaspar Sanz de Tovar, pasado al bando sublevado y cuyas gestiones fueron clave para que no consiguiera armas en Checoslovaquia.

​ Las bancas internacionales « torpedeaban las transacciones »
El autor atribuye el escaso éxito diplomático de la República para recibir ayuda a « la mala planificación que hizo de sus intereses en la escena internacional, especialmente acatando la denominada no intervención, de lo que se dieron cuenta los diplomáticos mexicanos que defendieron los intereses republicanos en la Sociedad de Naciones e informaron al presidente Cárdenas de ese error ».

Sin ser el objetivo principal de la investigación, Campos demuestra con varios ejemplos que el envío del oro del Banco de España a Moscú se produjo « tras realizar diversas pruebas en las bancas británica, francesa y, en menor medida, norteamericana, y llegar a la conclusión, que dichas bancas torpedeaban todo lo posible las transacciones republicanas ». La única esperanza de mover divisas de la manera más opaca y rápida posible, continúa Campos, las garantizaba la Banque Commerciale pour l´Europe du Nord (BCEN) y para ello el dinero tenía que estar en Moscú.
Sin querer hacer historia contraactual, Campos piensa que « si no se hubiese producido ese bloqueo por parte de las potencias democráticas, sobre todo Inglaterra y Francia, es muy posible que el resultado del golpe y de la guerra hubiera sido otro, así como el tiempo que hubiese durado (mucho menos), como quién salió victorioso, pero no se debe olvidar que Mussolini se había comprometido a apoyar el golpe antes de que estallara ».

Tras esta investigación, Campos, profesor visitante en la Universidad Rey Juan Carlos, está trabajando junto con el profesor José Manuel Azcona en un libro sobre la guerra civil en América Latina.

L’or de Moscou

Le 25 octobre 1936, 510 tonnes d’or de la Banque d’Espagne ont été expédiées à Odessa, puis à Moscou. À la fin de la guerre civile espagnole, le trésor de la Banque d’Espagne avait été liquidé. En 1994, Maria Dolors Genovés, directrice des programmes spéciaux de TV3, a réalisé pour cette chaîne de télévision régionale un précieux documentaire intitulé L’Or de Moscou, un travail d’investigation qui, pour la première fois, a donné accès à la documentation la plus secrète des archives de l’Armée rouge à Moscou.

Le terme “Oro de Moscou”, ou aussi “Oro de la República”, fait référence à l’opération de transfert de 510 tonnes d’or, correspondant à 72,6 % des réserves d’or de la Banque d’Espagne, de son dépôt à Madrid vers l’Union soviétique, quelques mois après le début de la guerre civile espagnole, ainsi qu’aux négociations ultérieures liées à sa vente à l’URSS. Les fonds obtenus ont servi à l’achat d’armement commandés pendant la guerre sur ordre du gouvernement de la Seconde République, présidé par Francisco Largo Caballero, et à l’initiative de son ministre des Finances, Juan Negrín. Le quart restant de la réserve de la Banque, soit 193 tonnes, a été transféré et converti en devises en France, une opération connue par analogie sous le nom d’Or de Paris.

L’or de Moscou

De María Dolors Genovés

Titre original “El oro de Moscu”

1994 – Espagne – 65′

Espagnol et catalan sous-titré en français

¡Solidarias!

Les volontaires étrangères et la solidarité internationale féminine durant la guerre d’Espagne (1936-1939)

Édouard Sill (dir.)

La participation des femmes étrangères durant la guerre civile (1936-1939) – et notamment celles qui s’engagèrent dans les Brigades internationales pour défendre la République et combattre le fascisme – n’avait fait l’objet jusqu’à présent que de très peu de travaux historiques. Il s’agit pourtant d’une dimension majeure de l’histoire de l’antifascisme et des engagements internationalistes féminins.

À l’initiative de l’ACER (Amis des combattants volontaires en Espagne républicaine) et de partenaires institutionnels et universitaires, l’ouvrage ¡Solidarias! met en valeur cette mobilisation solidaire, humanitaire, militaire et sanitaire de centaines d’étrangères. Organisé par thématiques, il couvre de nombreux aspects tels que les enjeux historiographiques du sujet, l’observation comparée des femmes dans les différents contingents de volontaires et l’engagement féminin au sein de la mobilisation transnationale autour de l’Espagne, ainsi que la partition des intellectuelles étrangères. Il est proposé ici une mise à jour essentielle de la recherche historique sur la place des femmes dans les solidarités antifascistes et de leur rôle dans le volontariat international.

Éditeur : Presses universitaires de Rennes Collection : Histoire Lieu d’édition : Rennes Année d’édition : 2022 Publication sur OpenEdition Books : 10 mai 2022 EAN (Édition imprimée) : 9782753582774 EAN électronique : 9782753587328 DOI : 10.4000/books.pur.162646 Nombre de pages : 252 p.
https://books.openedition.org/pur/162646?lang=fr#book-more-content-presentationfull

Sur Edouard Sill, à revoir : http://demainlegrandsoir.org/spip.php?page=article&id_article=1826

Exposition à Argeles sur Mer – La boîte rouge d’Antoni Campañà – Un trésor photographique de la Guerre d’Espagne (1936-1939).

Du 3 septembre au 29 octobre 2022 Galerie Marianne, espace Liberté (rue du 14 Juillet) à Argeles sur Mer. Ouverture : du mardi au samedi de 10h à 13h et de 14h à 18h. Entrée libre : Après l’exposition Robert Capa (automne 2021), le Mémorial du camp d’Argelès-sur-Mer vous invite à marcher dans les pas d’un autre photographe de la Guerre d’Espagne : Antoni Campañà. Du 3 septembre au 29 octobre, la Galerie Marianne exposera, pour la première fois en France, soixante-dix-sept tirages exhumés de deux boîtes rouges cachées par le photographe il y a quatre-vingt ans. Plus qu’une exposition, La boîte rouge d’Antoni Campañà est une chronique inédite de la Guerre d’Espagne. Un trésor photographique sorti de l’oubli : Antoni Campañà i Bandranas (1906-1989) fut un des plus grands photographes pictorialistes catalans. Républicain, catalaniste et catholique, ce photographe et photoreporter a renseigné au plus près les trois années de guerre en Catalogne, en travaillant notamment pour la presse anarchiste puis comme chauffeur pour l’armée de l’air. Après toute cette tourmente, traumatisé par la guerre, Antoni Campañà va volontairement enfouir cette œuvre, la dérober à toute vue, sans la détruire. Ce n’est qu’en 2018 que sa famille découvre près de 5 000 photographies dans deux boîtes rouges, bien cachées depuis de près de 80 ans dans sa maison barcelonaise. Cette collection couvre tout le cycle de la guerre à Barcelone et en Catalogne républicaine : depuis le coup d’État raté et la révolution anarchiste de 1936,jusqu’à la victoire de Franco et aux empreintes de la Retirada sur les routes de l’exil vers la France en 1939. À voir, pour la première fois en France, à Argelès-sur-Mer : Soixante-dix-sept de ces tirages d’une grande force graphique et historiographique sont à découvrir pour la première fois en France, à Argelès-sur-Mer. Coordonnée par l’historien Arnau Gonzàlez i Vilalta et Antoni Monné Campañà, neveu du photographe, cette exposition montre différents aspects de la guerre et offre un regard inédit sur l’un des conflits majeurs du XXe siècle qui fut à la fois un déluge de feu et d’images. Une chronique de cette société catalane, essentiellement barcelonaise, qui a sombré au milieu des utopies et des drapeaux contradictoires, à “lire” sur les cimaises de la Galerie Marianne, du 3 septembre au 29 octobre. Vernissage et chants de l’exil espagnol, le 2 septembre : Vendredi 2 septembre, à 18h à la Galerie Marianne : inauguration de l’exposition et tour de chants dans les pas de l’exil espagnol par la chorale Les Voix Libres.

Source : https://www.le-journal-catalan.com/exposition-a-argeles-sur-mer-la-boite-rouge-dantoni-campana-un-tresor-photographique-de-la-guerre-despagne-1936-1939/111145/?fbclid=IwAR2InmnHztVWA5uPloPssaYonHc_97iqFYc06RaTynMwah2LfrPnqia-t_s

Fosses communes

La carte ci-dessous indique l’emplacement des fosses communes où furent jetés les corps de centaines de milliers d’Espagnols antifranquistes, républicains, anarchistes, socialistes, communistes.

On mesure ainsi l’ampleur du majuscule crime commis après la victoire des militaires factieux et des bandes fascistes à leur côté, d’autant que quatre-vingt-trois ans après la fin de la guerre civile, toutes les fosses communes du pays n’ont pas été mises au jour. Il paraît que seul le Cambodge des Khmers rouges en compte davantage. En Espagne, les assassins n’ont jamais eu à rendre de comptes.
https://florealanar.wordpress.com/2022/07/03/fosses-communes/

Sur les fosses ce site du ministère de la justice permet des recherches sur les fosses, sur les victimes par nom par comunidad. C’est un outil utile pour tous ceux qui recherchent des familles : https://www.mpr.gob.es/memoriademocratica/mapa-de-fosas/Paginas/index.aspx

Ce révisionnisme qui veut blanchir le génocide du dictateur Francisco Franco

À la suite de la parution dans Le Figaro Histoire d’un entretien avec Pio Moa, auteur des Mythes de la Guerre d’Espagne, Emilio Silva Barrera, Président de l’Association pour la Récupération de la Mémoire Historique en Espagne (ARMH), nous a adressé le texte suivant.

Pendant de nombreuses années après le retour de la démocratie, il n’y a pas eu de débat dans la société espagnole sur les conséquences des violations des droits humains par la dictature. Les élites du franquisme, qui le sont restées sous la démocratie, ont gagné leur impunité grâce à une Loi d’amnistie, et elles ont établi un nouveau modèle de démocratie dans lequel les institutions de l’État sont devenues des fabriques d’ignorance pour occulter ce passé.

Pendant les vingt-cinq années qui ont suivi la mort du dictateur, le Parlement espagnol n’a pas débattu des crimes du franquisme. Les manuels scolaires occultaient l’histoire de la dure répression de la dictature. Et tout ce silence négationniste a fait survivre dans l’imaginaire collectif le récit franquiste, qui justifiait la nécessité qu’un général fasciste fasse un coup d’État et attaque violemment le pouvoir avec l’aide des armées de Hitler et Mussolini.

Pendant la transition, on a appelé « réconciliation » le fait d’occulter le passé, de laisser les fascistes normaliser leur présence dans la vie démocratique et de laisser les victimes sans justice ni réparation.

Le passé semblait clos et résolu, sans dettes en suspens. Mais en 2000, dans un fossé du village de Priaranza del Bierzo, un groupe d’archéologues et de médecins légistes a commencé à exhumer les corps de treize civils républicains assassinés par des fascistes le 16 octobre 1936. C’est à ce moment que sont nés l’Association pour la Récupération de la Mémoire Historique et un mouvement social qui a commencé à dénoncer les crimes de la dictature. Ce fut une petite fissure dans un gigantesque mur d’impunité.
N’importe quel assassinat, attentat terroriste ou délit violent commis pour des motifs politiques contre la République depuis son premier jour d’existence était déclaré légal.

C’est ainsi que s’est mis en marche un mouvement citoyen pour rechercher les disparus de la répression franquiste. Les images des fosses communes ont commencé à circuler dans les médias, des personnes qui ne connaissaient pas ces faits se sont indignées en en prenant connaissance et d’autres, qui les avaient vécus mais qui, par peur, s’étaient tues, ont commencé à en parler.

Face à cette preuve physique, scientifique de la répression, les mouvements de la droite espagnole liés au franquisme avaient besoin d’apporter une réponse, parce que le récit monolithique imposé pendant la transition se fissurait. Et comme ils ne pouvaient attaquer ni les enfants, ni les petits-enfants de ces républicains assassinés, enterrés loin de cimetières et avec des impacts de balle dans les os, ils ont décidé de reconstruire le récit franquiste sur le plan éditorial, médiatique et culturel.

Deux auteurs, César Vidal et Pío Moa, sont devenus les principaux défenseurs et diffuseurs de l’explication franquiste : la guerre était de la faute de la révolution des mineurs de 1934 ou de cette secrète intention du gouvernement de la République de vendre l’Espagne à Staline pour en faire une république soviétique.

Mais le fait est que le dictateur Francisco Franco a signé dans le Bulletin officiel de l’État l’explication de ce qu’il s’est passé. Il s’agit de la Loi du 23 septembre 1939 qui considérait comme non délictuelles les actions menées entre le 14 avril 1931, jour de la proclamation de la Seconde République, et le 18 juillet 1936, jour de son coup d’État. Les actes que Franco ne considérait pas comme des délits étaient : n’importe quel délit contre la Constitution, contre l’ordre public, les infractions à la Loi sur la détention d’armes et d’explosifs, les homicides, les coups et blessures, les menaces et les contraintes commises par des personnes dont il était attesté que leur idéologie coïncidait avec celle du Mouvement national. C’est-à-dire que n’importe quel assassinat, attentat terroriste ou délit violent commis pour des motifs politiques contre la République depuis son premier jour d’existence était déclaré légal.
Apartheid espagnol

L’objectif de Franco n’était pas de mettre de l’ordre mais de maintenir une structure sociale quasi médiévale, avec un taux extrêmement élevé d’analphabétisme et un modèle d’exploitation des travailleurs inhumain et très avantageux pour les grands propriétaires du pays, y compris l’Église catholique.

Le phénomène du révisionnisme a bénéficié d’énormes soutiens médiatiques, parmi lesquels la télévision publique sous le gouvernement de José María Aznar. Mais le mouvement pour la récupération de la mémoire a continué d’exhumer des fosses, a dévoilé des milliers d’assassinats, a impliqué les Nations Unies et a fait de millions d’Espagnols des témoins de ces crimes.

À la fin de la guerre, Franco a récupéré les cadavres de « ses » morts, donné réparation à leurs familles avec des bourses scolaires, des pensions spéciales, des postes de fonctionnaire à vie, une reconnaissance sociale et tout le soutien économique. Mais on n’a pas laissé les familles qui n’ont pas soutenu le coup d’État chercher leurs morts. On leur a confisqué leurs biens sous la menace des pistolets et on a créé un apartheid espagnol où les défenseurs du fascisme avaient des droits et des avantages sociaux. Tandis que les familles antifascistes n’avaient d’autre choix que de travailler au service des vainqueurs, vivre dans la misère ou émigrer, comme l’ont fait près de deux millions de personnes de familles républicaines qui ont émigré dans les années 1950 et 60.

Franco a fait disparaître au moins 114 226 civils ; il a créé 300 camps de concentration, l’un d’eux spécifiquement pour les homosexuels ; il a fait appliquer des électrochocs aux lesbiennes pour les guérir de leurs perversions ; il a volé des bébés aux prisonnières républicaines sur les théories d’un psychiatre, Antonio Vallejo Nájera, qui a mené des recherches sur la transmission d’un prétendu gène marxiste ; même lorsqu’il a acheté les premiers vaccins contre la poliomyélite, c’était seulement pour les enfants des vainqueurs

Il faut comprendre la publication en France d’ouvrages qui justifient la dictature franquiste, la nécessité de son coup d’État et qui cherchent à humaniser le fascisme comme un phénomène européen. L’extrême droite cherche un récit du passé qui ne fasse pas peur et qui explique que les vieux fascismes ont été utiles pour sauver l’Europe. L’ombre ravivée du fascisme voyage dans les pages de livres, dans des programmes électoraux et s’étend dans des villes, des médias et des Parlements.

Le révisionnisme espagnol justifie la dictature de Franco en affirmant que les autorités de la République étaient en dehors de la légalité. Mais ce qu’a réellement fait le gouvernement de la République a été de construire des milliers d’écoles pour combattre l’analphabétisme, séparer l’Église de l’État, organiser des élections démocratiques au suffrage universel masculin et féminin, avoir des gouvernements de gauche et de droite, légaliser le divorce, avoir la première femme ministre ou apporter la culture dans le dernier village du territoire espagnol pour améliorer le pays.

C’est en Espagne qu’a eu lieu la première grande victoire militaire du fascisme européen. C’est là que les armées de Franco, Hitler et Mussolini ont commencé leur route pour essayer d’entraîner le monde vers leur enfer. Certains veulent laver leur image pour ouvrir de nouvelles voies vers le fascisme. Tandis qu’il y a en Espagne 114 226 civils disparus à cause de la violence franquiste et qu’aucun responsable de ces crimes n’a jamais été jugé.

Les personnes qui ont bâti la Seconde République modernisaient le pays. L’Espagne a fait sa transition démocratique dans les années 30, au siècle dernier. Les personnes qui ont lutté contre Franco voulaient défendre cette démocratie. Les républicains espagnols qui ont fui l’Espagne de Franco ont continué leur lutte pour la démocratie sur le sol français, en faisant partie de la Résistance et des forces qui ont libéré Paris du nazisme. Leurs corps sont enterrés du nord de la Norvège jusqu’au sud de la France.

Ceux qui veulent laver l’image de Franco ont besoin de délégitimer la République. Mais cela fait des années que nous voyons leurs crimes dans des milliers d’os, de vies brisées et de civils assassinés dans des fossés. Le récit qui veut adoucir le fascisme cherche à tracer un chemin et les seuls chemins qui respectent la diversité et protègent les droits passent par le territoire de la démocratie.

Emilio Silva Barrera, petit-fils d’un civil disparu, victime de la répression fasciste en Espagne, Président de l’Association pour la Récupération de la Mémoire Historique (ARMH).

Ils ne passeront pas !

Après leur avoir donné le soutien de sa division azul, le régime franquiste a recyclé des anciens nazis qui ont résidé tranquillement jusqu’à leur mort sur la Costa Brava.

Il a recyclé des dignitaires pétainistes dont le plus célèbre était Darquier de Pellepoix, commissaire général aux questions juives sous l’occupation en France.
Il a recyclé les anciens de l’O.A.S, organisation criminelle créée grâce au soutien de Franco le 11 février 1961 à Madrid.

Voilà que maintenant la France des Droits Humains, après avoir connu au cours de sa dernière campagne présidentielle la tentative de réhabilitation de Pétain par un triste personnage qui se prétendait historien qualifié, voit le groupe de presse qui l’avait promu tenter la même opération avec les auteurs du coup d’État du 18 juillet 1936.

Le 20 novembre 2002 le congrès des députés espagnol, à majorité P.P, a condamné à l’unanimité ce coup d’État.

Le parlement européen a fait de même le 17 mars 2006.

En recyclant un pseudo historien de la guerre d’Espagne, le quotidien Le Figaro prend une lourde responsabilité et donne une publicité indécente à la thèse révisionniste selon laquelle le coup d’État du 18 juillet 1936 « n’était qu’une réaction de légitime défense face au chaos» ( https://www.huffingtonpost.fr/politique/article/le-figaro-accuse-de-revisionnisme-sur-franco-par-ces-politiques-et-historiens_206516.html ).

Personne en Espagne n’accorde le moindre crédit à l’auteur de ces propos qui est totalement déconsidéré dans les milieux de la recherche historique.

Pourquoi chercher à lui donner en France une audience qu’il a définitivement perdue dans son pays d’origine ?

Nous devons face à cette triste opération conserver à l’esprit le « Plus jamais ça » que nous ont légué nos amis et nos proches qui ont vécu ces périodes historiques.

Ils ne sont plus là pour témoigner et les forces de la haine et de l’exclusion y voient l’occasion, en profitant de la banalisation et de l’oubli que permet le temps passé, de renverser les digues que les démocraties ont érigées contre le fascisme et l’extrême droite.

Ils ne passeront pas !

Coordination Caminar