BELCHITE

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Pendant mes vacances en juin de l’an dernier, j’ai voulu découvrir Belchite, alors que j’étais à la découverte de l’Aragon, région où mon père vécut sa jeunesse. Cette commune se situe à environ 50 km au sud de Saragosse. Pendant la guerre civile ce fut un point peu stratégique, en fait, pour les Républicains qui voulaient tenter de reprendre Saragosse, bastion important de l’anarchisme, qui avait été reprise trop facilement par les nationalistes, dès le lendemain du coup d’état militaire franquiste.

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J’étais intéressée par le côté historique puisque d’âpres et rudes combats y eurent lieu et que j’en avais entendu parler par notre ami anarchiste Emilio Marco qui s’était jeté dans la bataille avec une immense conviction dans la colonne d’Antonio Ortiz de la CNT, mais également par Isabelle Sastron dont la maman était issue de cette ville.

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Effectivement, quand on découvre les lieux restés intacts, on peut s’imaginer la violence des combats.

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Cette ville était républicaine et a résisté héroïquement alors que les troupes franquistes voulaient absolument faire tomber ces «rojos».

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Tout d’abord, aux environs, nous découvrons des terres arides, pierreuses, et ma première interrogation fut pour les combattants de la République qui n’avaient aucun abri existant de retranchement. Ils devaient se retrouver bien souvent à découvert face au lourd armement de massacre utilisé par le «rondouillard» de Franco, épaulé de ses amis hitlériens, ou mussoliniens.

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Les combats les plus intenses se sont déroulés en période de très grosse chaleur, fin août et début septembre 1937, 15 jours d’intensité guerrière, mais les Républicains aidés par la XVème Brigade Internationale et quelques avions russes en sortirent vainqueurs. Les pertes furent très importantes, on dénombra environ 5000 morts.

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Pourquoi Franco a-t-il voulu conserver ce village en ruines comme on découvre aujourd’hui ce «Pueblo Viejo de Belchite».

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Pour en savoir davantage, nous avons fait la visite guidée, ma fille et moi, sous un soleil de plomb, pas de chance car elle débutait à midi.

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Dès le portail d’entrée franchi, l’horreur nous saisit.

J’ai été effarée d’apprendre par la guide que Franco, durant son règne, a voulu garder ce village en l’état afin d’en faire sa propagande anti-républicaine. Tant qu’il a occupé son poste de dictateur, il obligeait les jeunes collégiens ou lycéens à des visites de ces lieux. On les «instrumentalisait» en leur disant de bien regarder les atrocités commises par ces « barbares rouges». Pendant des décennies les jeunes espagnols ont ainsi visité ce village, comment pouvaient-ils penser que de telles informations n’étaient que de la propagande franquiste ? Parce qu’il faut bien se dire que les langues ne se déliaient plus beaucoup, le peuple espagnol vivant sous la terreur d’une simple dénonciation, ne serait-ce bien souvent que par un membre de sa propre famille. Ce fut une longue amnésie collective, un long silence s’installa.

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Un nouveau Belchite a été construit un peu plus loin par des prisonniers républicains, dans des conditions totalement inhumaines.

En fait, nous apprîmes pendant cette visite que le village, à la fin des combats, était jonché de cadavres d’humains ou animaux, que l’odeur y était pestilentielle et le risque d’épidémies très important pour les survivants. Ce sont les Républicains qui se sont attelés à faire brûler tous ces cadavres en décomposition dans les rues et les décombres, et non pas les franquistes.

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La bataille s’était déroulée maison par maison, rue par rue, dans une extrême cruauté, parfois au corps à corps. Ce ne fut qu’en mars 1938 que les troupes franquistes reconquirent la ville.

Des familles continuèrent de vivre jusqu’au milieu des années 1960 dans les quelques maisons moins impactées par cette bataille.

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Je suis toujours admirative de tous ces hommes qui, malgré leurs divergences syndicales ou politiques, ont bataillé fermement cet ennemi qu’est le fascisme. Ils ont défendu avec opiniâtreté un bel idéal, celui d’une République libre, fraternelle, laïque, solidaire, égalitaire, pacifique, celle en laquelle j’aspire encore aujourd’hui.

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Je terminerai ce propos par la célèbre expression utilisée par ceux qui sont partis sur le front d’Aragon pour se donner du courage « ¡ A Zaragoza o al charco ! » Mon père se trouvait-il dans ce terrible enfer ?

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