A Luna-Park, Blum tente de justifier aux militants sa politique de non intervention en Espagne

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Ce discours prononcé par Léon Blum le 6 septembre 1936 à la fête commémorative de la République organisée par la fédération de la Seine au stade de Luna Park (sur l’emplacement actuel de la Porte Maillot – Paris 17è) a été publié dans Le Populaire le lendemain. Il a, quelques semaines plus tard, été diffusé sous forme de brochure sous le titre Les événements d’Espagne (Imprimerie du commerce et des postes, Paris, 1936, 19 p, au prix de 0,30 F). Comme il le dit d’entrée, Léon Blum s’est invité à cette manifestation pour répondre aux interrogations de ses camarades sur sa politique. Son intervention garde encore une grande puissance d’émotion. 

Blum intervient en tribun, discours emphatique propre aux politiciens de la IIIè République.  Le discours dure environ 50 minutes. Une source « première » pour comprendre le dilemme de Blum.

Un extrait audio (12′) :

http://fresques.ina.fr/jalons/fiche-media/InaEdu02043/a-luna-park-blum-tente-de-justifier-aux-militants-sa-politique-de-non-intervention-en-espagne.html

Transcription fidèle et intégrale de cette brochure de 19 pages.


Léon Blum et les événements d’Espagne
Luna Park, le 6 septembre 1936
Publié dans Recherche socialiste 6 septembre 2006 p. 75-83 (d’après la brochure Les événements d’Espagne, 1936).

Je n’étais pas inscrit au programme de cette fête. C’est moi qui, hier soir, à la fin d’une assez dure journée et après m’être entretenu avec nos camarades délégués des usines métallurgiques de la région parisienne, ai pris le parti soudain de demander à la fédération socialiste de la Seine de m’accorder aujourd’hui son hospitalité. Je m’étais entretenu avec nos camarades des usines. J’éprouvais le besoin de m’entretenir ensuite avec mes camarades et mes amis de la fédération.

Je n’ai pas besoin de vous dire longuement maintenant pourquoi. Je ne ferme pas les yeux, croyez-le bien, à la réalité. Je ne voulais pas laisser s’installer un malentendu cruel entre le gouvernement de Front populaire que je préside, et une partie tout au moins des masses ouvrières sans m’expliquer, parce que je ne veux à aucun prix le laisser subsister. 

 

CHEF DE GOUVERNEMENT ET MILITANT

On se demandera peut-être si je parle en qualité de chef du gouvernement ou en qualité de militant socialiste. Qu’on se pose ailleurs la question, si l’on veut, mais pas ici. Du reste, je vous avoue que je n’arrive pas à distinguer très bien en ce qui me concerne entre les deux qualités.

En tant que chef du gouvernement, je ne pourrai pas bien entendu vous dire ici plus que je pourrai dire ailleurs. Comme militant, il n’y a pas une seule de mes pensées que j’entende aujourd’hui dissimuler. 

Tout d’abord, je vais vous poser une question que chacun de vous pourrait se poser à lui-même. Est-ce qu’il y a ici un seul homme, en accord ou en désaccord avec moi sur la question que je vais traiter, qui croit que j’ai changé depuis trois mois ?

 

« JE N’AI PAS CHANGE »

Trois mois d’exercice du pouvoir auraient-ils fait de moi un homme autre que celui que vous connaissez depuis tant d’années ? Car, il y a trois mois aujourd’hui même que nous nous sommes présentés devant les Chambres.

Et je vous assure que ces trois mois me paraissent à moi, en ce moment, aussi longs que je ne sais combien d’années, non pas peut-être seulement par l’œuvre accomplie, mais parce que cette suite de jours sans répit et de nuits sans sommeil font trouver la course du temps étrangement lente. 

Vous savez bien que je n’ai pas changé et que je suis toujours le même. Est-ce que vous croyez qu’ici il y a un seul de vos sentiments que je n’éprouve pas et que je ne comprenne pas?

Vous avez entendu l’autre soir, au Vélodrome d’hiver, les délégués du Front populaire espagnol ; je les avais vus le matin même. Croyez-vous que je les aie entendus avec moins d’émotion que vous ? (Applaudissements)

 

« QUAND JE LISAIS LES DÉPÊCHES… »

Quand je lisais comme vous dans les dépêches le récit de la prise d’Irun et de l’agonie des derniers miliciens, croyez-vous par hasard que mon cœur n’était pas avec eux ? Et est-ce que vous croyez, d’autre part, que j’ai été subitement destitué de toute intelligence, de toute faculté de réflexion et de prévision, de tout don de peser dans leurs rapports et dans leurs conséquences les événements auxquels j’assiste ?

Vous ne croyez rien de tout cela, n’est-ce pas ?

Alors? 
Si j’ai agi comme j’ai agi, si j’agis encore comme j’estime qu’il est nécessaire d’agir, alors il faut qu’il y ait des raisons à cela, il faut bien qu’il y ait tout de même à cette conduite des motifs peut-être valables. Je les crois en tout cas intelligibles. 

 

« JE NE VOUS DEMANDE PAS UNE CONFIANCE AVEUGLE »

Je ne vous demande pas une confiance aveugle, une confiance personnelle. Mais cette confiance, du fait de ma constance avec moi-même, du fait de ma conscience de militant et de cette faculté, après tout, de jeter sur les événements un regard empreint de quelque clairvoyance raisonnable, cette double confiance, je crois que vous pouvez tout de même l’avoir pour moi.

Alors, ces motifs ? Dans toute la mesure où cela est possible, je veux essayer de vous les faire comprendre maintenant, vous parlant face à face, moi chef du gouvernement, et vous militants du Front populaire. (Applaudissements)

Vous pensez bien qu’aucun des arguments qui vous sont familiers ne m’échappe.

 

L’INTERET NATIONAL DE LA FRANCE

Je sais très bien, en cette affreuse aventure, quels souhaits doivent nous imposer l’intérêt national, l’intérêt de notre pays, en dehors de toute espèce d’affinité ou de passion politique. Je suis obligé ici de mesurer mes mots, et vous le comprendrez.

Je sais que le maintien du gouvernement légal de la République espagnole garantirait à la France, en cas de complications européennes, la sûreté de sa frontière pyrénéenne, la sûreté de ses communications avec l’Afrique du Nord et, sans que je me permette aucune prévision sur un avenir que nul ne connaît exactement, je peux pour le moins dire que du côté du gouvernement militaire, il nous est impossible de prévoir avec certitude quelles seraient ou les obligations ou les ambitions de ses chefs. 

Je dis que d’un côté, il y a pour nous une sécurité et, de l’autre, qu’il subsiste pour le moins un risque.

 

L’INTERET IMMEDIAT DE LA FRANCE

Quiconque se place au point de vue de l’intérêt immédiat du pays doit sentir cela et je le sens comme chacun de vous. Et, si quelque chose aujourd’hui doit être aux yeux de tous un affreux scandale, c’est que cet intérêt évident de la France ait été à tel point méconnu par une presse partiale jusqu’au crime et jusqu’à la trahison (applaudissements), faisant passer par-dessus tout certain esprit personnel de représailles ou certain égoïsme collectif de classe. Je ne veux pas chercher les mobiles qui, d’ailleurs, diffèrent selon les individus. Je ne sais pas comment, dans d’autres pays, cette campagne aurait été accueillie, ni jusqu’à quel endroit précis elle aurait pu conduire leurs auteurs ?

Dès la rentrée des Chambres, nous tâcherons de trouver le moyen de mettre fin à cela. (Applaudissements)

Mais, sur le fond des choses, je le répète, je n’ai pas plus de doute que vous. 

 

LE DROIT PUBLIC

La question du droit public n’est pas plus douteuse que la question de l’intérêt direct et national de la France.

Comme nous l’avons dit nous-mêmes dans un document public, le gouvernement constitué par le président de la République Azaña, conformément aux directions tracées par le suffrage universel consulté, est le gouvernement régulier d’une nation amie.

Quand il s’agit de ces mots : gouvernement légal, gouvernement régulier, j’aime mieux y ajouter, quant à moi, les mots ou la formule de « gouvernement issu du suffrage universel et correspondant à la volonté et à la souveraineté populaires ». 

Car, camarades, je ne veux chercher que dans notre propre Histoire. Notre Histoire de France nous enseigne que certains gouvernements, en dépit de la légalité formelle, ont pu ne pas représenter exactement la volonté et la souveraineté populaires et que peut-être cette volonté et cette souveraineté résidaient plus exactement dans les mouvements qui les ont renversés.

 

PAS DE DOUTE LA-DESSUS

Je peux aussi vous signaler qu’en Espagne le gouvernement légal est en face d’une rébellion militaire. Mais je m’adresse ici à votre imagination, pas à autre chose qu’à votre imagination. Vous pourriez, à la rigueur, concevoir des cas où, contre tel gouvernement, qui n’existe pas, mais qui pourrait exister, comme tel gouvernement disposant de la légalité formelle, un mouvement militaire pourrait recueillir et attirer et justifier vos sympathies profondes. Par conséquent, employons de préférence les formules dont je me suis servi : gouvernement issu du suffrage universel, gouvernement répondant à la volonté et à la souveraineté populaire, selon la règle des majorités qui est la loi dernière des démocraties.

Pas de doute là-dessus. Pas de doute que si nous nous plaçons sur le terrain strict du droit international, du droit public, seul le gouvernement légal aurait le droit de recevoir de l’étranger des livraisons d’armes, alors que ce droit devrait être refusé sévèrement aux chefs de la rébellion militaire. (Applaudissements) 

Oui, vous avez raison de m’applaudir, mais je crois que vous aurez raison aussi d’écouter et de méditer les paroles que je vais ajouter. Dans la rigueur du droit international, si c’est une rigueur qu’on invoque comme on l’a fait dans un grand nombre d’ordres du jour dont le gouvernement a été saisi, laissez-moi vous dire que le droit international permettrait demain aux gouvernements qui jugeraient cette mesure commode, de reconnaître comme gouvernement de fait la junte rebelle de Burgos, et qu’à partir de cette renaissance de fait, sur le terrain du droit international (terrain moins solide que vous ne le pensez) des livraisons d’armes pourraient être faites à ce gouvernement rebelle aussi bien qu’au Gouvernement régulier.

 

« CELA EST CONTRAIRE AU DROIT INTERNATIONAL »

Cette reconnaissance de fait, il y a eu des moments où elle a paru possible, dans certaines éventualités ; elle le deviendrait encore demain. En tout cas, dans la réalité des choses, tout s’est passé comme si certaines puissances avaient reconnu le Gouvernement rebelle comme un Gouvernement de fait et s’étaient jugées en droit de livrer des armes à ce soi-disant Gouvernement de fait aussi bien que d’autres pouvaient le faire au Gouvernement régulier. 
Vous me dites : « Cela est contraire au droit international. » Peut-être. Pour assurer alors l’observation stricte du droit international, que d’ailleurs il devient si aisé de tourner, quel autre moyen auriez-vous que la force ?

Quel autre moyen auriez-vous vu que la sommation, que l’ultimatum, avec toutes ses conséquences possibles ?

 

CE QUE CHACUN SOUHAITE

Camarades, je vous parle gravement, je le sais, je suis venu ici pour cela. Je sais bien ce que chacun de vous souhaite au fond de lui-même. Je le sais très bien. Je le comprends très bien. Vous voudriez qu’on arrivât à une situation telle que les livraisons d’armes puissent être faites au profit du gouvernement régulier et ne puissent pas l’être au profit des forces rebelles. Naturellement, vous désirez cela. Dans d’autres pays, on désire exactement l’inverse.

Je vous le répète, c’est bien ce que vous pensez, j’ai traduit votre pensée ! Mais vous comprenez également qu’ailleurs on veuille agir de telle sorte que les rebelles soient munis sans que le gouvernement régulier reçoive quelque chose.

Alors, à moins de faire triompher la rigueur du droit international par la force et à moins aussi que l’égalité même sur le plan du droit international ne soit rétablie par la reconnaissance de fait, alors ? Devant quelle situation se trouve-t-on ? N’espérez dans la possibilité d’aucune combinaison qui, sur le plan européen, permette d’assister les uns, sans qu’on assiste par contre les autres. 

 

LA CONCURRENCE DES ARMEMENTS

Demandez-vous aussi qui peut fournir dans le secret, par la concentration des pouvoirs dans la même main, par l’intensité des armements, par le potentiel industriel, comme on dit ; demandez-vous aussi qui peut s’assurer l’avantage dans une telle concurrence. Demandez-vous cela ! Une fois la concurrence des armements installée, car elle est fatale dans cette hypothèse, elle ne restera jamais unilatérale. Une fois la concurrence des armements installée, sur le sol espagnol, quelles peuvent être les conséquences pour l’Europe entière, cela dans la situation d’aujourd’hui ?

Et alors, si ces pensées sont maintenant suffisamment claires et suffisamment présentes devant votre esprit, ne vous étonnez pas trop, mes amis, si le gouvernement a agi ainsi. Je dis le gouvernement, mais je pourrais aussi bien parler à la première personne, car j’assume toutes les responsabilités. (Vifs applaudissements)

 

LE GOUVERNEMENT SOLIDAIRE

Au nom du gouvernement que je préside, je n’accepte pas d’exception de personne ou d’exception de parti. Si nous avons mal agi aujourd’hui, je serais aussi coupable en ayant laissé faire qu’en le faisant moi-même ; je n’accepte pas ces distinctions… 

Ne vous étonnez pas si nous sommes venus à cette idée. La solution, ce qui permettrait peut-être à la fois d’assurer le salut de l’Espagne et le salut de la paix, c’est la conclusion d’une convention internationale par laquelle toutes les puissances s’engageraient, non pas à la neutralité – il ne s’agit pas de ce mot qui n’a rien à faire en l’espèce – mais à l’abstention, en ce qui concerne les livraisons d’armes, et s’engageraient à interdire l’exportation en Espagne du matériel de guerre.

Nous sommes donc arrivés à cette idée par le chemin que je vous trace, chemin sur lequel nous avons connu, je vous l’assure, nous aussi, quelques stations assez cruelles. Je ne dis pas que nous n’ayons pas commis d’erreurs, je ne veux pas nous laver de toute faute possible. Qui n’en commet pas ?

 

LE 8 AOUT

 Le 8 août, nous avions, en conseil des ministres, décidé de suspendre les autorisations d’exportations au profit du gouvernement régulier d’une nation amie. C’étaient les termes mêmes de notre communiqué officiel. Nous l’avons fait, nous avons dit pourquoi, en espérant par cet exemple piquer d’honneur les autres puissances et préparer ainsi la conclusion très rapide de cette convention générale qui nous paraissait le seul moyen de salut.

Seul moyen de salut ? Excusez-moi, je ne voudrais pas que les paroles que je vais prononcer puissent sembler cruelles ou amères à mes amis d’Espagne qui, je le sais, et je ne m’en étonne pas, jugent quelquefois notre conduite avec dureté ; cela est naturel. Je ne voudrais pas avoir l’air d’apprécier ici mieux qu’eux leurs intérêts propres et les intérêts de leur pays.

Mais nous avions pensé, c’était notre conviction, que même pour l’Espagne, au lieu d’ouvrir une lutte et une concurrence nécessairement inégale, la conduite finalement la meilleure, celle qui contenait le secours le plus réel était d’obtenir cette sorte d’abstention internationale qui, alors, malgré l’inégalité criante et blessante du départ, aurait permis malgré tout à la volonté nationale, à la souveraineté nationale de reprendre et d’assurer peu à peu sa prévalence. Nous l’avions fait pour cela, et nous l’avions fait pour éviter des complications internationales dont la gravité et l’imminence ne pouvaient pas nous échapper. 

 

UNE INJUSTICE QUI A FAIT SOUFFRIR

Il en est résulté que, pendant un trop long temps, beaucoup plus long que nous l’avions prévu, beaucoup plus long que nous ne l’aurions voulu, en raison de cette offre peut-être trop confiante, nous nous sommes trouvés, nous, les mains liées, tandis que les autres puissances gardaient juridiquement, gardaient politiquement, jusqu’à ce que leurs engagements fussent souscrits, jusqu’à ce que les mesures d’exécution fussent promulguées, l’aisance que nous nous étions interdite à nous mêmes. C’est cette injustice, cette inégalité qui vous a fait souffrir comme nous pouvions en souffrir nous-mêmes.

Mais, malgré tout, sans vouloir défendre chacun de nos actes – car, encore une fois, j’en prends la responsabilité entière, j’admets que sur tel ou tel point on me blâme –, voulez-vous mesurer la contrepartie ? Voulez-vous vous demander : si nous n’avions pas fait l’offre du 8 août, si nous n’avions pas aussitôt après recueilli – alors que notre suspension des autorisations était conditionnelle – des adhésions sans réserve d’un certain nombre de puissances, si nous n’avions pas recueilli de leur part et de la part des plus importantes, un assentiment de principe, voulez-vous vous demander ce que serait devenu alors un incident comme celui du « Kamerun » ?

 

UNE REDOUTABLE INTERVIEW

Avez-vous oublié la redoutable interview publiée, il y a déjà un mois, où l’un des chefs des rebelles déclarait aux représentants de la presse internationale que, plutôt que d’accepter la défaite, il n’hésiterait pas à jeter l’Europe dans les pires difficultés internationales ? Demandez-vous cela en toute conscience ; demandez-vous-le en toute bonne foi et dites-vous que cette conduite qu’on nous reproche, qui a comporté de votre part des critiques que je comprends, qui a blessé en vous des sentiments que je fais mieux que comprendre, a peut-être, en une ou des heures particulièrement critiques, écarté de l’Europe, le danger d’une conflagration générale.

Et si on me dit : « Non, vous exagérez le danger », eh bien, écoutez-moi. Je vous demanderai de m’en croire sur parole, de vous en référer à la parole d’un homme qui ne vous a jamais trompés. (Applaudissements)

 

LA SITUATION D’AUJOURD’HUI

Et maintenant, aujourd’hui, devant quelle situation nous trouvons-nous ? J’ai reçu hier, je vous l’ai dit, les délégués de puissantes sections syndicales qui venaient demander au gouvernement de revenir sur sa position, d’entreprendre une autre politique, une politique déclarée de secours à l’Espagne. Je vous répondrai aussi franchement et aussi clairement que je leur ai répondu hier à eux-mêmes. Aujourd’hui, toutes les puissances ont non seulement donné leur assentiment, mais promulgué des mesures d’exécution. Il n’existe pas, à ma connaissance, une seule preuve ni même une seule présomption solide que, depuis la promulgation des mesures d’exécution par les différents gouvernements, aucun d’eux ait violé les engagements qu’il a souscrits. Je le répète, s’il le faut, et en pesant chacun de mes mots, ce que je viens de dire. 

Et vous pensez que, dans ces conditions, nous pouvons, nous, alors, déchirer le papier que nous avons, nous-mêmes, demandé aux autres de signer alors qu’il est tout frais de leurs signatures, alors que nous sommes hors d’état de prouver que par l’un quelconque des contractants, la signature en ait été violée !

 

JE REPONDS : NON !

Camarades, c’est une question trop grave pour qu’on la raisonne par des interruptions ou par des mouvements de séance. Je vous apporte ici matière à réflexion pour vous-mêmes, et ce n’est pas votre assentiment du moment que je vous demande ; ce que je vous demande, c’est tout à l’heure, ce soir, demain, la réflexion grave et sincère sur ce que je vous aurai dit

Si on me demande de revenir sur les positions du gouvernement et de déchirer le papier que nous avons signé, aujourd’hui comme hier, je réponds : « Non ! » Cela ne nous serait possible que si nous étions devant la certitude prouvée que la signature d’autres puissances a été violée. Nous ne pouvons pas retirer la nôtre, et nous pouvons encore moins faire quelque chose qui, à mes yeux, serait pire encore : la trahir en fait, sans avoir le courage de la retirer.

 

IMPOSSIBLE !

Je vous répète : impossible à mes yeux, et je parle ici, cette fois, à la première personne, impossible à mes yeux en l’heure présente d’agir autrement. Impossible d’agir autrement sans ouvrir en Europe une crise dont il serait difficile ou dont il serait malheureusement trop facile de prévoir les conséquences. (Applaudissements. Cris : « Vive la paix ! ») Camarades, je répète que dans une occasion semblable, je ne demande d’applaudissements de personne, mais que je réclame, que je revendique comme un droit l’attention de tous. 

Maintenant, je veux conclure. J’ai, je peux le dire, évité le pouvoir de mon mieux pendant une assez longue suite d’années. Je l’exerce aujourd’hui dans des conditions qui ne peuvent guère faire envie à personne, et vous savez, moi, quand je dis cela, c’est vrai !

 

DEUX DEVOIRS

J’ai deux devoirs à remplir : un devoir à remplir envers le Parti dont je suis le délégué au gouvernement, et j’ai, comme chef de gouvernement, à remplir des devoirs vis-à-vis de la collectivité nationale auprès de laquelle, nous, Parti, nous avons contracté des obligations.

Le jour où je ne pourrai plus concilier ces deux devoirs, le jour où je ne pourrai plus, sans manquer à ma solidarité disciplinée à l’égard de mon parti, pourvoir aux grands intérêts nationaux dont j’ai la charge, ce jour-là, le pouvoir pour moi deviendra impossible. 

 

LE GOUVERNEMENT DE FRONT POPULAIRE

J’ajoute encore quelque chose. Je suis au gouvernement non pas à la tête d’un gouvernement socialiste, non pas à la tête d’un cabinet prolétarien, mais à la tête d’un gouvernement de coalition dont le contrat a été formé par le programme commun du Rassemblement populaire. Le programme de notre gouvernement et le programme du Front populaire doivent compter pour une large part dans la direction de la politique quotidienne intérieure ou extérieure.

Cependant, nous n’avons pu tout régler par le contrat.

 

L’ADHESION DE L’URSS

La politique que nous venons de suivre n’a pas trouvé d’objection, de la part d’autres puissances. La convention à laquelle je déclare aujourd’hui impossible de refuser ou de soustraire la signature de la France, porte par exemple la signature de l’Union des républiques soviétiques. (Applaudissements)

Je ne puis donc pas croire que la conduite que nous avons suivie soit contraire aux principes du Rassemblement populaire et aux lignes générales du programme qu’il avait rédigé. 

 

SI L’UN DES PARTIS N’EST PAS D’ACCORD

Mais si l’un des partis ou l’un des groupements qui ont adhéré dès sa fondation au Rassemblement populaire, qui ont apposé leur signature au bas du programme, qui, dans le Parlement ou en dehors du Parlement, sont un des éléments nécessaires de notre majorité, juge notre conduite en contradiction avec les déclarations communes, le programme commun, les engagements communs, eh bien, qu’il le dise ! (Applaudissements)

Qu’il le dise franchement, qu’il le dise tout haut, et je vous l’assure : nous examinerons aussitôt ensemble quelles conséquences nous devons tirer de cette dénonciation du contrat. 

Et maintenant, un mot encore, peut-être celui auquel je tiens le plus, celui que je vous dirai du plus profond de moi-même : tant que je resterai au pouvoir, je veux vous dire à côté de ce que je ferai ou de ce que j’ai fait, ce que je ne ferai pas, ce que je me refuse à faire.

 

LA VRAI DIGNITE NATIONALE

Nous avons des amis qui traitent la conduite du gouvernement de débile et de périlleuse par sa débilité même. Ils parlent de notre faiblesse, de nos capitulations. C’est, disent-ils, par cette habitude, cette molle habitude de concessions aux puissances belliqueuses qu’on crée, en Europe, de véritables dangers de guerre. Ils nous disent qu’il faut, au contraire, résister, raidir et exalter la volonté nationale, que c’est par la fierté, l’exaltation du sentiment patriotique qu’on peut aujourd’hui assurer la paix. 

Mes amis, mes amis !… je connais ce langage, je l’ai déjà entendu. Je l’ai entendu il y a vingt-quatre ans. Je suis un Français – car je suis Français – fier de son pays, fier de son histoire, nourri autant que quiconque, malgré ma race, de sa tradition. (Applaudissements)

Je ne consentirai à rien qui altère la dignité de la France républicaine, de la France du Front populaire. Je ne négligerai rien pour assurer la sécurité de sa défense. Mais quand nous parlons de dignité nationale, de fierté nationale, d’honneur national, oublierons-nous, les uns et les autres, que, par une propagande incessante depuis quinze ans, nous avons appris à ce peuple qu’un des éléments constitutifs nécessaires de l’honneur national était la volonté pacifique ? (Ovation prolongée) 

 

LE SPECTACLE DE CERTAINES HEURES…

Est-ce que nous lui laisserons oublier que la garantie peut-être la plus solide de la sécurité matérielle, il la trouvera dans ces engagements internationaux, dans l’organisation internationale de l’assistance et du désarmement ? Est-ce que nous avons oublié cela ? Je crois que vous ne l’avez pas oublié. En tout cas, moi je vous le répète, j’ai vécu trop près d’un homme et j’ai reçu trop profondément de lui un enseignement, et j’ai gardé trop présent et trop vivant devant mes yeux le souvenir et le spectacle de certaines heures, j’ai tout cela en moi trop profondément pour l’oublier jamais, et y manquer jamais.

Tout ce qui resserre entre Français le sentiment de la solidarité vis-à-vis d’un danger possible, je le conçois ; mais l’excitation du sentiment patriotique, mais l’espèce de rassemblement préventif en vue d’un conflit qu’au fond de soi on considère comme fatal et inévitable, cela non ! Pour cela, il n’y aura jamais, je le dis tout haut, à tout risque, ni mon concours ni mon aveu. Je ne crois pas, je n’admettrai jamais que la guerre soit inévitable et fatale. Jusqu’à la dernière limite de mon pouvoir et jusqu’au dernier souffle de ma vie, s’il le faut, je ferai tout pour la détourner de ce pays.

 

JUSQU’AU BOUT… LA PAIX !

Vous m’entendez bien : tout pour écarter le risque prochain, présent de la guerre. Je refuse de considérer comme possible la guerre aujourd’hui parce qu’elle serait nécessaire ou fatale demain. La guerre est possible quand on l’admet comme possible ; fatale, quand on la proclame fatale. Et moi, jusqu’au bout, je me refuse à désespérer de la paix et de l’action de la nation française pour la pacification. 

Eh bien ! mes amis, c’était pour moi un besoin, non seulement de conscience, mais un besoin presque physique de vous parler aujourd’hui comme je l’ai fait.

Je me suis demandé gravement, amèrement, dans notre Conseil national, si je trouverais en moi la volonté, la substance d’un chef. Je n’en sais rien. Quand je reprends avec quelque sévérité critique l’histoire de ces trois mois, il peut y avoir bien des circonstances où je ne suis pas pleinement satisfait de moi-même, où un autre aurait pu faire mieux que je n’ai fait. (Cris : « Non ! ») Oui, je sais ce que je dis, je le sais mieux que vous ! (Rires) Seulement, il y a deux choses qu’on ne pourra jamais me reprocher : le manque de courage et le manque de fidélité. 
Je crois qu’en étant ici à cette heure, et en vous parlant comme je viens de le faire, je vous ai donné un témoignage du premier. (Applaudissements)

Ma fidélité, elle, ne faillira pas davantage : fidélité aux engagements pris envers mon Parti, fidélité aux engagements pris envers la majorité électorale, fidélité aux engagements souscrits par les autres éléments du Rassemblement populaire, fidélité aussi, laissez-moi vous le dire, à moi-même, aux pensées, aux convictions, a la foi qui ont été celles de toute ma vie et dans lesquelles j’ai grandi et vécu comme vous – comme vous et avec vous. (Ovation prolongée. La salle, debout, applaudit et crie : « Vive Blum ! » et chante l’Internationale.)

Un auteur à lire, à relire ou à découvrir : Agustín GOMEZ – ARCOS

Agustín Gómez-Arcos est né à Almería (Andalousie) le 15 janvier 1933 et est décédé à Paris le 20 mars 1998 à l’âge de 65 ans.

C’est un écrivain espagnol de tendance libertaire, d’expression espagnole et française.

Après des études de droit, il quitte l’université pour le théâtre. Certaines de ses pièces ayant été interdites, il quitte l’Espagne pour la France en 1966. Il est l’auteur de romans traduits dans le monde entier.

L’Agneau carnivore est son premier roman écrit en français ; le narrateur y évoque son enfance dans l’Espagne franquiste, l’inceste et l’homosexualité.

Mais d’autres romans sont davantage connus, notamment Ana Non qui a fait l’objet d’une adaptation à la télévision par Jean Prat en 1985.

Trois récompenses lui ont été attribuées : le prix du LIVRE INTER en 1977, à sa parution, le prix THYDE-MONNIER « Société des gens de lettres », le prix ROLAND DORGELES en 1978.

Ce livre, c’est l’histoire d’un voyage, mais d’un voyage très particulier qui est à la fois un et multiple : voyage à travers une vie, voyage d’amour, voyage initiatique et imaginaire, voyage de mort et voyage à travers une époque.

C’est le voyage que va accomplir l’héroïne, Anna Paucha, Anna la rouge, Anna NON, à pied, en suivant la voie de chemin de fer pour monter vers le nord de l’Espagne.

Avant, Ana était comblée, sa vie se résumait à peu de choses : un homme, trois fils, la République et une barque.

Mais la guerre civile va anéantir ce bonheur qu’elle croyait à jamais acquis. Elle perd le mari et les deux fils ainés. Le cadet, « le petit », 52 ans, accusé d’être un rouge, est en prison dans les geôles franquistes dans le nord de l’Espagne, depuis 30 ans et pour toujours.

Et c’est portée par l’espérance folle de pouvoir embrasser son fils une dernière fois, qu’à 75 ans, elle entreprend ce voyage emportant avec elle pour tout bagage, un pain qu’elle a confectionné «un pain aux amandes, huilé, anisé et sucré comme un gâteau », un pain comme il les aimait.

Ce gâteau va être le « cordon ombilical » imaginaire qui la relie à son fils et qui va lui permettre de se maintenir vivante tout au long du voyage malgré les épreuves qu’elle va devoir subir.

Tout au long de ce voyage, la mort, cette « putain » avec laquelle elle va dialoguer, se confier, l’appelant, la repoussant, est omniprésente.

Ces épreuves, ces dialogues avec la mort, sa confidente, vont lui permettre de retrouver une conscience politique et une identité, ainsi que d’apprendre à lire et de se métamorphoser en Ana OUI.

C’est aussi un voyage à travers l’Espagne colorée et typique mais surtout à travers l’Espagne franquiste, avec toutes ses injustices, ses absurdités, ses aberrations, sa misère et ses interrogations. Et l’on voit transparaitre les idées de Gomez Arcos, son anticléricalisme, son ironie et son mépris pour le Caudillo et son aéropage ainsi que sa haine de la patrie.

Franco est ainsi qualifié de « décompositions miniature, d’agonie naine » et son héritier Juan Carlos, de « Bourbon fade et jaune comme une crème tournée ». De même que les curés sont décrits ainsi : « les curés enrobés, folâtrant depuis mâtine comme des donzelles ».

Les autres oeuvres de GOMEZ-ARCOS :

Maria República

Scène de chasse (furtive)

Un oiseau brulé vif

Pré-papa ou roman des fées

L’enfant pain

L’enfant miraculée

L’homme à genoux.

J. Parès.

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La tragédie des Brigades Internationales

À travers de poignantes archives, Patrick Rotman retrace l’histoire des trente-cinq mille volontaires venus du monde entier combattre le franquisme dans la guerre civile espagnole.

( Diffusé sur ARTE le 25 octobre 2016 ).

Pendant la guerre d’Espagne (1936-1939), des volontaires affluent du monde entier pour défendre la jeune République, menacée par le putsch de Franco, lui-même soutenu d’emblée par l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste. Ouvriers parisiens, tchèques et britanniques, dockers new-yorkais, mineurs polonais ou anglais, militants antifascistes allemands et italiens… : en tout, quelque trente-cinq mille hommes, venus d’une cinquantaine de pays, vont combattre, souvent en première ligne et sans aucune formation, dans des batailles de plus en plus désespérées. Ils répondent à l’appel lancé sous l’égide de Moscou par l’Internationale communiste, alors que les démocraties occidentales ont décidé de ne pas intervenir. Ils ont entendu aussi les plaidoyers d’André Malraux et de George Orwell, engagés dès la première heure, l’écrivain français à la tête d’une escadrille aérienne, l’Anglais au sein du Poum (Parti ouvrier unifié marxiste, antistalinien) . Ils ont peut-être vu aussi les clichés incroyables qu’un couple de jeunes photographes, Gerta Pohorylle et Endre Friedmann, alias Gerda Taro et Robert Capa, expédient jour après jour du front. Comme eux, les écrivains Ernest Hemingway, John Dos Passos, Gustave Regler ou le documentariste Joris Ivens vont aussi contribuer à exalter la résistance héroïque du peuple espagnol, face à une armée franquiste bien supérieure en nombre et surarmée, qui multiplie les massacres au fil de ses victoires. À leurs côtés, le correspondant de la Pravda, Mikhaïl Koltsov, informe aussi le NKVD…

Entre deux feux

Dès 1937, les Soviétiques, affirmant leur emprise sur le camp républicain, agissent en effet en Espagne comme à domicile, arrêtant, torturant, exécutant tous ceux qui s’opposent au stalinisme. Les militants anarchistes et libertaires, parmi lesquels figurent nombre de brigadistes, se retrouvent pris ainsi entre deux feux totalitaires. Restituant à la fois destins individuels et complexité historique, Patrick Rotman retrace ces trois années d’un combat perdu, dont les faits d’armes continuent de nourrir, aujourd’hui encore, le romantisme révolutionnaire. Un récit intense et détaillé, porté par de poignantes archives, dont nombre des images magnifiques de Robert Capa et de Gerda Taro, qui mourra avant la défaite finale, à 27 ans, écrasée accidentellement par un char républicain. « Quand je pense à la quantité de gens extraordinaires que j’ai connus et qui sont morts dans cette guerre, avait-elle écrit peu de temps auparavant, j’ai le sentiment absurde que ce n’est vraiment pas juste d’être encore en vie. »

Antimilitarisme

Pour compléter mon article sur notre présence lors du 11 novembre à Tours auprès de plusieurs associations manifestant contre la guerre en général, je rajoute qu’une très belle chanson m’a inspirée dans ma jeunesse rebelle. Déjà, lorsque j’étais adolescente je disais que si j’étais un mec j’aurais refusé de faire le service militaire en préférant être objecteur de conscience, quitte à faire de la prison.

Quand ce fut le tour de mon fils, je me suis arrangée pour qu’il effectue un service civique, bien plus intéressant pour un jeune. Quand ma fille a essayé d’entrer dans l’armée, en tant que juriste, dès qu’on lui a dit qu’il fallait passer par la « case obligatoire » du maniement des armes elle a immédiatement refusé.

Cette chanson c’est Boris Vian qui l’a écrite, chanson qui a été censurée bien évidemment à l’époque car mal vue par ceux qui sont les protagonistes des guerres. Elle accompagne parfaitement bien la chanson de Craonne.

Monsieur le Président
Je vous fais une lettre
Que vous lirez peut-être
Si vous avez le temps
Je viens de recevoir
Mes papiers militaires
Pour partir à la guerre
Avant mercredi soir
Monsieur le Président
Je ne veux pas la faire
Je ne suis pas sur terre
Pour tuer des pauvres gens
C’est pas pour vous fâcher
Il faut que je vous dise
Ma décision est prise
Je m’en vais déserter

Depuis que je suis né
J’ai vu mourir mon père
J’ai vu partir mes frères
Et pleurer mes enfants
Ma mère a tant souffert
Elle est dedans sa tombe
Et se moque des bombes
Et se moque des vers
Quand j’étais prisonnier
On m’a volé ma femme
On m’a volé mon âme
Et tout mon cher passé
Demain de bon matin
Je fermerai ma porte
Au nez des années mortes
J’irai sur les chemins

Je mendierai ma vie
Sur les routes de France
De Bretagne en Provence
Et je dirai aux gens:
Refusez d’obéir
Refusez de la faire
N’allez pas à la guerre
Refusez de partir
S’il faut donner son sang
Allez donner le vôtre
Vous êtes bon apôtre
Monsieur le Président
Si vous me poursuivez
Prévenez vos gendarmes
Que je n’aurai pas d’armes
Et qu’ils pourront tirer

Boris Vian, Le déserteur

ETRE PRESENTS LE 11 NOVEMBRE – Point de vue

Anti-militariste convaincue depuis de longues années, je trouve que la Retirada 37 a toute sa place le 11 novembre, aux côtés de plusieurs associations, dénonçant la Guerre en général.

Je  n’oublie pas que mon père s’est battu, pour que les valeurs de la jeune République perdurent dans son pays qu’était l’Espagne. Aujourd’hui je prends son relais « pour faire vivre les mémoires et les valeurs des Républicains exilés espagnols ».

Je ne suis peut-être qu’un petit pion sur l’immense échiquier planétaire mais si tous les petits pions du monde pouvaient, ne serait-ce qu’un 11 novembre, se donner la main en criant HAUT et FORT  HALTE au FASCISME, HALTE aux GUERRES. Ce n’est pas du domaine de la puérilité ou d’un quelconque folklore. N’allons pas trahir nos parents, surtout au lendemain d’un reportage si bien fait sur ARTE « Tragédie des brigades internationales ». Ce reportage nous a montré que la bête immonde peut arriver, même de là où on ne l’attend pas et comment elle tient les ficelles sans hésiter à massacrer des combattants de son propre camp (les purges !!!). On ne peut pas cautionner l’armée.

Qui sont ceux qui provoquent les guerres ?

Ce sont les gros nantis, fabricants d’armes en tous genres, pactisant avec nos gouvernants, ou l’inverse,

Ce sont les gros nantis, jamais ceux qui se trouveront sur les champs de bataille ou les civils à se faire massacrer,

Ce sont les gros nantis qui donneront des ordres aux pauvres bougres pour les envoyer à la boucherie,

Ce sont les gros nantis qui s’en sortiront avec encore plus de pognon,

Ce sont toujours les gros nantis qui n’ont rien à faire du peuple, qui ont un EGO surdimensionné…

J’ENRAGE quand je lis « l’Homme (avec un grand H, je souligne), étant ce qu’il est, il nous faudra toujours une armée. » Rien n’empêche à cet Homme de changer et rien ne nous empêche de lui rappeler que la guerre a toujours été effroyable, il faut que cela cesse.

Quand pourra t’on dire « la Femme étant ce qu’elle est, exécre la guerre, elle refuse que ses enfants servent de chair à canons pour de gros nantis pourris » ??? 

UNISSONS-NOUS pour aller dans ce sens plutôt que penser que c’est normal. Pour la plupart d’entre nous nos parents ont participé, d’une manière ou d’une autre, à cette horrible Tragédie d’une guerre civile à l’intérieur d’une guerre civile, nous leur devons le RESPECT.

Ma devise est NUNCA MAS GUERRA (plus jamais de guerres).

POURQUOI NOUS SERONS PRESENTS LE 11 NOVEMBRE – Point de vue

Notre association est signataire comme elle l’a fait l’an dernier pour appeler au rassemblement du 11 novembre devant l’Université. Pour dénoncer cette guerre infâme que fut la première guerre mondiale.

Retirada37 a été créée « pour faire vivre les mémoires et les valeurs des Républicains espagnols exilés » et parmi eux figuraient des militants de différentes causes républicaines, socialistes, communistes, militants démocrates et progressistes, anti-fascistes avant tout et parmi eux de nombreux anarchistes.

Ces militants anarchistes portaient effectivement ces messages antimilitaristes, qui n’étaient pas partagés par tous les Républicains combattant le fascisme, mais leurs pensées font partie de ces mémoires. C’est la raison pour laquelle notre association appelle à ce rassemblement, sachant que les valeurs portées par les Républicains étaient aussi contradictoires.

Une phrase de l’appel a choqué plusieurs adhérents qui m’en ont fait part « L’armée, quelle qu’elle soit, est l’école du crime. »

Je suis aussi de ceux qui pensent que toutes les armées ne sont pas « l’école du crime ». Que certaines l’ont été comme l’armée nazie, comme les militaires félons franquistes coupables de l’assassinat de la jeune République espagnole.

Mais je pense aussi à tous ces militaires qui ont combattu contre le fascisme, au premier détachement de la division blindée, de la Deuxième DB du Général Leclerc, commandée par le Capitaine Dronne, à être entrée dans Paris le 24 août 1944, avec La Nueve, composée de nombreux anarchistes espagnols, qui furent des combattants exemplaires.

Je pense à tous ces militaires qui ont payé de leurs vies pour la Libération de la France, après avoir combattu avec les Brigades internationales comme le Colonel Rol-Tanguy.

Non toutes les armées ne sont pas « l’école du crime » il y en eu de nombreuses qui ont permis de nous délivrer du joug fasciste.

Tout cela ne peut nous faire oublier la boucherie de la guerre 14/18,  avec la mobilisation de 70 millions d’hommes dans le monde, 10 millions de morts, 20 millions de blessés, 640 000 veuves, 760 000 orphelins, 740 000 mutilés. C’est contre toutes ces horreurs, contre les risques de guerre qui planent sur le monde, contre la bête immonde qui guette à nos portes, que notre association sera aussi présente le 11 novembre. La Chanson de Craonne pourra nous rassembler grâce aux paroles recueillies par Paul Vaillant Couturier.

A Tours le 26 octobre 2016
Luis Lopez
Président de Retirada37

La Chanson de Craonne

Paroles
Quand au bout d’huit jours, le r’pos terminé,
On va r’prendre les tranchées,

Notre place est si utile

Que sans nous on prend la pile.

Mais c’est bien fini, on en a assez,

Personn’ ne veut plus marcher,

Et le cœur bien gros, comm’ dans un sanglot

On dit adieu aux civ’lots.

Même sans tambour, même sans trompette,

On s’en va là haut en baissant la tête.
Refrain

Adieu la vie, adieu l’amour,

Adieu toutes les femmes.

C’est bien fini, c’est pour toujours,

De cette guerre infâme.

C’est à Craonne, sur le plateau,

Qu’on doit laisser sa peau

Car nous sommes tous condamnés

C’est nous les sacrifiés !
C’est malheureux d’voir sur les grands boul’vards

Tous ces gros qui font leur foire ;

Si pour eux la vie est rose,

Pour nous c’est pas la mêm’ chose.

Au lieu de s’cacher, tous ces embusqués,
F’raient mieux d’monter aux tranchées

Pour défendr’ leurs biens, car nous n’avons rien,

Nous autr’s, les pauvr’s purotins.

Tous les camarades sont enterrés là,

Pour défendr’ les biens de ces messieurs-là.
au Refrain
Huit jours de tranchées, huit jours de souffrance,

Pourtant on a l’espérance

Que ce soir viendra la r’lève

Que nous attendons sans trêve.

Soudain, dans la nuit et dans le silence,

On voit quelqu’un qui s’avance,

C’est un officier de chasseurs à pied,

Qui vient pour nous remplacer.

Doucement dans l’ombre, sous la pluie qui tombe

Les petits chasseurs vont chercher leurs tombes.

Refrain

Ceux qu’ont l’pognon, ceux-là r’viendront,

Car c’est pour eux qu’on crève.

Mais c’est fini, car les trouffions

Vont tous se mettre en grève.

Ce s’ra votre tour, messieurs les gros,

De monter sur l’plateau,
Car si vous voulez la guerre,

Payez-la de votre peau !

Faire vivre les mémoires et les valeurs des Républicains espagnols exilés

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